LITTÉRATURE

Mister Bojangles, dance !

Cette année, la rentrée littéraire de janvier était pleine de perles. En attendant Bojangles, premier roman écrit par le jeune Olivier Bourdeaut, est l’une d’entre elles. Un livre doux-amer que l’on vous conseille fortement de lire.

« Mr. Bojangles » est une chanson de Nina Simone, à la fois mélancolique et enchanteresse, triste et joyeuse. Elle raconte l’histoire d’un danseur hors-du-commun, qui dansait autrefois dans les bars de la Nouvelle-Orléans, en échange de quelques verres. Cet homme était triste, son chien était mort, mais il dansait à en perdre haleine. En attendant Bojangles, c’est la même chose : un livre qui nous fait rire et pleurer. En lisant l’histoire un peu loufoque du narrateur, on ne sait plus vraiment ce que l’on ressent. Il nous décrit, avec ses mots d’enfant, sa vie et celle de ses parents. Une vie de famille des plus atypiques : des fêtes dantesques jusqu’au bout de la nuit, un oiseau que l’on surnomme « Mademoiselle Superfétatoire », une mère qui change de prénom tous les jours. Et puis il y a cette chanson, « Mr Bojangles » sur laquelle les parents dansent constamment. Toujours la même chanson qui revient en leitmotiv tout le long du livre. Et dans le prolongement de cette musique, il y a une mélodie propre à ce roman, un rythme insufflé grâce aux mots, une magie que l’on découvre peu à peu. L’histoire est racontée avec beaucoup de naïveté et de douceur, mais surtout, elle est dite avec poésie. Entre les rimes qui émaillent la prose et les jolis jeux de mots, le lecteur se délecte d’une langue travaillée et belle.

UNSPECIFIED - CIRCA 1970: Photo of Nina Simone Photo by Michael Ochs Archives/Getty Images

Nina Simone Photo by Michael Ochs Archives/Getty Images

Au-delà des qualités d’écriture d’Olivier Bourdeaut, cet ouvrage est un récit sur la maladie mentale. Il évoque la folie en chacun de nous (plus en certains, que d’autres), qui, progressivement, grandit. Mais aussi clairement la folie psychiatrique, plus dangereuse et malsaine. Pourtant, le narrateur, de par sa voix d’enfant, ne porte aucun jugement. Le père, dans son journal, fait de même en avançant son propre point de vue. Il analyse simplement le lien ténu qui sépare les gens sensés des fous. Il constate que parfois la limite est mince. Il raconte son histoire, voilà tout.
Mais il ne faut pas se méprendre. En lisant ce livre, on est tenté de n’y voir que le thème de la folie. Au fil des pages, on découvre néanmoins la place primordiale que joue l’amour dans le récit. C’est d’abord l’amour d’un fils pour sa mère, qu’il admire et encense. Un amour incommensurable pour une femme hors-du-commun. C’est aussi la tendresse d’un père pour son fils qu’il tente de protéger à tout prix. Et surtout, l’amour d’un homme pour sa femme, à qui il donne tout, jusqu’au bout.

Ce premier roman est une réussite : on rit, on verse une larme et on savoure les mots, en attendant que Mr Bojangles daigne revenir.

Grande voyageuse (en devenir). Passionnée par la littérature et les langues étrangères. Dévoreuse de chocolat. Amoureuse éperdue de la vie et de la bonne bouffe. "Don't let the seeds stop you from enjoying the watermelon"

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