Rémi Salva est né à Toulouse il y a 25 ans. Jeune photographe démarrant son activité professionnelle, il parle un français ponctué d’anglicismes involontaires car malgré son jeune âge, il vit en anglais au quotidien depuis plusieurs années à force de séjours dans les pays anglo-saxons à la recherche d’inspiration. Ce qu’il préfère dans la vie, c’est prendre sa voiture, son matériel, et aller vagabonder un peu partout à la recherche de belles choses à capturer à travers son appareil. Inspiré par ce qui l’entoure, Rémi s’est mis récemment à la photo d’architecture ; à force de se promener et de se laisser perdre dans des grandes villes comme New York, Sydney ou Paris, rien de plus normal ! Et puis, montrer de nouveaux angles, de telles célébrités mondiales, c’est aussi bon pour la com’…
A travers lui, on pourrait tenter d’esquisser un modèle du chemin de chaque mordu de photographie qui souhaiterait en faire son métier. Et pourtant, il n’y a pas plus unique qu’un parcours de photographe en freelance, en particulier au milieu de toutes ces nouvelles façades virtuelles offertes par Tumblr, Instagram, Pinterest et tant d’autres sites qui nous abreuvent quotidiennement d’images. Portrait de ce jeune photographe dans un monde en mouvement perpétuel.
Comment définir ton travail actuel en tant que photographe ? Je parle de ton versant artistique, qui reste, avant tout, le cœur de ce que tu fais.
J’ai actuellement deux projets principaux. Le premier, c’est ce que j’appelle les « story pictures », qui peuvent être décrites comme des photographies d’un lieu en général connu et touristique avec des dégradés de couleurs assez surréels. En fait, j’ai repris le principe des timelapses [vidéos constituées d’une série de photos d’un même objet prises à intervalles réguliers, ndlr] et je me suis dit « pourquoi ne pas les rassembler en une seule photo ? ».
- A Sunset story, London – Rémi Salva ©
Oui, j’ai vu que c’est quelque chose qui commence à se développer. Mais les tiennes sont un peu différentes : elles ne font qu’un seul ensemble, contrairement à ce qu’on peut voir ailleurs où l’on dirait que quelqu’un a découpé ces différentes photos pour n’en faire qu’un collage où l’on distingue chaque étape. Et c’est ça qui donne cette impression qu’il ne s’agit pas que d’un énième filtre Instagram sur tes photos, car, toi, tu les rassembles et les travailles par fondus…
Exactement. J’avais commencé à les faire en séquencé aussi, mais j’ai fini par préférer le fondu. Mon premier essai a eu lieu en 2012. En moyenne, il me faut trois heures de shooting pendant la transition entre le jour et la nuit, puis entre une et trois heures de post-prod. Mais ce qui prend beaucoup de temps aussi, c’est la réflexion ; il faut penser la photo, voir comment la lumière va évoluer, à quoi le résultat va ressembler. Pour celle de Big Ben par exemple, j’ai dû faire attention à la luminosité, deviner quelles lumières allaient s’allumer, etc. Et puis le reste, je le vois en post-prod, là où, entre autres, je choisis si je garde dix ou vingt-cinq photos pour le résultat final.
- Rémi Salva ©
De manière générale, sur quoi te concentres-tu quand tu prends une photo ? Peux-tu nous parler de tes sujets et objets préférés à travers ton deuxième projet ? Je pense que c’est là que les exemples s’appliquent le mieux…
Le deuxième projet, c’est Lost in America, quand je prenais la voiture et que j’allais shooter sur de longs trajets. Je me concentre en général sur la composition – extrêmement important – et les lignes, mais j’aime aussi beaucoup les couleurs sur mes photos. On y voit souvent du bleu foncé, du orange et du magenta. Ce qui m’intéresse, c’est la beauté du paysage en lui-même, comme aux États-Unis, le premier endroit qui m’a marqué. Je préfère mettre l’accent sur l’ensemble ; les détails, c’est pas mon truc. Mais je fais attention à l’effet global avec les jeux de couleur, etc. Même quand je prends des personnes en photo, il faut que ça se passe à l’extérieur. Je manque de créativité en studio, donc je m’inspire de ce qui nous entoure.
- Rémi Salva ©
La photo, l’idée d’en faire ton activité principale… quand est-ce qu’on peut considérer que ça a commencé pour toi ?
Depuis tout petit, je m’intéresse à la technologie, aux toutes dernières sorties. J’ai aussi beaucoup voyagé avec mes parents, en Europe, aux États-Unis. Je ne dirais pas que ces voyages en famille aient été un déclencheur, cependant. Mon véritable intérêt dans les paysages et la nature, je l’ai développé soit tout seul, comme lors de la claque visuelle que j’ai prise face au Grand canyon durant mon premier voyage aux USA en 2010, soit aux côtés d’amis photographes avec qui j’ai beaucoup expérimenté niveau technique, notamment pendant mes voyages en Corse.
