MUSIQUE

Entre rap et électro, les versets hypnotiques d’Arm et Tepr

Après avoir collaboré sur Le dernier chapitre, Jusque là ou encore Mon visage, le rappeur rennais Arm (ex Psykick lyrikah) et le producteur morlaisien Tepr (ex-Abstrackt Keal Agram) entrelacent à nouveau leurs deux univers sur l’album Psaumes, sorti sur le label Yotanka.

Quittant chacun leur zone de confort, Arm et Tepr offrent sur cet album une liturgie mêlant un rap brut et incisif à une électro pleine de puissance et d’intensité. La réussite de ce premier album collaboratif tient au cocktail entre le synthétisme glacé et les beats minimalistes des productions de Tepr et le flow désenchanté à contre-courant de Arm.

Sur Psaumes, la simplicité prend le dessus sur la fioriture. Aucun artifice dans ces 28 minutes de verset où seul l’imaginaire est présent. On y retrouve le dénuement solennel du sacré, le réalité ordinaire du profane. Témoins de la vie nocturne au sein d’une ville imaginaire à la Néo-Tokyo, Arm et Tepr nous plongent au plus profond de leur imagination, dans un univers parrallèle. Véritable polar urbain de science fiction à la Blade Runner, Psaumes nous fait goûter aux mystères pour mieux nous perdre, nous faire voyager.

“Du feu dans nos psaumes”

Les percussions digitales de Totem ouvrent l’album. A la fois épique et brut, ce titre mêle le sacré et le profane pour offrir une introduction bien taillée et hypnotique, une présentation de nos deux “éclaireurs”. Avec intensité et minimalisme, Tu sais relâche toute la puissance lyrique de l’instru. Dans leur univers sombre et enivrant le gang imaginaire de Néo-Tokyo semble presque atteindre la grâce … le ciel.

Véritable éclat de jeunesse et ode à la force et à la vie, Sur le ciel nous fait assister à l’adresse d’un père à son fils. “Fiston cours sur le ciel, ne t’arrête pas ! Traite la vie comme une reine on ne la ramène pas.” Rythmé par une cadence hypnotique et répétitive, ce morceau nous fait vivre cette course précieuse, cette noble ascension au cœur d’un ciel majestueux. Ici, pas de peur de tomber, de sombrer au fond d’un gouffre. “Chaque fois que tu perdras pied, je serais derrière toi.” La nuit envahit la ville. Elle installe une atmosphère oscillant entre bande originale de film et univers pop et minimaliste rythmé par des samples puissants. “Pendant que tu portes la nuit seule, ta vie t’échappe des doigts”.

Le morceau éponyme de l’album Psaumes se déploie dans un atmosphère pesant où sévit une lenteur écrasante et oppressante. Une liturgie intemporelle qui semble conter le processus d’écriture d’un morceau :  “Le verbe qui se dérobe et les thèmes qui s’annulent, j’ai dû refaire le décor où les chansons ne parlent plus.” Du “lourd dans la rétine” où naissent les idées “au feu dans les paumes” où se jettent les mots, les versets se construisent et se déconstruisent jusqu’au psaume final.

Rallumez-les tente de ramener un peu de lumière au cœur de l’ombre de ce paysage futuriste tandis que L’opposé vient alterner ensuite entre nappes de voix et notes de synthé saturées, offrant un son brut et percutant. Chaque soir clôture cette virée nocturne, cet éprouvant voyage au sein d’une ville imaginaire dont les deux artistes se sont faits, l’espace de huit titres, les témoins. Donnant une véritable place à l’électro, cet office des laudes qui clôt notre nuit animée conclut avec beauté le parcours musical varié des deux artistes sur cet album. La lumière du jour commence à se distinguer. Une dernière lecture hypnotique de ce psaume final, avant de retrouver le silence de l’aube. “La vie s’éteint comme à chaque fois, la vie renaît comme à chaque fois”.

Ils présenteront sur scène ce projet original à Paris, au Nouveau Casino, le 2 juin et à l’Ubu à Rennes le 3 juin.

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