Après un mois de compétition, la Coupe du Monde 2014 est (malheureusement pour certains, heureusement pour d’autres) déjà terminée. Des buts à foison, des équipes surprenantes, des joueurs “mordants”, et bien-sûr la victoire finale de l’Allemagne : retour sur le cru assez exceptionnel du mondial brésilien.
La Nationalmannschaft sur le toît du Monde
24 ans que le peuple allemand attendait une victoire de ses représentants en Coupe du Monde…Que ce fut long ! Toujours présente dans le dernier carré de la prestigieuse compétition depuis 2002, elle a enfin réalisé le rêve absolu de tout footballeur en remportant la grande finale contre l’Argentine (1-0 après prolongations, but de Mario Götze à la 113e minute). Faisant partie des favoris avant le début de la compétition, elle a vu tous les autres favoris chuter petit à petit et elle a su monter en puissance pour atteindre son apogée lors de la demi finale contre l’hôte brésilien (7-1). Une quatrième étoile largement méritée selon l’ensemble des observateurs : ce sacre récompense un travail de plus de 10 ans qui a été réalisé sur la formation allemande, ajouté à la stabilité de l’effectif et du staff depuis une décénie. De plus, cette Allemagne se calque en grande partie sur le club du Bayern Munich (vainqueur de la Ligue des Champions en 2013) avec beaucoup de joueurs munichois présents avec la sélection allemande. Tout cela met bien en lumière le rôle important du “football de club”, qui est de plus en plus retranscrit au sein même des sélections nationales.
L’Allemagne a donc été très logiquement sacrée avec cette selection qui, au contraire du Brésil (avec Neymar) et de l’Argentine (avec Messi), met en lumière une vraie cohésion de groupe et un jeu collectif où aucun joueur ne porte à lui seul la clé de chaque rencontre. Emmenée par le fabuleux et atypique Manuel Neuer, dernier rempart qui fut un pilier important de son équipe, la Mannschaft décroche donc le titre suprême et ses joueurs font exploser les compteurs : Miroslav Klose devient le meilleur buteur de l’histoire de la Coupe du Monde avec 16 buts, le discret Thomas Müller en est à 10 buts en 2 éditions, Neuer ne concéde que 4 buts, et le jeune Mario Götze a libéré le peuple allemand en marquant en finale, à tout juste 22 ans.
Des déceptions et des réussites collectives
Qui dit Coupe du Monde dit surprises. Et pour cette édition 2014, les supporteurs auront été servis. De nombreuses équipes n’ont pas tenu leur rang durant ce Mondial, comme l’Italie, l’Angleterre, le Portugal mais surtout l’Espagne, qui ne se sont pas qualifiées en huitième de finale. Plusieurs explications à l’échec de ces équipes européennes qui avaient largement le potentiel pour faire une compétition correcte : l’Angleterre a certainement payé son manque d’expérience, car de nombreux jeunes joueurs étaient présents dans cette selection en phase de renouvellement. L’Italie a fait les frais du bon parcours du Costa Rica, de la morsure de Suarez, mais aussi du faible apport de Mario Balotelli (1 but en 3 matches). Le soit disant “grand Cristiano Ronaldo” a, lui, montré ses limites lors de ce Mondial : on a pu le sentir fragile physiquement, mais aussi peu concerné pendant les rencontres, ne s’intégrant pas au collectif lors des matches. Un petit but et le portugais est très rapidement reparti du Brésil avec ses coéquipiers, observant de loin la victoire finale d’une équipe sans “starlette” et qui joue ensemble. Le premier coup de tonnerre du premier tour fut aussi l’élimination précoce de l’Espagne, surclassée par la classe des Pays-Bas et le courage du Chili. Le système espagnol, basé sur la possession, n’a pas fonctionné et empêché l’inexistant Diego Costa et ses camarades de remporter un quatrième titre majeur en 8 ans. Enfin, le Brésil fut la dernière grosse deception malgré son parcours honorable. Mais tout le peuple brésilien n’attendait que la victoire finale de la Selecao, et rien d’autre. La deception fut immense quand les supporteurs se sont rendu compte que cette équipe n’avait pas les épaules, ni le collectif, pour remporter le graal…La faute à un Fred bien plus talentueux en plongeon que balle aux pieds, à un selectionneur légérement borné, et aussi à la blessure de Neymar. Le talentueux brésilien était bien le seul au niveau au sein d’une équipe fragile face à l’émotion et la pression, mais sa blessure a couté cher à la Seleçao. Dès la demi-finale, les Allemands ont montré aux petits Brésiliens comment jouer collectivement au football, et le résultat fut sans appel : 7-1 pour une Allemagne qui s’écchauffait pour la finale du 13 Juillet. Coup dur pour tout un peuple et surtout pour la Présidente Dilma Rousseff, qui comptait sur la selection pour faire remonter sa côte de popularité bien basse après les dépenses faramineuses faites pour le Mondial et les Jeux Olympiques 2016.
