Jodorowsky’s Dune, documentaire en compétition lors de la quinzaine des réalisateurs en 2013 est enfin sorti en France. Réalisé par Frank Pavich, ce film retrace l’histoire d’un projet avorté par Hollywood , celui d’un des plus grands films que l’histoire du cinéma aurait pu connaître (oui oui, rien que ça). Je parle bien sûr du projet d’adaptation du roman Dune écrit par Frank Herbert, par Jodorowsky.
Frank Pavich nous propose avec ce documentaire de plonger dans la folie créatrice de Jodorowsky, les 90 minutes de film vont nous donner l’occasion de vivre la naissance et l’avancée de ce projet. Alejandro Jodorowsky, nous reçoit intimement dans son appartement et pose un bouquin sur la table, c’est dans ce bouquin que va se trouver l’intégralité du projet. Sous forme de storyboard détaillé de chaque plans, chaque mouvements de caméra, le film est là, sur papier.
Jodorowsy est un grand conteur, il nous raconte ses histoires, ses anecdotes sans qu’on en loupe une miette. Il va nous raconter comment il a réussi à réunir ces « warriors » autour de lui, afin de construire une « dream team » pour la réalisation de son film, composée entre autre de Michel Seydoux, Giraud, Pink Floyd, Orson Welles, Salvador Dali, Mick Jagger… Une équipe qui fait toujours rêver aujourd’hui.
Il nous fait part de son désir de réaliser le plus grand film de l’humanité, de vouloir profondément changer les attentes du spectateur, d’éveiller les consciences, de vouloir donner les effets du LSD sans la drogue. C’est le rêve d’une vie d’artiste qui est mis face à la caméra de Franck Pavich.
Tout comme ces « warriors » (guerriers) croyaient et étaient investi dans le projet Dune, nous sommes dans la même posture en temps que spectateur. Bien que nous sachions que le film n’a jamais été achevé, on ressent cette adrénaline, cette pulsion créatrice. On se laisse bercer par ces croquis animés qui illustres les propos de l’équipe et de Jodorowsky qui parlent avec grande nostalgie de ce projet. Nous subissons donc aussi cette déception lorsqu’on nous parle de la mort du projet, du retour à cette réalité d’un cinéma économique, lorsqu’il nous est dit qu’Hollywood refuse de financer les 5 millions manquants par peur de la folie du projet de Jodorowsky. Après s’être projeté dans cette pulsion créatrice pleine d’adrénaline, c’est un rude retour à la réalité.
On se trouve face à un film, émouvant, drôle qui nous permet d’accéder à des documents inédits qui donnent l’impression de toucher ce projet, d’y avoir contribué en y rendant hommage. Après visionnage il en résulte une impression de gâchis, on a envie de découvrir ce projet inachevé. On a l’impression d’être face à un projet cinématographique si énorme qu’il n’a pu se contraindre aux limites que lui posait le cinéma. Projet qui prend donc la forme d’une idée, d’une utopie cinématographique et va rayonner sur le cinéma en inspirant de nombreux films et cinéastes (Ridley Scott, Steven Spielberg, George Lucas, etc).
On retrouve dans ce documentaire cette folie pour laquelle on connait Jodorowsky avec Montagne Sacrée, Santa Sangre, avec qui il avait su captiver les spectateurs des midnight movies. Cette folie qui continue de passionner les jeunes cinéastes et cinéphiles qui se pressent d’aller voir ce documentaire.
Ce film est une déclaration d’amour à la création, à l’art, au cinéma. Pour Alejandro le but du cinéma est de créer une âme, et sans même aller jusqu’au bout de ce projet il a réussi à créer cette âme qui hante aujourd’hui le cinéma et les cinéphiles, rendant Dune immortel.