Un jour d’octobre, mes professeurs nous emmenèrent à Paris, mes camarades et moi. La capitale, magnifique, s’offrait à nous. Le fort du Mont-Valérien aussi. C’est là que moururent les hommes que Louis Aragon reconnaissait comme ceux qui « criaient la France en s’abattant ». Hier on entendait des cris que les fusils arrachaient aux enfants de l’ombre. Aujourd’hui, le silence règne. Sur le sol de la clairière, les feuilles mortes ont succédé aux résistants. Ce poème, écrit dans un tourbillon d’émotion, est un modeste hommage. Aux mille morts et à leurs cinq poteaux.
Qu’à jamais retentissent ces feux disparus,
Glorieuse souffrance de l’humanité !
Que ces bastions infâmes et ces sanglants talus
Portent toujours le sceau de la férocité.
Qu’à jamais retentissent ces feux disparus !Fusillés ! Vous étiez des hommes et des héros !
Vos visages bandés, vos derniers soupirs veules
Vous donnèrent un silence ému comme tombeau
Et trois couleurs pures pour éternel linceul !
Fusillés ! Vous étiez des hommes et des héros !Le soleil pour vous seuls a versé tout son sang !
Car vous ne goûterez plus dans l’exil de l’âme
A l’ivresse du monde et aux rires des enfants,
A l’orgueil des idées et aux baisers des femmes !
Le soleil pour vous seuls a versé tout son sang !