SOCIÉTÉ

Tradition religieuse et profane

Noël… Noël. Qui ne rêve pas, ne serait-ce qu’un peu pendant Noël ? Les illuminations, les cadeaux, le sourire des enfants. Que l’on soit croyant ou non, nul ne peut contester qu’il y a une certaine « magie » qui se dégage de Noël. Mais dans nos pays occidentaux sécularisés on en oublierait presque que Noël est avant tout, au-delà d’une fête, une tradition religieuse qui a pour objet, chez les chrétiens, de célébrer la naissance de Jésus. Cette tradition est plus ou moins ancrée dans les mœurs à travers le monde. Comment fête-t-on Noël dans les endroits du globe où le christianisme est plus présent ? Où ne fête-t-on pas Noël ? Quelles sont les alternatives à Noël pour les autres religions ? Chaque pays possède des traditions spécifiques. Tour d’horizon…

Une tradition religieuse

Noël n’est pas fêté par les chrétiens au départ. Au IVe siècle, la date du 25 décembre a été choisie comme date pour la fête de Noël, principalement dans le but de la substituer aux fêtes païennes qui étaient d’usage à l’époque et qui célébraient le solstice d’hiver. Avant l’apparition du christianisme, cette période de l’année était déjà sacrée. Elle regroupait beaucoup de croyances païennes relatives à la fertilité, la maternité, la procréation et l’astronomie. Elle donnait donc lieu à de nombreuses manifestations. Ces traditions antiques ont de nombreux points de similitude avec la fête chrétienne.

Désormais, Noël est fêté par les pays historiquement d’origine et de culture chrétienne même si ceux-ci sont pour la plupart sécularisés ou de plus en plus laïcisés. La religion occupant une place de moins en moins importante dans les sociétés occidentales, Noël est fêté, que l’on soit athée, agnostique, croyant pratiquant ou non-pratiquant. L’aspect religieux de Noël a progressivement été effacé et dominé par l’aspect commercial, si bien que l’on pourrait d’abord définir cette fête comme une tradition de partage, synonyme de bon(s) repas, d’illuminations féeriques, de Père Noël généreux… Paradoxalement, la célébration de la naissance de Jésus à l’origine de la création de cette fête, est de moins en moins importante. Elle l’est certes, pour les croyants, mais de nombreux non-croyants fêtent Noël sans y accorder aucune importance religieuse. C’est une tradition joyeuse de partage, point. Noël serait-il alors devenu une fête laïque ?

Les pays issus d’une culture chrétienne 

Les premiers chrétiens ne fêtaient pas la naissance de Jésus. Il aura fallu attendre plus de trois siècles et demi pour que Noël devienne une fête religieuse officielle et encore deux siècles pour que cette fête soit généralisée et, de plus en plus, « déchristianisée ». Certes, les messes de Noël, la messe de minuit et les traditions dominicales durant cette période ont toujours de l’importance au sein des pays issus d’une culture chrétienne, mais cela est surtout vrai, dans les pays occidentaux, pour les anciennes générations. Bien que le jour du 25 décembre soit férié dans la plupart de ces pays, il est de plus en plus déconnecté de l’interprétation religieuse. Noël est donc un rituel universel où les familles se retrouvent et célèbrent la fête ensemble autour d’un certain rituel : grand repas, décorations, sapin, cadeaux… Cette tournure mercantile que prend la fête dans les pays chrétiens, où Noël est avant toute chose la célébration de la famille et des enfants, a pu déplaire aux croyants. En effet, le 23 décembre 1951 une effigie représentant le Père Noël a notamment été brûlée sur le parvis de la cathédrale de Dijon par des paroissiens insatisfaits de la tournure que prenait la tradition.

