ART

Persona, l’exposition fascinante du musée du Quai Branly

L’Homme a toujours été enclin à rechercher la présence autour de lui, à trouver de l’humain dans ce qui, justement, ne l’est pas. L’ « étrangement humain », c’est donc ce que se propose d’explorer le musée du Quai Branly à travers l’exposition Persona, qui mêle près de deux cents œuvres mêlant arts premiers, art contemporain, sciences et nouvelles technologies.

Roseline de Thélin, Homo Luminoso, 2015 (fibre optique)- ©E.Bouré

Roseline de Thélin, Homo Luminoso, 2015 (fibre optique)

L’exposition se divise en quatre parties, qui chacune leur tour explorent les mécanismes de personnification auxquels nous nous prêtons sans cesse plus ou moins consciemment. La première partie, « Il y a personne », interroge les présences invisibles et les endroits où elles peuvent se cacher : dans la forme d’un amas d’étoiles, dans les microcosmes marins, dans les recoins des chambres pourtant vides, dans les objets et statuettes, dans l’infiniment grand comme dans l’infiniment petit. La deuxième « Il y a quelqu’un ? » s’inscrit en écho à la première, et envisage les moyens de détection, d’analyse et de matérialisation de ces entités invisibles. De la panoplie du ghostbuster aux captures d’aura par la photographie en passant par la machine à communiquer avec les morts de Thomas Edison, nombre de techniques sont envisageables pour tenter de percevoir ces présences qui nous échappent, qui nous effraient et nous attirent à la fois.

Figurine anthropo-zoomorphe en ivoire- ©E.Bouré

Figurine anthropo-zoomorphe en ivoire- ©E.Bouré

La troisième partie est centrée autour de la Vallée de l’Étrange, un concept développé par le roboticien japonais Masahiro Mori qui envisage les rapports d’empathie ou de répulsion que l’être humain entretient avec les créatures artificielles, qu’elles soient animées ou inanimées, de l’animal en peluche au robot humanoïde. L’expérience évoque le mythe de Frankenstein et soulève nombre de questions : jusqu’où peut-on recréer artificiellement l’humain ? A partir de quel moment ces (re)créations nous font-elles peur, créant une sensation d’inquiétante étrangeté ? La dernière partie de l’exposition s’intéresse justement à l’intelligence artificielle au cœur du quotidien à travers une Maison Témoin qui pose la question des enjeux du futur et des nouvelles technologies, et du lien que nous voulons établir avec ces robots possibles : seront-ils purement fonctionnels, ou porteurs d’une charge émotionnelle et affective à l’image des actuelles love dolls japonaises ?

Yanobekkenji, Sweet hamoniser II, 1995- ©E.Bouré

Yanobekkenji, Sweet harmoniser II, 1995- ©E.Bouré

De bout en bout de l’exposition, le public est happé par ces questionnements sur les « présences-limites » qui sont régulièrement repris par la littérature, le cinéma et la pop culture. On pense pêle-mêle au Horla de Maupassant, aux sympathiques droïdes de Star Wars, aux robots plus inquiétants comme les androïdes trop humains de Blade Runner ou Hal, l’ordinateur de 2001 : L’Odyssée de l’Espace...

Persona nous offre une plongée dans l’inconnu, et reflète notre fascination pour l’invisible qui selon nos croyances nous éclaire, nous hante, nous protège ou nous terrifie. Qu’elles se trouvent dans le monde terrestre, dans l’univers, dans la religion, dans les arts, dans les sciences et technologies nouvelles qui nous entourent, qu’elles soient détectables ou non, les présences extra-humaines laissent une empreinte profonde dans l’inconscient collectif et nous rassemblent sur des interrogations communes autour de l’humain et de ses frontières.

Persona, Musée du Quai Branly
Jusqu’au 13 novembre 2016

Etudiante en cinéma à la Sorbonne Nouvelle, passionnée d'art et de culture, et aimant en parler.

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