Saddam Hussein est tombé. Les résistants ont pris le pouvoir et tentent de reconstruire le pays.
Dans une cour emplie d’un soleil cauchemardesque, un militaire prononce quelques mots sur la justice à des hommes aux allures de rois du pétrole, assis sur des chaises en plastique. En guise de clôture à son discours, un corps titubant arrive, les yeux bandés de noir et entouré par deux soldats. Il doit être pendu mais la potence n’est même pas installée. Une fois les réprimandes passées et le nœud du pendu effectué, le coupable monte sur l’urne des élections faisant office d’estrade et la corde se ressert autour de son cou. Mais ses pieds touchent le sol et la corde rompt. Alors, inlassablement, les soldats vont renouer le nœud, remettre en place l’estrade et tenter de tuer l’accusé à nouveau.
Un des spectateurs assiste à cela avec un air de réprimande et le lendemain, annonce que la révolution étant finie, il n’a plus rien à faire ici : il démissionne. Baran retourne donc chez sa mère mais craque au bout de quelques jours, lassé des entretiens organisés par cette dernière dans l’espoir qu’il trouve une femme. Il reprend donc du service et se retrouve commissaire dans un village où les règles sont régies par une bande qui sévit depuis des années. Dès son arrivée le chef Aziz Aga propose de le prendre sous son aile mais Baran n’accepte pas. Il n’est pas le seul résistant, quelqu’un d’autre refuse ces lois ancestrales : la nouvelle institutrice, Govend, belle femme cultivée aux valeurs profondes. Alors, tous deux vont lutter pour sauver le village de cette mafia.
My sweet pepper land commence par un cynisme à mourir, mêlant à l’absurdité un engagement marqué de la part du réalisateur. L’image est forte : ce dîner-spectacle assassin avec pour excuse la démocratie à construire choque. Mais plus qu’une simple anecdote, cette scène dénonce un manque d’Etat et de justice flagrante en Irak. En contraste et de manière parfaitement orchestré, le retour au foyer de Baran adoucit l’histoire et nous apaise. Cette mère, extrêmement touchante avec son fils, est un magnifique portrait des relations parents-enfants. Plus léger, le spectateur tend à nouveau les oreilles, un peu maso, pour se replonger dans les abysses tortueuses du film. Malheureusement il va vite déchanter. Ensuite, l’histoire continue et le film, lui se dégrade. Notre beau résistant et l’institutrice se plaisent. Ils vivent les mêmes choses, partagent les mêmes goûts et ont des valeurs similaires. Ils vont se chercher, paraîtrons se trouver pour finalement s’écarter. Dès lors, plus aucune surprise, tout paraît déjà vu : il était une fois, un prince et une princesse. Bien trop niais, le film engagé prend des allures de comédie à l’eau de rose.
Pourtant, il y avait de bonnes intentions à la base. Les chapeaux de cowboys et l’ambiance “il était une fois dans l’ouest” auraient été une bonne manière de prendre du recul face à la situation des kurdes tout en gardant un certain humour. Mais ce filon n’a pas été assez exploité : l’influence tourne à la pâle parodie, n’exprimant plus rien, sans fond, ni intérêt.
L’accessoiriste aura bien profité du budget (2 600 000 euros) pour vêtir ses personnages de beaux atours, donner un étui d’instrument super design et des sacs de voyage ultra tendance. Sauf qu’autour de toutes ces merveilles, les maisons n’ont pas de fenêtres, le mode de vie est plutôt pauvre et loin de la ville. Alors pourquoi ? L’esthétisme n’a rien à y voir puisque toute la beauté du film réside dans la nature. Dans ces paysages abrupts, rocailleux, vastes et enivrants. C’est là qu’est le point fort de my sweet pepper land. Cette nature est la véritable paix dans le film. C’est là que tout se passe, là que les femmes, des Lara Croft plus belles les unes que les autres d’ailleurs, résistent, là que l’on fuit et là que l’on aperçoit le village pour la première fois. Le lieu des émotions fortes. Cette sensation est magnifiée lorsque Govend joue de l’instrument local au creux des roches. Une mélodie profonde, mêlant finesse et passion dans un film aux traits trop grossiers.
Il faut donc vous attendre à 1h30 de superficialité. Les relations entre les personnages auraient pu être intéressantes si plus approfondies, les frères de l’actrice sont l’archétype de tant de relations familiales qu’ils auraient pu entraîner de belles réflexions. Mais le film n’est constitué que de cela : de bonnes idées survolées.
Des choix incompris, un scénario déjà vu et une originalité absente, My sweet pepper land est l’espoir d’un cinéma irakien plus présent mais n’en est aucunement la preuve.