La jeune réalisatrice allemande Maren Ade revient avec un nouveau long-métrage après plusieurs années passées dans la production (notamment sur Les Mille et une nuits de Miguel Gomes, présent à Cannes l’an dernier). Son nouveau film, Toni Erdmann, est présenté aujourd’hui en compétition officielle.
Durant la projection presse qui se déroulait en salle Debussy hier après-midi, la salle a applaudi certaines séquences au beau milieu du film à plusieurs reprises. S’il n’est pas rare durant le festival que l’on applaudisse à tout va, Toni Erdmann semble néanmoins avoir suscité une certaine euphorie qu’il fait bon de partager. Long de ses 2h42, le film apparaît comme un appel à prendre les choses avec plus de légèreté, on en sort éprouvé mais comme délivré d’un poids.
Toni Erdmann, c’est un père de famille qui s’inquiète de la vie que mène sa fille dans le cadre de son travail de consultante pour une grande entreprise, et qui décide de lui rendre visite en Roumanie pour l’aider à être heureuse. Dans l’ensemble, le film se donne à la fois comme une très belle leçon de philosophie vis-à-vis de la place des individus dans le monde contemporain et comme l’exploration d’une relation père/fille quelque peu particulière.
En effet, le rythme du film est dicté par ses personnages que l’on prend le temps de connaître amplement. Toni, le père, apparaît comme un farceur au grand cœur qui adore se déguiser, c’est un personnage attachant et dual. A l’inverse, sa fille apparaît constamment prise par le stress du travail, elle n’est présente que physiquement, toujours la tête ailleurs. Autour de ces deux personnages là, le film parvient à éviter de devenir un parcours initiatique durant lequel il serait clair dès le départ que le père détient une vérité incontestable au sujet du bonheur. Au contraire, le film prend le temps et fait place à de nombreuses variations au sein de la relation entre les deux personnages.
Par ailleurs, on peut dire que le film provoque chez le spectateur le même effet que Toni a sur sa fille grâce à un travail de mise en scène remarquable (le film réserve par exemple une scène de chant sortie de nulle part qui a coupé le souffle à toute la salle) et grâce à un humour léger qui passe par les différentes plaisanteries du père. Enfin, ce qui sauve le film du caractère pesant que les « récits de vie » peuvent avoir, c’est la manière dont il intègre une dimension quasi fantastique à travers les apparitions et réapparitions inattendues de Toni. Après une demi-heure de film, on finit par penser qu’il se cache derrière toutes les portes et dans tous les placards !
Le jour où vous en aurez ras-le-bol, que vous aurez besoin d’un peu de tendresse et d’humour, allez voir Toni Erdmann.