Du côté des vraies réussites et surprises collectives, interessons nous au Costa Rica. Avant la compétition, personne n’aurait parié sur ce petit pays, qui se retrouvait dans le groupe de la mort avec l’Uruguay, l’Angleterre et l’Italie. Mais dès le départ, il surprend le monde entier grâce à ses joueurs rapides et talentueux, qui battent facilement l’Uruguay (3-1), se détachent de l’Italie (1-0) et résistent à l’Angleterre (0-0). Après une qualification historique en quart pour ce petit pays de moins de 5 millions d’habitants, l’incroyable Keylor Navas et les surprenants Bryan Ruiz et Joel Campbell tombent face aux Pays-Bas, dans une difficile séance de tirs au but. En tout cas, ce fut un parcours exceptionnel pour une selection qui a fait rêver ses supporteurs, la vie dans le pays ayant été dictée par les matches de la “Sele”. Au rang des réussites, nous aurions pu aussi nous arrêter sur le parcours des Pays-Bas et de l’ingénieux Van Gaal, de la Colombie de James Rodriguez, le (vrai) meilleur joueur de la compétition, ou encore sur la Belgique d’Eden Hazard.
Rodriguez, Müller et Robben nous ont impressionné, pas Ronaldo et Messi.
Même si le collectif allemand a pris le dessus sur les individualités, il nous faut tout de même faire un point sur les meilleurs et pires joueurs de ce mois de compétition. Commencons par le positif. C’est tout d’abord les gardiens qui ont été à la fête : Manuel Neuer, Keylor Navas, Claudio Bravo, Raïs M’Bohli, Guillermo Ochoa mais aussi Tim Howard et Tim Krul. Tout ces gardiens ont montré l’étendue de leur talent, malgré une Coupe du Monde riche en buts (171 buts en 64 matches). Le premier nommé a logiquement été désigné “Gants d’Or” de cette compétition et montre qu’il est bien un gardien unique, certainement le meilleur du Monde. Parmi tout ces noms, mention spéciale pour Tim Krul : deuxième gardien des Pays-Bas, son coach le fait sortir du banc à la 121e minute du quart de finale contre le Costa Rica, et lors de la séance de tirs au but, l’excellent portier de Newcastle United arrête deux essais et envoie les Néerlandais en demi-finale. D’ailleurs, son coéquipier Ron Vlaar fut l’un des meilleurs défenseurs de la compétition, tout comme le chilien Gary Medel ou le jeune français Raphaël Varane, qui malgré son erreur face à Hummels lors du quart de finale, a été très bon avec les Bleus. Au niveau défensif, nous pouvons aussi rendre hommage à toute l’équipe de l’Argentine, qui a réussi à faire déjouer tout ses adversaires grâce à une certaine rigueur défensive et ainsi accéder en finale. Au milieu de terrain, le champion du Monde, Kroos, fut l’un des meilleurs joueurs du tournoi avec James Rodriguez. Ce dernier a éclaboussé la compétition de tout son talent, terminant meilleur buteur (6 buts) et en marquant certainement un des plus beaux buts (une magnifique reprise de volée contre l’Uruguay). Enfin, en attaque, de nombreux joueurs se sont montrés comme Thomas Müller et surtout Miroslav Klose, l’humble joueur de la Lazio Rome qui devient le meilleur buteur de l’histoire de la Coupe du Monde. Neymar (avant sa blessure) et Robin Van Persie ont été d’une grande aide pour leur selection avec 4 buts chacun. Arjen Robben termine avec 3 buts mais semble avoir retrouvé ses jambes de 20 ans, lui qui a été un véritable poison pour toutes les défenses adverses.