Certains pays issus de cette culture sont donc plus où moins attachés à la religion lorsqu’il s’agit de fêter Noël. En bref, selon la situation géographique dans laquelle on se trouve, Noël n’est pas fêté de la même façon. Chacun possède ses propres traditions. En Allemagne par exemple, pays d’où provient la tradition de 400 ans du sapin de Noël, c’est Saint Nicolas qui apporte les cadeaux le jour du 6 décembre tandis que c’est le Père Noël qui a normalement cette tâche dans le sud du pays. Comme dans de nombreux pays occidentaux comme le Canada, la France, l’Angleterre, ou encore les Etats-Unis, la gastronomie de Noël a une grande importance. On retrouve alors la fameuse bûche glacée au dessert en France, tandis qu’on préfère déguster un plum-pudding de l’autre côté de la Manche. Les américains et les british aiment décorer leurs maisons des cartes de vœux qu’ils ont reçu de proches durant le mois de décembre, et remplir de grosses chaussettes de confiseries. En France, les marchés de Noël qui mettent en valeur l’artisanat parsèment le territoire. Bien sûr, les vitrines des grandes surfaces des pays occidentaux s‘embellissent et brillent de mille feux comme pour célébrer avant tout les achats de Noël, plus que la tradition. En Belgique comme en Hollande, c’est le 6 décembre qu’accoste le « Père Noël » pour apporter les cadeaux aux enfants sages.

En Irlande, les fêtes de Noël commencent 12 jours avant Noël. On appelle cette période “Little Christmas”, c’est-à-dire “petit Noël”. Selon la tradition, une bougie est déposée sur le rebord de la fenêtre le jour de Noël. Avant de partir pour l’église, on laisse un verre de whisky pour le Père Noël et des carottes pour les rennes. De nombreux Irlandais assistent à des courses de chevaux et font des paris, tandis que d’autres chantent dans les rues.

Tous les pays n’ont pas forcément de Père Noël. En Grèce, Noël est moins important que les fêtes de Pâques. C’est Saint Basile qui apporte des cadeaux aux enfants le 1er janvier.

Les pays du sud de l’Europe sont encore très attachés à leur religion. La fête de Noël est donc célébrée de façon plus traditionnelle. En Italie, elle dure 3 jours, du 24 au 26 décembre. Le pays est à l’origine de la fameuse crèche que l’on retrouve dans la plupart des marchés de Noël d’Europe. Comme reproduction de l’étable, elle est apparue en Italie dans les églises au XVe siècle. Selon la tradition, les familles italiennes l’installe neuf jours avant la naissance du Christ. Au Portugal, la veille de Noël est fériée, tous assistent à la messe de minuit. Au moment où sonnent les douze coups de minuit, tous les fidèles se dirigent à l’église locale pour y célébrer la Missa do Galo, littéralement “la messe du coq”. Selon les croyances, un coq aurait chanté le matin du 25 décembre, célébrant à sa façon la naissance de Jésus Christ. Cette messe existe également en Espagne. On appelle le jour du 24 décembre le jour de la « Noche Buena », qui est très important. Le jour du 25 décembre est moins important que le jour de la « Noche Buena ».  Cependant ni la veille, ni le lendemain de Noël ne sont fériés en Espagne. De la même façon, les pays d’Amérique latine sont très attachés à la fête de Noël qui continue d’avoir un lien très fort avec la religion.

Si l’on jette un œil à l’est de l’Europe, en Autriche par exemple, Noël est la fête familiale la plus importante de l’année. La fête débute le 1er décembre avec la couronne de l’Avent. Pendant tout le mois de décembre, les alentours de l’Hôtel de Ville de Vienne, la capitale, sont en fête. En Russie, l’Église étant orthodoxe, on fête la naissance de Jésus, en même temps que le baptême de Jésus, le 6 et 7 janvier. En 1582 le pape Grégoire XIII a produit la réforme du calendrier qu’on a nommé “grégorien”. Mais les orthodoxes ont refusé de l’accepter. Ainsi, en Russie on fête Noël d’après le vieux calendrier julien, et c’est dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier que les enfants reçoivent leurs cadeaux.

