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Identité numérique : un autre soi ?

Les réseaux sociaux sont-ils déconnectés de la vie réelle ? Autrement dit, sommes-nous la même personne sur Facebook que dans la réalité ? Retour sur la notion d’identité, brève étude du cas Facebook et éventuelles solutions aux problèmes posés par les réseaux sociaux en général.

Identité(s) numérique(s), identité(s) réelle(s)

Qu’est ce que l’identité ? Un nom, un visage, un rôle, des actes, une position dans la société ? D’une manière générale, on peut la définir comme l’ensemble des propriétés définissant un individu. L’identité “réelle” d’une personne que vous connaissez sera donc concentrée sur son nom, son âge, son genre, sa position sociale, ses goûts ainsi que la relation que vous entretenez avec elle (ami-e, famille, collègue de travail.) Cependant, sur Internet, le lien social n’est pas physique : il est abstrait. Et quand personne ne vous voit, qui vous empêche d’être quelqu’un d’autre ? Nous nous créons alors une identité dite “numérique”, plus ou moins distincte de notre identité réelle. Car dans le cas des réseaux sociaux vous êtes celui qui – dans le cadre formel qui vous est imposé – choisit quoi publier. Ainsi, en écrivant une chose ou une autre, en partageant ce statut, en choisissant cette photo pour votre profil plutôt qu’une autre, vous décidez des signaux que vous souhaitez envoyer à la communauté. Le réseau permet alors de s’exprimer plus librement et de montrer ce que l’on veut, sans la barrière du jugement direct d’autrui. En conséquence, l’individu aura tendance – dans la quête naturelle de la reconnaissance des autres – à proposer son “lui idéal”. D’où le décalage – provoquant parfois une déception – entre une personne à l’identité numérique remarquable et à l’identité réelle ordinaire.

Le cas Facebook

Facebook est l’exemple parfait de l’identité numérique. Vous allez sur le profil d’une personne qui vous intrigue, et en quelques secondes, vous recevez les signaux suivants : photo de profil, photo de couverture, images à la une, statuts récents. Et vous voilà en train de stalker (espionner) la personne en tentant de saisir qui elle est vraiment, une photo de profil après une autre. Le profil Facebook semble donc agir comme une vitrine de l’identité de la personne. Mais une vitrine soigneusement préparée par cette dernière.  Si certains font plus attention à leur image que d’autres, il faut toutefois garder à l’esprit que tout profil numérique est construit par son propriétaire. Mais que faire des comptes pour lesquels les propriétaires ne sont pas en mesure de les alimenter ? Quid, par exemple, des comptes Facebook des personnes décédées ? Un sujet certes glauque et macabre mais pourtant bien réel. Dans ce cas précis, l’identité numérique continue d’exister alors que l’identité réelle a pris fin. Quelques brèves observations de ces comptes amènent à une conclusion évidente : le profil agit alors comme un souvenir de la personne. Le compte Facebook est utilisé par la famille et les amis dans un élan de chagrin et de sympathie et permet à la communauté de se retrouver autour de la mémoire du défunt. Un mémorial numérique, en quelque sorte. On retrouve, dans ces cas, la complexité du concept d’identité numérique qui, au delà même de la notion l’identité, renvoie à celle de trace, de mémoire et de souvenir.

Des solutions ?

Recentrons-nous sur notre question initiale : sommes-nous différent-e-s sur Facebook que dans la vie ? La réponse semble évidente, car sur Facebook, nous avons la plupart du temps la main mise sur notre image et nos actions alors que la vie réelle ne permet pas le contrôle permanent des signaux que nous envoyons aux autres. La question n’est donc pas tant de savoir si nous sommes différents, mais surtout de comprendre comment les réseaux sociaux influencent nos comportements.

Comment ne pas se faire happer par les réseaux sociaux au détriment de notre personne réelle ? D’abord, avoir conscience de nos propres actions sur les réseaux sociaux. Se rendre compte, par exemple, que les codes que l’on adopte sur Facebook, Twitter ou Instagram ne sont pas les mêmes et ne visent pas les mêmes objectifs : il faut alors comprendre comment un réseau social et sa communauté arrivent à influencer nos comportements. Puis, remettre en cause la notion de popularité, très importante notamment sur Facebook via le nombre d’amis et de likes sur les photos. Enfin, il faut comprendre que c’est en apportant un regard critique sur les réseaux  sociaux que l’on peut mieux s’en distancer : si les profils sont des vitrines construites par leurs auteurs, il est normal que celles-ci ne montrent que les aspects positifs de leurs vies et que la nôtre nous paraisse plus ennuyeuse.

Le réseau social peut donc être dangereux dans le cas d’une absence de réflexion sur son utilisation : le risque est de tomber dans la superficialité, la perte de confiance en soi, la constante attente de l’évaluation par les autres, la peur du silence. Mais il ne s’agit pas de les diaboliser non plus, car ils permettent une liberté d’expression importante : on peut rester en contact avec ses amis, partager du contenu, réagir aux publications des autres, enrichir sa culture, participer à des débats d’idées, s’amuser, blaguer etc. Le mot de la fin sera donc le suivant : il faut toujours avoir conscience du conditionnement de nos comportements par le réseau, et une fois cette prise de conscience faite, la dépasser et tenter de ne pas tomber dans le piège de la superficialité.

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