Paris. 2008. Un de ces soirs froids et pluvieux. Deux amis, Travis Kalanick et Garett Camp cherchent désespérément un taxi. Il n’en viendra pas. De là, est née l’idée de Uber.
Uber, c’est une société qui met en relation des clients avec des conducteurs privés via des applications pour smartphones. D’abord florissante aux Etats-Unis, la start-up californienne cherche ensuite à exporter ses services ailleurs dans le monde. En 2011, son cofondateur et PDG Travis Kalanick choisit la France, ce même pays où, quelques années plus tôt, il avait dû poursuivre son chemin dans l’hiver parisien.
Un pari risqué lorsque l’on connaît la législation du travail en vigueur. Après quelques années de coexistence plus ou moins pacifique avec les cabs parisiens, la société délaisse son service haut de gamme et uberPOP arrive. Des particuliers sans licence, électriciens ou vendeurs de légumes, assurent désormais le service à bas prix avec leur propre véhicule. La plateforme uberPOP les met en contact avec des clients potentiels qui cherchent à être transportés. Un simple clic sur son smartphone permet de faire venir un VTC – voiture de tourisme avec chauffeur – de n’importe où et n’importe quand. En prime, des sucreries, une bouteille d’eau et le choix du programme radio qui accompagnera votre voyage. Un concept qui séduit beaucoup les jeunes, qui s’offusquent des tarifs pratiqués par les taxis « conventionnels ». Dans une lettre ouverte destinée aux chauffeurs de taxis parisiens, un internaute évoque avec virulence son « Bercy – Trocadéro » (soit un trajet d’une vingtaine de minutes) payé 70€ en 2009, et les incivilités qui vont de pair. Uber l’emporte.
Guerre sur les routes
Puis, la guerre éclate. Les taxis traditionnels accusent la compagnie de tous les maux : concurrence déloyale, travail au noir et donc règles fiscales bafouées, manque de formation des chauffeurs et absence d’assurance professionnelle. Il faut dire que le prix d’une plaque de taxi avoisine les 250.000€, une somme dont les conducteurs privés de VTC n’ont pas à supporter le poids. Uber France s’est défendu, s’attaquant à un pays qui n’accepte pas « l’ubérisation » de la société, une nouvelle économie basée sur des petits boulots s’adaptant à l’essor des smartphones. Pour son directeur général Thibaud Simphal, Uber ce sont des emplois créés.
Les taxis parisiens ne l’ont toutefois pas entendu de cette oreille et ont lancé leur opération escargot. Le périphérique bloqué, s’ est alors ensuivi une grève émaillée par des débordements en tout genre. Les taxis réclamaient le remboursement de leur licence ou le respect de la loi Thévenoud. Votée en 2014, elle impose à tous les chauffeurs de posséder une licence professionnelle et interdit aux VTC d’utiliser des applications de géolocalisation pour permettre aux clients de les repérer. Uber avait toutefois été jusqu’à contester la légalité de certains points devant le Conseil constitutionnel, ce qui permettait à uberPOP de subsister provisoirement.
Après l’appel empreint de courtoisie de Courtney Love, la veuve de Kurt Cobain en voyage dans la capitale, qui a poliment tweeté à François Hollande de « ramener son cul » à l’aéroport où elle était victime d’une rixe entre taxis et Uber, le Président a arbitré et s’est prononcé en faveur d’une dissolution du service uberPOP, qu’il a déclaré illégal. Celle-ci a pris effet le 3 juillet. L’aventure hexagonale de uberPOP fut de courte durée.