En Norvège et en Suède, le mot « jul » est devenu le nom de la fête chrétienne de Noël. Pour le dîner de Noël, on laisse une place vide à la table du repas pour les âmes des défunts de la famille. Une fois le repas savouré, l’arbre de Noël est allumé. Puis on se lève, tout le monde se donne la main. Toute la famille danse et chante des chansons de Noël et on tourne autour du sapin.

Les pays à minorités chrétiennes

En Chine, la population chrétienne et estimée à 4 %. Celle-ci fêtera donc très certainement Noël tandis qu’une majorité de chinois ne célébrera pas le 25 décembre. Cependant, avec l’occidentalisation de la Chine on voit tout de même émerger des vitrines de Noël décorées comme dans la plupart des pays occidentaux chrétiens. Ce rappel culturel est plus voué à promouvoir la marque Coca Cola et l’hyper consommation que la tradition chrétienne.

Les minorités chrétiennes dans les pays à majorité musulmane assistent à des messes de Noël. L’aspect commercial est bien moins ancré qu’en Occident. Les chrétiens doivent parfois faire face, dans ces pays, à des attentats terroristes. En Irak par exemple, le gouvernement a montré une volonté de tenir compte des minorités. Le chef du gouvernement Nouri al Maliki a en effet fait de Noël un jour férié. Mais cela n’a pas empêché, en 2011, que les bombes retentissent pendant ce jour Saint.

Il n’y a pas réellement d’équivalent de Noël chez les musulmans, bien que ceux-ci célèbrent non pas la naissance de Jésus mais célèbrent le prophète Mahommet. L’équivalent de Noël serait alors l’Aïd, qui donne également lieu à une tradition d’offrir des cadeaux aux enfants.

Les juifs ne fêtent pas Noël mais célèbrent le même mois la fête des Lumières : Hanouka. Pendant Hanouka chacun allume une bougie d’un chandelier à huit branches, chaque soir de la semaine. Cette coutume commémore la reconquête d’Israël au IIe siècle avant Jésus-Christ, dirigée à l’époque par un roi gréco-syrien : Antochius. Le miracle de la fiole d’huile retrouvée dans les débris du temple de Jérusalem et qui aurait permis prodigieusement d’éclairer pendant huit jours est célébré durant cette période.

Les hindouistes et les bouddhistes ont également des « alternatives » à Noël. Le 28 octobre, les hindouistes célèbrent Diwali, la fête des Lumières qui trouve son origine dans la mythologie hindoue. La fête célèbre la victoire de Krishna sur le démon-roi Narakâsura, qui, à force de yoga, était devenu tout puissant. Cette tradition est alors l’occasion de décorer les maisons et de s’offrir des cadeaux, tout comme durant Noël. Chez les bouddhistes, la commémoration la plus importante est celle de la naissance, éveil et mort de Bouddha, durant la pleine lune de mai : c’est le Vesak. C’est l’occasion de consolider les rapports entre bouddhistes et de faire régner une certaine harmonie. En Inde où les chrétiens sont de plus en plus nombreux , et bien que le pays soit traditionnellement hindouistes, on fête de plus en plus Noël à la manière occidentale.

Chaque religion possède en quelque sorte sa fête de l’amour du partage et du rassemblement. Mais de plus en plus, et contrairement à d’autre religions, la fête chrétienne de Noël est prise dans l’engrenage de la sécularisation occidentale qui mène à un effacement progressif de la religion. Noël en serait alors devenu une fête laïque dans certains pays où l’athéisme est de plus en plus présent. Cependant, il ne faut pas faire preuve d’ethnocentrisme et rappeler que dans d’autres régions du monde où la religion est encore très ancrée, la célébration de la naissance de Jésus est toujours indispensable. Le capitalisme à l’occidental qui érige en reine la société de consommation n’a donc semble-t-il pas touché toutes les régions du globe.

21 ans - Etudiante à Sciences Po Strasbourg

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