Le Festival de Ronquières s’est déroulé lors du week-end du 1er et 2 août sur le site du plan incliné de Ronquières, petit coin de modernité dans la campagne apaisante du brabant wallon. Pour sa quatrième édition, le festival de Ronquières a accueilli 32.000 festivaliers, un record d’affluence donc, qui a rappelé aux organisateurs à quel point leur événement était en passe de devenir l’un des piliers culturels de la saison estivale belge. Entre belles découvertes et artistes confirmés, voici tout ce qu’il fallait retenir de ce festival.
Samedi 1 août
Le festival s’est ouvert sous un grand soleil mais a vite été couvert par un nuage de psychédélisme sans nom. En effet, Gonzo, la formation totalement barrée du chanteur Saule a donné le ton en ce début de journée. La folie et l’humour contenus dans cette seule prestation ont convaincu les festivaliers les plus récalcitrants qu’ils étaient au bon endroit pour profiter d’une musique conviviale. Très vite, sur la scène opposée, Dario Mars & The Guillotines a enchaîné et a su transporter le public dans un univers rock beaucoup plus sombre, mais d’une puissance incontestable. Il y avait de l’énergie à revendre et une volonté de communiquer avec le public que l’on ne peut que saluer.
Toujours dans cet esprit d’éclectisme qui caractérise le festival, c’est l’Entourage, groupe de rap parisien, qui a enflammé la scène tribord. Le public était certes peu dense comparé à celui d’une tête d’affiche, mais chaque personne présente dans la foule a pu se régaler en hurlant d’une seule voix les couplets des jeunes rappeurs. On notera l’absence de Fonky Flav savamment dissimulée par une démonstration d’énergie des autres membres du collectif.
A bâbord cette fois, c’est Alice on the Roof qui a pris possession de la scène. Pour ceux qui ne la connaîtraient pas, Alice Dutoit est la gagnante de The Voice Belgique qui avait ému tout le plat pays avec son timbre de voix frêle et enfantin. Du haut de ses vingt ans, la jeune montoise a joué tout l’été dans l’ensemble les grands festivals de son pays. On remarque toujours une certaine fragilité dans sa présence scénique, mais tout le monde peut être certain qu’elle s’améliore sans cesse. Ses chansons mélancoliques menées par des percussions lancinantes ont fait le bonheur du public en ce milieu d’après-midi.
Changement de scène, changement d’ambiance, c’est Dotan cette fois qui prend place à tribord. Ce jeune chanteur, accompagné de musiciens avec qui il partage une osmose digne des plus beaux groupes, a captivé le public en les emmenant dans son univers tantôt magique, tantôt déroutant. Dotan, c’est une mélange entre la narration de Of Monsters and Men et la force de caractère de B∆STILLE. Dotan, c’est un voyage de cinquante minutes qui semble durer des heures et dont on ne veut jamais voir la fin. Outre son tube Home, l’album 7 Layers offre d’autres petits bijoux dont nous avons pu profiter en live, comme Let The River In ou Hungry.
Après cette parenthèse de douceur, nous avons dû faire face à notre première déception du week-end. La Smala, collectif de rap belge, avait certes un public très motivé, mais cela n’a rien retiré à la faiblesse des textes déclamés ni aux attitudes surjouées des membres du groupe. Heureusement, Balthazar a su raviver la flamme musicale que nous transportions avec nous. Le groupe flamand a réuni la première foule conséquente de la journée grâce à son talent et à son originalité stylistique. Les risques pris par le groupe dans le choix des instruments utilisés a été salué par la critique lors de la sortie de l’album Thin Walls, et nous ne pouvons que confirmer l’efficacité du violon électrique dans cette folie douce de guitares en tout genre. Balthazar n’a pas cessé de nous charmer, leur prestation étant sûrement l’une des meilleures du week-end de Ronquières.
La soirée a démarré au son de BRNS, groupe bruxellois qu’il est impossible de ne pas apprécier. Leur set list, composée d’anciens titres de leur EP Wounded et de leur premier album Patine, a réveillé tout le site du plan incliné. Les percussions endiablées, les jeux de guitare inédits et la voix incroyablement puissante du chanteur ont mis d’accord tous les festivaliers. BRNS a obtenu franc succès, tout ce qu’il y a de plus mérité.
A peine avons-nous pu profiter des derniers instants du concert de BRNS, que déjà la foule se déchaînait à tribord. Des milliers de personnes attendaient dans une fébrilité grandissante la venue de Charlie Winston. Le dandy anglais a conquis son public en restant lui-même, un homme simple et bien dans ses baskets. Sans prise de tête, il a joué avec son public tout en reprenant ses plus grands titres comme In Your Hands, Hobo, ou Dusty Men avec la participation exceptionnelle de Saule, présent sur le site du festival ce jour-là.
A la tombée de la nuit, Brigitte a conquis le coeur de Ronquières. Derrière une mise en scène ultra travaillée, les deux jeunes femmes aux discours féministes ont su envoûter l’assemblée en chantant leurs succès mais également quelques titres moins connus comme Jésus Sex Symbol ou Je veux un enfant. C’est dans une ambiance tamisée que s’est fini leur concert, immédiatement suivi par celui des têtes d’affiche du jour : dEUS. Le groupe de rock flamand dont on ne compte plus les années de carrière a commencé sur les chapeaux de roue avec le tube Slow, suivi de Via. Tout était là : les jeux de lumière qui avaient manqués aux concerts précédents de la journée, la foule littéralement en délire, l’expérience scénique des musiciens. Tout était maîtrisé au millimètre. Tout, sauf peut-être la panne de courant qui a stoppé net la prestation pendant de longues minutes. Mais les vrais fans sont restés jusqu’à la fin et ont pu profiter d’un Instant Street d’une valeur inestimable.
