SOCIÉTÉ

Sarkozy et l’UMP en eaux troubles

Bygmalion : erreur de l’UMP en votre faveur !

Alors que les comptes de l’UMP ont été invalidés par le Conseil Constitutionnel pour la campagne présidentielle de 2012, l’hebdomadaire Le Point a fait des révélations troublantes. Pourquoi une société de communication fondée par des proches du président de l’UMP, Jean-François Copé, se voit attribuer pour 8 millions d’euros de contrat s ?

Il le savait : en tout cas, c’est ce qu’il a laissé entendre. Lui, c’est Lionel Tardy, député de droite ne se déclarant pas surpris par le scandale entourant le président de l’UMP, Jean-François Copé. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il n’a pas pris part publiquement au Sarkothon comme on l’a appelée, cette contribution demandée aux membres de l’UMP visant à renflouer les caisses du parti, condamné à trouver 11 millions d’euros, suite à l’invalidation de ses comptes de campagne par le Conseil Constitutionnel.

Le scandale a un nom : Bygmalion. Celui d’une société de communication fondée par deux proches de Jean-François Copé, Bastien Millot et Guy Alves. Le premier a été le directeur de cabinet du président de l’UMP à ses débuts comme maire de Meaux en 1995 puis l’a suivi quand ce dernier est devenu porte-parole du gouvernement. Le second a eu le même poste, mais quand Jean-François Copé a été bombardé ministre du Budget de Jacques Chirac de 2005 à 2007. Il est aussi le contact du micro-parti fondé par le président de l’UMP, Génération France au Journal Officiel.

Une affaire qui n’a rien de nouveau

Le rôle majeur de cette société dans la communication de l’UMP est de notoriété publique. Elle en assure la quasi totalité ainsi que la formation des élus. Durant la campagne présidentielle de 2012, elle a pris en charge 43 meetings de Nicolas Sarkozy ou de l’UMP. D’ailleurs, durant la lutte fratricide qu’a constituée la campagne interne pour la présidence de l’UMP, François Fillon avait taclé Jean-François Copé sur le thème de la transparence, demandant qu’elle soit plus importante sur sa gestion du parti.

De telles accusations mettaient déjà en avant des soupçons au sein même du parti. 8 millions d’euros pour ces contrats : c’est près de deux fois le prix du marché ! Alors que les finances de l’UMP étaient déjà dans le rouge à ce moment-là…

Une société habituée à l’odeur du scandale

D’ailleurs, le fondateur de Bygmalion, Bastien Millot est un habitué de la rubrique « Justice ». 2003 : alors adjoint à la mairie de Beauvais, il est condamné pour faux en écriture et détournement de fonds publics, après avoir autorisé un chauffeur municipal à déclarer près de… 1 500 heures supplémentaires, absolument fictives et payées par l’argent du contribuable.

Mais surtout, en 2005, Bastien Millot devient directeur général délégué de France Télévisions, chargé de la stratégie, de l’innovation et de la communication. En novembre 2008, il se met en congé sabbatique pour un an – congé renouvelé l’année suivante pour création d’entreprise. Or, selon Le Canard enchaîné du 24 avril 2013, le jeune dirigeant signe le jour même de son départ, le 31 octobre 2008, pour près de 144 000 euros de contrats avec France Télévisions au bénéfice de Bygmalion, créée trois jours plus tôt. Les missions se multiplient pour la modique somme d’1,2 million d’euros en quatre ans. Le journal évoque, parmi d’autres prestations, une “étude consacrée à l’image de France Télévisions”, facturée plus de 43 000 euros, ou, en janvier 2009, le “discours des voeux aux salariés” de Patrick de Carolis, alors président du groupe, pour 7 000 euros. Une information judiciaire, confiée au juge Renaud Van Ruymbeke, est ouverte en juin 2013 sur des soupçons de “favoritisme et prise illégale d’intérêts”.

Pour l’instant, Jean-François Copé et l’UMP sont tranquilles concernant le volet judiciaire de l’affaire : aucune information n’a été ouverte. Si cela était le cas, Bygmalion ne pourrait pas être inquiété pour avoir récupéré la plupart des marchés concernant la communication de l’UMP, puisque les partis politiques ne sont pas soumis aux mêmes normes drastiques en matière d’appels d’offres. Par contre, la surfacturation de prestations est, elle, condamnable. Affaire à suivre…

– Samuel Ladvenu

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Patrick Buisson, l’homme du scandale

On a tout dit de l’affaire, du dictaphone planqué dans la poche de sa veste, des phrases assassines envers certains personnages politiques, mais au fond, on ne s’est pas assez posé une question : mais qui est Patrick Buisson ?

