LITTÉRATURE

Dossier : Biographies

Pourquoi lire des biographies ?

« Les vies des grandes femmes et des grands hommes sont toujours inspirantes. On ne perd, à mes yeux, jamais son temps à lire des biographies, dont on sort toujours grandi. Les erreurs et les succès des humains avant nous peuvent nous guider dans nos propres existences, et la biographie reste un moyen ludique pour se plonger dans une époque bien précise, à travers les yeux d’un témoin du temps. » Basile Imbert

 

« Lire des biographies n’a pas pour seul effet de vous donner cette agréable sensation de connaître intimement un homme passé à l’Histoire. Une autre vertu de cette lecture est l’explication de ses actes, ce que nous pourrions appeler le « pourquoi de la postérité ». Nulle œuvre, nulle décision, nulle trace n’est détachable d’une expérience vécue ou d’un contexte ; et personne dans son vivant ou dans sa mort ne se bâtit seul, éloigné du regard de l’autre ; ainsi lire des biographies n’est pas se contenter de la vision d’un seul homme, mais c’est plonger dans un monde qui bien souvent n’est pas si éloigné du nôtre. Et de là, la biographie peut devenir une source d’inspiration pour notre propre construction ou notre propre renouvellement. » Loïc Pierrot

 

Quelques biographies que nous vous recommandons

 

Marie Stuart, S. Zweig

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Le Livre de poche

Attention, explosion de passions au détour de votre lecture ! En effet, dans l’art exigeant de la biographie, Zweig reste un maître incontesté, semant toujours des leçons de vie au fil de ses chapitres écrits dans une langue parfaite, sans sombrer dans la démarche moralisatrice ringarde. Ce grand écrivain et biographe a ainsi su capter et rendre plaisant à lire le destin houleux de Marie Stuart, aux intrigues politiques et royales très proches d’un Game of Thrones bien réel. Reine d’Écosse seulement six jours après avoir ouvert les yeux, exilée à la cour du Louvre où elle séduit et épouse le Roi de France, la vie de la catholique Marie Stuart prend un tournant lorsqu’elle retourne dans sa terre natale à la mort précoce de ce dernier, devenant ainsi la rivale de la protestante Elizabeth I, avec qui elle se dispute la couronne d’Angleterre. Zweig rend à merveille l’époque de tensions entre les blocs catholiques et protestants, sans sombrer dans le livre d’histoire, et les personnalités complexes de ces temps fascinants défilent pour notre plus grand plaisir, dans une superbe traduction d’un Allemand exquis. Nous devrions lire le roman de cette vie de femme, avec ses faiblesses et ses qualités, qui aura connu la liberté et la captivité, le pouvoir comme la défaite, l’amour comme le désespoir total avant de finir jugée et condamnée à mort, tous les dix ans, pour en saisir la grandeur en grandissant à notre tour.

 

Basile Imbert

 

François Mitterrand, Michel Winock

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NRF Gallimard

 

S’il est une vie qui ne laisse personne indifférent dans notre paysage politique, c’est bien celle du premier président socialiste de la Cinquième République, François Mitterrand, qui régna sur la France de 1981 à 1995, tantôt porteur d’espoirs comme de déceptions, tantôt désabusé par les Français puis réélu triomphalement. Viscéralement attaché aux valeurs de la droite de ses racines paysannes, « l’homme une rose à la main », que chante d’une voix sensuelle, militante et hallucinée Barbara, a su rassembler, au fil d’un travail aussi laborieux qu’ambitieux débuté au sortir de la guerre, dans le plus beau plan de carrière de la vie politique française, la gauche jusqu’à sa victoire, patiemment., tandis que défilaient les décennies d’opposition et de doutes. Au passé sulfureux dans les milieux d’extrême-droite et royalistes des années trente, jeune évadé de guerre à la fois rallié à Vichy puis résistant, François Mitterrand ministre, n’hésite pas à signer les condamnations à la guillotine durant la guerre d’Algérie, avant de devenir fervent défenseur de l’abolition de la peine de mort qu’il proscrit une fois portée à la présidence. Et quelle présidence ! Celle qui mènera toute une génération nouvelle au pouvoir, donnant un nouveau souffle nécessaire au pays, avec des réformes sociales ambitieuses. Avec également des divulgations romanesques dans la presse d’une fille cachée tendrement aimée et celle d’un homme malade torturé par la douleur au crépuscule stoïque d’une vie bien chargée ! Dans cette biographie sans doute scolaire mais parfaitement équilibrée et réussie, Michel Winock, également connu pour son Flaubert, atteint ce qui semble impossible : rassembler le puzzle d’un homme éparpillé en milliers de pièces et de contradictions qui n’en sont pas forcément, dans un ensemble harmonieux et cohérent.

