SOCIÉTÉ

La traque aux terroristes : les “djihadwatchers”

Comme on le remarque actuellement dans les médias, l’attrait pour le djihad est en expansion en France. De plus en plus sont mis en avant des cas de personnes isolées qui ont pris le départ pour le Moyen-Orient ou qui sont sur le point de le faire, dans le but de combattre au nom du djihad. Comment contrôler ces dérives ? Internet est un bon moyen pour les djihadistes de repérer les personnes susceptibles de les rejoindre. Mais la toile est tellement vaste qu’il est difficile de détecter toutes les déviances. C’est le travail des djihadwatchers, qui complètent le travail des renseignements généraux et tentent de contribuer à éviter des actes terroristes.

 Différents profils

Les djihadwatchers peuvent avoir différents profils : bloggeurs, journalistes, anonymes. Ils peuvent quasiment être n’importe où et n’importe qui. S’il était plus difficile avant de traquer les terroristes sur le net, c’est désormais une chose très simple. Tout le monde ou presque peut vérifier l’activité des groupes djihadistes. Leur visibilité sur la toile est très importante, comme on a pu le remarquer ces derniers mois avec la forte représentation de l’Etat islamique sur les réseaux sociaux et la transmission de vidéos de propagande et d’exécutions. Les djihadistes n’hésitent pas à utiliser le web pour faire part de leurs activités et recruter des membres. C’est pourquoi parmi les djihadwatchers il est possible de trouver des amateurs.

 Une situation urgente

Avec l’ascension de l’Etat islamique et l’ampleur que prend le recrutement de combattants djihadistes, les renseignements ont été quelque peu dépassés. Des citoyens lambdas, motivés pour ce rôle, ont alors pris le relais afin de compléter l’action des services secrets. Le djihad gangrène le monde de façon alarmante. Les terroristes arrivent à convaincre des personnes isolées,  bien souvent psychologiquement faibles et qui se radicalisent via internet en lisant des sites de propagande islamique ou amadoués à distance grâce à des discussions par webcam avec des combattants sur le terrain. Le problème de l’anticipation des actes terroristes est crucial et requiert donc toujours plus de vigilance.

En France, avec le développement de la visibilité des terroristes sur le net, le ministre de l’Intérieur parle de « terrorisme en libre accès ». Début octobre, le gouvernement a dès lors annoncé le renforcement des moyens financiers et humains pour les renseignements. En leur sein, le nombre d’employés devrait augmenter. Les djihadwatchers sont plus que nécessaires pour contrer cette nouvelle forme de terrorisme.

Comment les repérer ?

Les services policiers travaillent avec internet : il y a des sites, des blogs où des gens susceptibles de s’être radicalisés peuvent se trouver, laisser des commentaires suspicieux. Il est aussi possible de faire des recherches dans la communauté arabo-musulmane. Des croyants dénoncent les islamistes pour se débarrasser des radicaux qu’ils ne cautionnent pas. La surveillance des loups solitaires dépend aussi de leur niveau de radicalisation. On accroît les moyens lorsqu’un individu montre clairement des signes de radicalisation. Cependant, cela peut parfois être insuffisant puisque les individus radicalisés peuvent être imprévisibles et insoupçonnables. Le manque d’intégration à la société d’une personne, son caractère déviant peuvent être des indices pour le djihadwatcher. Le changement d’habitude d’un individu qui se met à étudier de près le Coran ou à surfer sur des sites web islamistes radicaux peuvent également constituer des indices. A ce titre, la polémique à propos de la NSA (National Security Agency) qui traquait avec vigueur les citoyens américains pour prévenir d’éventuels actes terroristes, montre la volonté de détecter toute forme d’indice.

Une actualité brûlante

Le nombre de ressortissants français ou étrangers résidant en France qui seraient impliqués dans des opérations en Syrie ou en Irak serait aujourd’hui estimé par le ministère de l’Intérieur à 930. Bernard Cazeneuve affirme d’ailleurs à ce sujet dans le JDD que « trois cent cinquante sont sur place, dont 60 femmes. Environ 180 sont repartis de Syrie et 170 sont en transit vers la zone. 230 ont exprimé des velléités de départ. À ce total de 930 s’ajoutent 36 personnes décédées là-bas ».

Dernièrement, une française, Soukaïna, a réussi à déjouer les services de renseignements et est partie combattre le djihad en utilisant l’identité de quelqu’un d’autre. L’impuissance des services secrets est flagrante. Ce sont des cas isolés, comme celui de Mohamed Merah, difficiles à détecter. Souvent « en quête d’identité et de reconnaissance  », ces individus sont imprévisibles.

Le départ au djihad de cas individuels est désormais un phénomène de société que l’on ne peut plus nier, et dont on ne peut réellement se surprendre. La présence des terroristes sur les réseaux sociaux est forte et influence beaucoup des individus mal intégrés ou à la recherche d’un autre avenir qu’ils semblent ne pas voir dans leur pays. La haine de l’Occident est pour beaucoup dans le développement de ce phénomène. Cet accroissement des cas de départs au djihad semble donc inévitable, et montre la faiblesse des services de renseignements français qui ont plus que jamais besoin de renforts. Et celui-ci passe, entre autres, par ce nouveau phénomène de « djihadwatching ».

21 ans - Etudiante à Sciences Po Strasbourg

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