Un dictaphone, un simple dictaphone : voilà l’origine du scandale ! Et son propriétaire : Patrick Buisson. La fuite de ses enregistrements réalisés durant le quinquennat de l’ex-président Nicolas Sarkozy nous révèlent les coulisses de l’Elysée, à mi-chemin entre discussions de comptoir et pratique du pouvoir. On y apprend que Roselyne Bachelot « ne dit que des conneries » selon un des conseillers présidentiels ou bien encore que Buisson himself considère que Brice Hortefeux « est inhibé sur l’immigration », ce qui, sur le moment, ne sautait pas aux yeux de l’opinion !

Ce scandale a mis la droite en émoi, entre accusations de trahison et contre-attaque médiatique sur fond de théorie du complot, téléguidé directement de l’Elysée ! Mais ne nous attardons pas plus sur l’affaire, tout a été un peu près dit, que Nicolas Sarkozy et sa femme, Carla Bruni ont fait retirer du site Atlantico les extraits des bandes publiés pour « atteinte à la vie privée », ou bien encore que Buisson a porté plainte contre X et pense savoir qui lui a fait ce sale coup.

Un homme de l’ombre controversé

Sa carrière est marquée par un va-et-vient permanent entre le monde des médias et la politique. Avec dans les deux cas des positions proches de celles de l’extrême-droite. Ses faits d’armes médiatiques sont d’avoir été journaliste durant cinq ans au sein de la rédaction de l’hebdo Minute au cœur des années 80 (vous savez, le journal qui titrait en novembre dernier que « Christiane Taubira retrouve la banane ») avant de prendre la tête de sa rédaction puis de migrer vers Valeurs Actuelles, orienté là encore très à droite et peu connu pour son sens de la mesure et de l’impartialité. Depuis 2007, il est le directeur de la chaîne Histoire, filiale du groupe TF1.

Politiquement, l’homme s’est engagé dans les années 90 aux côtés de Philippe de Villiers et de la droite souverainiste, et a été un des artisans de son excellent score (12 %) aux Européennes de 1994. Puis, il va se rapprocher petit à petit de la droite parlementaire, notamment en prédisant le rejet de la Constitution Européenne lors du référendum de 2004. Il entre dans l’orbite du Président Sarkozy et en devient un des ses conseillers officieux : pas de poste dans l’organigramme de l’Elysée, pas de bureau, mais une influence de tous les instants.

À droite toute

Buisson n’a en tout cas pas bougé d’un iota sur une de ses convictions : droite et extrême-droite = même combat ! Pour lui, aucune différence significative n’existe entre les électeurs du FN et du RPR, puis l’UMP. Il pense d’ailleurs que ce qui les rapprochera lors des élections, c’est de mettre en avant le thème très controversé de l’identité nationale.

De la théorie il passera à la pratique sous Nicolas Sarkozy. Principal instigateur de la création du ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale en 2007 et soutien du coup de barre à droite de l’ex-président durant l’été 2010 et le fameux discours de Grenoble, son influence a été largement décriée, notamment après la défaite électorale des présidentielles de 2012. Accusé d’avoir porté des thèmes comme l’immigration ou la protection des frontières pour siphonner les voix du Front National, le conseiller de l’ombre ne s’est pas fait que des amis. François Baroin a ainsi qualifié son influence de « nocive » et comme une des causes du revers de 2012. À lui seul, il en est venu à cristalliser les oppositions entre les partisans et les opposants de ce virage droitier, entre les chiraquiens Alain Juppé, François Baroin et consorts et les sarkozystes Jean-François Copé ou Laurent Wauquiez.