 

Basile Imbert

 

Nietzsche, S.Zweig

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Stock

« Seul l’extraordinaire nous élargit l’esprit, seul le frisson devant des forces nouvelles accroît notre sensibilité. C’est pourquoi l’exceptionnel est toujours la mesure de toute grandeur. Et l’élément créateur reste, même dans ses créations les plus troublantes et les plus dangereuses, valeur au-dessus de toutes les valeurs, esprit au-dessus de nos esprits ». Ce constat formidable nous vient de Stefan Zweig, dans son livre Le Combat avec le démon : Kleist, Hölderlin, Nietzsche. Cet ouvrage, publié en 1925, a été de nos jours tronçonné ; ainsi peut-on désormais se procurer uniquement la partie consacrée à Nietzsche, publiée aux éditions Stock. Ce portrait du philosophe apatride est un des bijoux de Zweig – d’aucuns diront même que c’est sa meilleure biographie. A travers son style somptueux il dresse en onze chapitres le tableau de Nietzsche, un tableau à deux aspects. En effet, s’il est question de la vie du penseur, l’objectif est également d’expliquer sa pensée ou du moins d’en tracer les lignes directrices. Sous la plume de Zweig, c’est un Nietzsche cherchant sans cesse l’accomplissement de l’Homme, jusqu’à en sacrifier ses amis et sa santé précaire, qui se montre au lecteur. On comprend alors toute la dimension de l’idée nietzschéenne, sorte de philosophie du corps et de médecine de l’âme. Exalté, Stefan Zweig rend accessible l’homme qui prétendit avoir « coupé l’histoire en deux ». Un classique à lire impérativement.

 

Loïc Pierrot

 

Lincoln, l’homme qui sauva les États-Unis, Bernard Vincent

 

            Abraham Lincoln est l’un de ces noms qui parlent d’eux-même. Self made man devenu au fil d’un parcours d’autodidacte président des États-Unis d’Amérique, l’homme a su conduire son pays en pleine guerre civile avec un charisme et un sens des responsabilités exemplaire, jusqu’à son assassinat qui a fait de lui un martyr de l’imaginaire américain. La biographie de Bernard Vincent brosse un portrait humain au-delà de l’icône, tout en insistant sur la formation et l’ascension politique du bûcheron devenu président, sans jamais oublier d’expliciter le contexte souvent trouble de cette Amérique prête à se déchirer autour de la question de l’esclavage. Abraham Lincoln apparaît ici comme un homme déterminé, en quête du perpétuel consensus, mais souvent en proie aux difficultés de sa vie familiale et amoureuse marquée par d’éprouvantes tragédies personnelles. Le portrait de Lincoln par Bernard Vincent, d’une écriture très limpide, permet au lecteur de gagner un profil clair et cohérent du président assassiné, l’une de ces clés indispensables pour mieux comprendre la civilisation américaine.

 

Basile Imbert

 

Étudiant en classes préparatoires littéraires. Féru d'Histoire et de Littérature. Amoureux de la poésie. Intéressé par la Philosophie et les Arts.

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