Faisons un rapide tour d’horizon des principales deceptions de cette 20e Coupe du Monde. En réalité ces joueurs qui nous ont déçu sont surtout les deux stars de ces dernières années : Lionel Messi et Cristiano Ronaldo. Comme nous l’avons dit précédemment, le Mondial du Portugais fut à l’image de celui de son équipe : court et désastreux. Arrivé blessé au Brésil, il n’a jamais semblé en mesure de faire la différence. Pire, il fut relativement à l’écart de son équipe sur le terrain, rechignant au travail collectif et défensif. Malgré son petit but marqué face au Ghana, l’individualiste portugais aura été transparent. Le cas Lionel Messi est plus discutable. Indispensable en début de compétition, le barcelonais s’est petit à petit éteint au point d’être peu influent lors de la finale contre l’Allemagne. A tel point qu’il a presque eu honte de recevoir le trophée de meilleur joueur de la compétition. Cette récompense n’est pas mérité, lui même le sait, mais les 13 votants (des personnalités influentes dans le monde professionnel) ont choisi….Cependant on peut se demander s’ils ont bien regardé la même Coupe du Monde que nous. Incapable de faire la différence lors des grands matches, le meilleur joueur du Monde repart extrêmement déçu, lui qui aurait pu dépasser le mythe Maradona dans le coeur des Argentins.
Les Bleus : le regard tourné vers l’Euro 2016
Abordons très rapidement le parcours de l’Equipe de France lors de cette Coupe du Monde, qui fut une découverte pour de nombreux joueurs. Une phase de poule parfaitement négociée avec en prime une superbe victoire sur la Suisse, un huitième de finale difficile mais réussi face au Nigéria, un quart de finale qui peut laisser des regrets : voilà en quelques mots un résumé de la compétition pour les protégés de Didier Deschamps. La cohésion de groupe a permis aux 23 joueurs de rever au titre mondial, mais les allemands, plus expérimentés, ont arrêté le parcours honorable de nos représentants. Désormais, les joueurs et les observateurs sont tournés vers l’Euro 2016 qui se déroulera en France, avec l’objectif de devenir champion d’Europe dans 2 ans. Mais le défi ne sera t-il pas trop dur et la pression trop forte ? Réponse dans 24 mois…
Alors ce Mondial : véritable réussite ou échec total ?
 côté de la performance sportive pure, il faut bien faire un bilan d’ensemble de la compétition. Avant le début des matches, on s’attendait à des stades non terminés, une organisation chaotique… et bien ce fut une bonne surprise : même si l’intégralité des stades n’était pas finie à temps, les joueurs ont évolué dans des enceintes magnifiques, mais avec des pelouses de mauvaise qualité, ce qui a pu altérer le jeu. Les mouvements sociaux ont quand même eu lieu pendant le mois de compétition, mais la presse en a peu parlé du fait que le football ait pris le dessus et que les forces de l’ordre étaient présentes en grand nombre pour éviter tout débordement qui aurait bien embarassé le gouvernement brésilien, la FIFA ou Michel Platini, qui souhaitait que les brésiliens se calment. L’arbitrage fut aussi un sujet sensible lors de la Coupe du Monde. Le plongeon de Fred lors du match d’ouverture, des penaltis discutables : il est temps que l’arbitrage vidéo apparaisse pour suppléer des arbitres mis en difficulté par des phases de jeu de plus en plus rapides. Mais il est à noter que des progrès ont été faits : le fameux spray utilisé lors des coups de pied arrêtés a surpris le Monde entier. Pourtant, cette mousse n’est pas une invention miracle, mais le fait qu’elle soit adoptée par une FIFA immuable, a surpris les observateurs. Autre nouveauté, l’utilisation de la technologie sur la ligne de but : un bon point qui a permis d’éviter les litiges sur les buts. Cependant, beaucoup attendent avec impatience la mise en place de l’aide vidéo, mais la FIFA refuse pour le moment, certainement parce que les enjeux financiers sont énormes derrière certains matches. En résumé, une Coupe du Monde qui a couté tres cher, de magnifiques stades qui seront innocupés dans le futur, mais des progrès faits par l’organisation : ce Mondial fut au niveau du jeu l’un des plus beaux, c’est déjà un point positif.
C’est donc avec les larmes aux yeux, tout comme nos amis argentins, que nous disons au revoir à la plus belle des compétitions de football. Le pays du ballon rond va tranquillement reprendre son rythme habituel après la ferveur de la Coupe du Monde. Cette 20e édition fut intéréssante, et beaucoup d’équipes parmis les 32 nations présentes ont fait rêver leurs millions de supporters, mais à la fin, c’est toujours l’Allemagne qui gagne…