CINÉMA

31e Reflets du cinéma ibérique et latino-américain – Du soleil au mois de mars

Les singes de la sagesse vous conseilleraient de vous couvrir les yeux, la bouche et les oreilles. Celui qui ne voit, n’entend et ne goûte pas le monde, il ne peut lui arriver que du bien. Il peut atteindre la sagesse. Le festival des 31e Reflets du cinéma ibérique et latino-américain prend cette idée et lui fait un croche-pattes majestueux : ces 15 jours furent une véritable expérience sensorielle, entre voyage et cinéma.

Les yeux. La foule se précipite aux portes du Zola, petit cinéma de Villeurbanne. La salle – la seule et l’unique – est pleine à craquer. Après avoir remercié longuement les partenaires, au risque de faire râler quelques spectateurs, Conducta d’Ernesto Daranas est lancé sur la toile blanche et nous emporte à la Havane. Nous suivons l’histoire de Chala, un gamin dont l’innocence est proche de zéro. Sa mère est alcoolique, il ne connaît pas son père. Il élève des chiens au combat, gère une volière, se bat et drague Yeni, la meilleure élève de sa classe. Ces gestes singuliers caractéristiques de l’enfance, il les a déjà oubliés. Au-delà d’une image aux teintes parfois morbides et d’un discours politique fort, Conducta nous parle d’amour. Il nous parle de l’amour profond d’une institutrice pour ses élèves et de celui qui anime le regard de Chala chaque jour. Les personnages sont intensément bruts, dans tous les sens du terme. Et la captation de leurs interprétations est brillante. Nos pupilles sont satisfaites.

La bouche. Dans le public, on discute avec ses voisins et on fait découvrir le Calimocho – un cocktail étonnant composé de vin rouge et de coca-cola – à l’équipe de bénévoles. A la suite du générique et des applaudissements, ça se bouscule dans le hall. Après un film de cette trempe, la pensée « pourvu qu’ils aient prévu des cigares » nous traverse l’esprit. A défaut de crapoter tel un parrain, olives et rhum-coca nous attendent gentiment pour que le retour à la réalité ne soit pas trop difficile. Avant et après, nous voilà projeté mentalement en pleine terrasse andalouse, à la tombée de la nuit, tapas à l’appui. Nos papilles sont satisfaites.

Les oreilles. Pour clore le festival, l’organisation nous invite à une « fiesta 100 % latino » au Transbordeur, salle de concert lyonnaise. Concert et initiation salsa, batucada, djs, show dance, il y en a pour tous les goûts. Encore faut-il apprécier ces sons et ces percussions sans le soleil qui vous caresse la peau… Nos oreilles ne sont pas satisfaites.

La douleur de reprendre son manteau pour aller affronter l’humidité lyonnaise montre cependant que le festival a réussi son coup : embarquer nos sens au soleil, en plein mois de mars.

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