CINÉMA

Le Festival Lumière n’est pas un Festival de Cannes comme les autres

Son tapis rouge, ses invités (plus ou moins) prestigieux, ses master class, son marché du film ; le Festival Lumière a tout l’air d’un petit festival de Cannes. D’autant plus que l’on retrouve à la tête de ces deux manifestations le même homme, Thierry Frémaux. Mais lorsque l’on compare plus précisément les sélections respectives des films projetés, un gouffre se profile. Et si la version lyonnaise était l’antithèse parfaite de la cannoise ?

Bien qu’il soit considéré comme le plus grand festival au monde, le Festival de Cannes ne représente pas un modèle de culture populaire. Les films de genre sont souvent écartés de la sélection officielle. Par exemple le récent film intitulé Le Dernier train pour Busan, succès public et critique de cet été, a été présenté en séance de minuit, hors compétition. Le Festival Lumière quant à lui fait la part belle à un cinéma plus populaire. Cette année on a pu assister à la rétrospective Universal Monsters (Frankenstein, Dracula, La Créature du lac noir…) ou à l’hommage au cinéma d’action de Walter Hill. Autant de films dont la qualité est aujourd’hui reconnue majoritairement mais qui n’auraient probablement pas eu leur place à Cannes. Peut-on imaginer un seul instant voir Lawrence d’Arabie ou le film érotique Hollywood Vixens projetés dans la grande salle du Palais des festivals ? Bien sûr les problèmes de timing, de politique des studios, de disponibilités et tant d’autres facteurs expliquent la présence ou non de tel film. Mais il est question ici de pointer un état d’esprit, disons-le, sectaire.

Le public venu écouter Quentin Tarantino parler de l'année 1970

Le public venu écouter Quentin Tarantino parler de l’année 1970

Une sélection ne se fait pas au hasard. À travers les films choisis, un festival entend se montrer tel qu’il veut que le public le voit. Le Festival de Cannes veut renvoyer l’image d’un cinéma engagé politiquement et sophistiqué. Face à cela, le Festival Lumière entend soutenir un patrimoine cinématographique riche, multiple et ouvert au plus grand nombre mais tout aussi exigeant. Il est même question d’audace lorsque le film Le Géant de fer de Brad Bird, jadis sorti en catimini par son studio Warner Bros, est projeté devant un public de 5000 jeunes spectateurs. C’est également avoir une haute estime du public que de penser qu’il s’intéressera à une rétrospective de l’année 1970 ou à un ciné-concert à l’orgue de L’Inhumaine. Autrement dit, le Festival Lumière a foi en la curiosité du spectateur tandis que Cannes n’a d’yeux que pour son image auteurisante et la critique institutionnelle.

Il est vrai que cette démarcation est à nuancer. La pop culture parvient de plus en plus à se frayer un chemin sur la montée des marches. Ces dernières années ont été marquées par la présence du cinéma de genre asiatique ou même par la nomination de Steven Spielberg et George Miller à la tête du jury. Cette évolution est sans doute à mettre sur le compte de l’arrivée de Thierry Frémaux en tant que Directeur Général du Festival de Cannes. Toujours est-il que le Festival Lumière préfère parier sur un cinéma issu de la culture populaire plutôt que celui, plus bourgeois, du cinéma d’art et essai.

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