Dimanche 2 août
Le festival de Ronquières a vocation à être familial, et cet esprit s’est fortement ressenti dans la programmation du deuxième jour. Premier artiste, première surprise, GRANDGEORGE a entamé les festivités en petit comité. Il n’était pas nécessaire d’avoir une grande foule pour partager sa passion de la guitare et sa musique intimiste et joviale.
La grande surprise en ce dimanche a sans nul doute été Rouge United. Prenez le groupe Paramore, enlevez-y le côté commercial, ajoutez-y une vraie réflexion musicale et vous obtiendrez le renouveau de la scène rock. Les arrangements sont pensés pour êtres innovants, les dissonances audacieuses font du bien aux oreilles fatiguées d’entendre toujours la même chose, et pour ne rien retirer au charme de leur musique, Rouge United est mené par une chanteuse survitaminée et envoûtante qui a volé le cœur de toute la foule.
Avec quelques a priori, nous avons pris place au concert d’Antoine Chance, petit nouveau de la scène francophone. Nous étions sceptiques, mais quand le chanteur a prouvé qu’il pouvait déplacer les foules et enflammer la scène à la seule aide de sa petite guitare, nous avons compris qu’il avait mérité son succès. Accompagné de son groupe – dont on connaissait déjà Geoffrey Hautvas pour être le bassiste de Vismets – il a bien entendu chanté son célèbre Fou ou encore Parader en Enfer, ce qui a ravi le public.
Au revoir les artistes belges et bonjour les chanteurs français, plus particulièrement bordelais. Talisco est un artiste qui ne se prend absolument pas la tête, qui joue une musique agréable et chaleureuse, à mi chemin entre la pop et la folk. Son style est libre, fougueux. Même s’il déteste définir le style qui prédomine dans ses compositions, nous pouvons vous assurer que Talisco rentre dans le domaine de définition de la bonne humeur et du talent à l’état pur.
L’OVNI du jour était sans aucun doute Kadebostany. Outre le nom imprononçable du groupe, nous avons également été surpris par les costumes bariolés et les personnages mis en scène lors du concert. Il y avait une vraie volonté de raconter dans cette prestation et il faut saluer les efforts du groupe pour continuer à jouer sans tomber dans l’excentricité. Seul petit bémol, la chanteuse du groupe serait sans doute beaucoup plus à l’aise si elle forçait un peu moins sur sa voix, et si elle nous laissait profiter un peu plus de son si joli timbre naturel.
Great Mountain Fire est une des plus grandes fiertés de la scène bruxelloise, ils ont donc provoqué une joie unanime en jouant ce dimanche 2 août. Leur rock, parfois alternatif, parfois psychédélique, ne nécessite pas de grandes analyses. La musique de GMF s’écoute avant tout avec le cœur et avec les tripes. Les basses vous prennent au ventre, les voix célestes atteignent votre âme, tout est fait pour parler à votre inconscient. A la frontière du réel, nous avons pu saluer la prestation fantastique de ce groupe qui aspire à toujours plus de succès.
En début de soirée, ce sont les Frero Delavega qui ont pris possession de la scène tribord. On ne peut pas nier qu’ils ont réuni un nombre incalculable de fans. On ne peut pas nier non plus que leur présence sur scène était remarquable. En revanche, on peut largement critiquer leur attitude en dehors de la scène. Ils étaient certes très charmants une guitare à la main, mais c’est bien là le seul moment où ils l’ont été.
Heureusement, pour relever le niveau, Jacco Gardner a régalé Ronquières. Alors que la nuit tombait, le groupe de rock néerlandais a partagé avec son public une musique accessible à tous, anti prise de tête et touchante. Jack Gardner était une valeur sûre de cette journée en matière de maîtrise. Bravo à eux.
La deuxième déception de la soirée fut sans nul doute Kyo. Des milliers de festivaliers ont dû subir des problèmes techniques qui ont entraîné avec eux la justesse du chanteur. Pendant plusieurs chansons, faute de retour, Benoît a eu beaucoup de mal à chanter juste. Excédés, les membres du groupe ont perdu leur énergie et leur fougue qui les caractérisent habituellement en concert. Heureusement pour eux, le public était là pour chanter du début à la fin chacun de leurs titres.
Autre artiste français, autre ambiance. Christophe Willem, le chouchou des télé-crochets a fait l’honneur de sa présence. Durant un concert de plus d’une heure, il nous a présenté son nouvel album, teinté d’électro et de chanson française qui a visiblement conquis la foule. Les prouesses vocales accomplies par l’artiste sont incontestables. Il est sûrement celui qui avait la plus grande maîtrise de sa voix sur tous les concerts que nous avons pu voir pendant ce week-end. Il est également celui qui a le plus sautillé et gigoté pendant sa prestation. Fidèle à lui-même, il a été honnête et drôle avec son public, il a créé un vrai lien avec ses fans qui ont été très enchantés par sa prestation.
Le festival s’est clôturé sur le concert explosif de Shaka Ponk. Notre appréciation personnelle nous fait dire qu’il ne s’agissait que de bruit et de jeux de lumière aveuglant. Mais nous devons nous incliner face à la foule qu’a réuni le groupe pendant une heure et demi de concert. Les fans étaient présents, c’est là l’essentiel pour un groupe.
En bref, on peut dire que cette édition 2015 du festival de Ronquières a été haute en couleurs et riche en découvertes. Tant l’accueil de la presse que le traitement des festivaliers donnent envie d’y retourner aussi tôt que possible. Alors à l’année prochaine Ronquières ?