Un homme disgracié depuis… 2012

Si un homme a subi la défaite de 2012, c’est bien lui. Lâché par la plupart des ténors de l’UMP, rares ont été les courageux à se risquer à le soutenir. On peut quand même souligner son soutien à l’ascension de cadres de l’UMP qui le lui ont bien rendu au moment de faire les comptes, comme Laurent Wauquiez pour qui Buisson « a fait bouger les lignes » au sein de l’UMP ou Guillaume Peltier, transfuge des mouvements de jeunesse du FN et fondateur du courant de la Droite Forte. Même si l’homme paraissait grillé, il semble que son influence ait servi la campagne de Jean-François Copé pour la présidence de l’UMP.

Avec l’histoire de ce maudit dictaphone fourré dans sa veste, l’ombre de Patrick Buisson n’a pas encore fini de planer sur l’UMP.

– Samuel Ladvenu10150889_651949554840939_1551680658_n

L’ex-président sur écoute. 

Suite à des révélations fortuites (ou pas), un immense scandale, à la fois politique et judiciaire, a éclaté : un ancien président de la république est mis en examen pour de diverses causes et le gouvernement actuel aurait pu instrumentaliser la justice. Cela afin d’empêcher le retour de cet ex-président. Si ce fait était avéré, l’indépendance de la justice serait très gravement mise en cause.

L’affaire des écoutes concernant Nicolas Sarkozy a suscité lors de ces dernières semaines, bien des débats et a défrayé la chronique. La question qui se pose est : comment a-t-on pu en arriver là ? Comment le gouvernement a-t-il pu rater sa communication a ce sujet de manière aussi frappante ?

Le mystère n’est pas encore résolu, et les (peut-être trop) nombreuses affaires “Sarkozy” non jugées. Dans sa tribune publiée par Le Figaro, il compare la justice à la Stasi. Il accuse le gouvernement et la justice d’acharnement, demandant à être traité loyalement et affirme que le meilleur moyen d’éviter son retour est de le laisser tranquille.

Peut-être a-t-il raison, peut-être tort, mais dans tous les cas, il peut paraître anormal à n’importe qui que l’on mobilise autant de juges et de policiers après pour seul homme. Il peut aussi paraître tout aussi peu normal qu’un gouvernement puisse mentir, que des personnes, haut-placées, puissent utiliser leurs relations à la tête de l’état. Dans cette affaire, il n’y a peut-être aucun, ou peut-être de nombreux fautifs.

Mais en tout cas, personne n’en sortira indemne. Ni le PS, qui a dû ces dernières semaines resserrer les rangs face aux attaques de la droite. Ni l’UMP, qui a pourtant su largement éviter du scandale. Ni le gouvernement qui perd encore un peu de ce qui lui reste de crédibilité. Ni Nicolas Sarkozy qui a commencé à rechuter dans les sondages et dont le retour en 2017 s’éloigne.

Alors, que va-t-il se passer ? Seul l’avenir nous le dira, mais cela fera mal à la classe politique dans son ensemble ! Mais tiens, les municipales, c’était pas ce week-end ?

Chronologie :
Mardi 4 Mars :  les domiciles de Thierry Herzog et de Gilbert Azibert sont perquisitionnés
Vendredi 7 :  Le Monde révèle que les téléphones de Nicolas Sarkozy (l’officiel et l’officieux sous le nom de Paul Bismuth) avaient été placés sur écoute. Et que suite à ces écoutes (dans le cadre de l’affaire Kadhafi) une information judiciaire pour violation du secret de l’instruction et trafic d’influence avait été ouverte.
Lundi 10 : Des avocats et le conseil national du barreau protestent et dénoncent de graves violations du secret professionnel. Mme Taubira déclare le soir même en direct sur le plateau du 20H de TF1 qu’elle ignorait l’existence de ces écoutes jusqu’à la parution de l’article du Monde.
Mardi 11 : Suite aux déclarations du Canard Enchaîné, Jean Marc Ayrault admet au 20H de France 2 que le gouvernement était au courant depuis le 26 Février. Il déclare par contre ne pas avoir été informé de leur contenu.
Mercredi 12 : Manuel Valls dément avoir été au courant de l’affaire avant la publication du Monde.
Lors d’une conférence de presse, Mme Taubira nie avoir “menti” et brandit afin de prouver cela deux documents. Après analyse des images, il se trouve que sur ces documents, contrairement à ce qu’a dit Mme Taubira, se retrouvent le contenu des écoutes.
Jeudi 13 : Christiane Taubira admet s’être trompée de dates, mais pas avoir menti.

– Dorian Le Sénéchal

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