Parlons études. Si je te demande d’expliquer ton parcours professionnel à partir du moment où tu as décidé d’en faire ton tremplin, ça ressemble à quoi ?
Après mon bac, j’ai d’abord fait un Bachelor en école de commerce, pour assurer mes arrières et sans savoir vraiment ce que j’allais en faire. Mais j’en ai eu marre assez vite, et je suis allé travailler deux ans aux États-Unis. C’est là que j’ai vraiment commencé à être actif niveau réseaux et professionnalisation de mon activité. Ensuite, j’ai trouvé un Master en photographie intéressant, et je me suis envolé pour Londres afin d’y apprendre d’abord la technique, puis dans un second temps, tout l’aspect communication.
- Edges, Colorado USA 2015 – Rémi Salva ©
Ta stratégie pour être présent sur internet et te faire connaître ?
Je suis présent sur plusieurs réseaux à la fois, constamment mis à jour. Ça, c’est encore plus important que la diversité des supports, et c’est le premier truc qu’on nous apprend à l’école de photo : être là, montrer non seulement qu’on est toujours vivant et actif sur les réseaux sociaux, mais surtout indiquer où on est, ce qu’on fait, surtout quand, dans mon cas, on s’attache à capturer des lieux, des villes précises à chaque fois. Facebook me sert surtout à garder contact avec un réseau important de photographes à Londres et avec mes connaissances, mais ce sur quoi je dois me concentrer maintenant, avec l’évolution de la photo sur internet, c’est bien sûr Instagram. Il faut poster sans relâche, tous les jours. J’en suis actuellement à trois photos par jour, de Londres, Paris et New York. En général, je rajoute pour chacune en description le titre que je lui donne, l’endroit où je l’ai prise, la date, mon équipement et les métadonnées techniques (ISO, obturation, ouverture…). Ce qui est important pour un photographe, en particulier dans ce que je fais, c’est dire où tu es à travers la photo que tu postes.
Et évidemment, tout se fait en anglais, sauf quelques fois sur Facebook, où il m’arrive d’écrire en français.
Dans combien de temps pourrais-tu espérer voir des résultats significatifs ?
L’idéal serait de pouvoir vivre de la vente de mes photos d’ici cinq à dix ans, et de continuer à développer des photowalks, ces sortes de visites organisées pour faire découvrir une ville et ses meilleurs spots à des photographes amateurs.
Et dans un futur proche ?
Je veux surtout continuer de voyager, pour découvrir de nouveaux endroits et prendre des photos, évidemment ! Mon prochain voyage, c’est l’Australie. Comme autre projet, je vais aussi essayer de travailler en gardant toujours un pied dans le milieu de la photographie, pour avoir un revenu fixe : une boutique m’irait bien, par exemple. Et puis certains sites australiens proposent aussi des jobs en freelance pour des photographes. Il s’agit toujours de rester dans ce milieu-là pour y rencontrer des gens, photographes ou non, qui pourraient être intéressés par mon travail ou intéressants pour moi.
- The Opera house, Sydney – Rémi Salva ©
Et enfin, last but not least, parlons de tes récentes expositions, malheureusement déjà passées. La première a eu lieu à Opio (06) entre le 25 juillet et le 5 août 2016, et tu y as montré 14 photos en format A3, issues de Lost in America. La seconde, c’était à New York du 06 au 12 septembre 2016. Comment c’était ? Quel effet ça t’a fait de monter tes premières expositions en solo ?
C’était super, ne serait-ce que pour le fait d’être à NYC, une ville que j’affectionne tant ! Ce fut une expérience très enrichissante car j’étais en situation de professionnel, en conditions réelles : il s’agissait de tout organiser de « A à Z » des sponsors à la galerie en passant par les relais de com’ et de pub, mais aussi de décider du choix des photos les plus représentatives et les plus intéressantes pour des Américains, superviser et surveiller tirages et encadrements, investir et occuper l’espace et la déco de la galerie elle-même… le début de la vraie vie de professionnel !
Outre les quelques ventes faites, j’ai pu avoir différents contacts bien intéressants tant côté visiteurs que d’autres galeries ou même d’autres photographes. Vraiment une très belle expérience « grandeur nature » qui me donne l’envie de continuer sur cette lancée !
Nous souhaitons bonne chance à Rémi pour la suite – bonne chance, car dans ce milieu, une fois les efforts fournis, c’est bien d’opportunités et de ténacité qu’il est question pour percer !
Vous pouvez retrouver le reste de son travail sur son site, mais aussi sur Facebook et Instagram.