SOCIÉTÉ

« No excuse for abuse »

Il y quelques mois, je participais pour la toute première fois à une manifestation un peu particulière : la Slutwalk parisienne. Retour sur cette journée et sur l’histoire de ce mouvement, qui lutte pour la liberté des femmes à se comporter comme elles l’entendent.

Samedi 28 septembre, rendez-vous square Boucicaut, dans le 7ème arrondissement. Lorsque j’arrive, plusieurs dizaines de jeunes femmes sont déjà présentes, bavardant dans une atmosphère plutôt festive. Le sujet de la marche, lui, l’est un peu moins.

 Les slutwalks – aussi appelées « marche des salopes » en bon français – sont des manifestations dont le mot d’ordre est simple : rappeler à toutes et à tous qu’une victime de viol n’est pas, et ne sera jamais responsable de son agression. La première marche fut initiée en 2011 à Toronto (Canada) suite au discours misogyne d’un officier de police, qui lors d’une action de prévention au sein d’une université, avait dit aux jeunes filles d’éviter de s’habiller comme des prostituées si elles ne voulaient pas être violées.

 

© Ceris Aston

© Ceris Aston

« Parce que nous en avons assez »

Voila ce qui pourrait résumer les motivations des 230 jeunes femmes – et des quelques garçons – présents ce jour là pour manifester. Les regards dans les transports, les remarques dans la rue, les commentaires sur les réseaux sociaux, les témoignages – tous plus angoissants les uns que les autres – qui fleurissent sur les blogs, les clichés dans les médias… Difficile d’être sereine quand on est poursuivie par la peur que notre chemin croise un jour celui d’un potentiel agresseur. Difficile aussi de s’habiller, de se comporter comme on le souhaite sans redouter une réaction autour de soi. Rappelons-le : une jupe, un short ou un décolleté, ne seront jamais une invitation.

 

© Ceris Aston

© Ceris Aston.

Ce sont donc toutes ces raisons qui m’ont poussé à rejoindre les slutwlakeuses parisiennes. Beaucoup dénoncent d’ailleurs le harcèlement ordinaire dont elles sont victimes, en brandissant des pancartes drôles (« Robin Thicke, you suck, I don’t want it ! » – rapport au clip et à la chanson de Robin Thicke, qui a fait débat face à son sexisme flagrant) ou poignantes (« Je connais un violeur. Il va bien, moi pas »). Défilant derrière une banderole où l’on pouvait lire un « Non c’est non » rouge écarlate, certaines filles portent des tenues exagérément féminines, leur peau tatouée de slogans dessinés au rouge à lèvre, révélant ainsi le sexisme permanent qui pèse sur les femmes. Aux abords de la marche, qui se terminera au Panthéon, les passants nous portent des regards intrigués : certains applaudissent, d’autres, nous sifflent. Triste réaction qui nous ramène à la réalité des choses. Il reste encore beaucoup de chemin à faire avant que les slutwalkeuses n’abandonnent leur combat.

Des mesures contre la culpabilisation des victimes

Mais les Slutwalks, ce ne sont pas seulement des marches. Le collectif regorge d’idées et de volonté pour faire bouger les choses. Pour Gaëlle Hym, organisatrice des Slutwalks françaises, il faut de toute urgence mettre en place des solutions face au problème grandissant des agressions et du sexisme ambiant : un programme d’éducation sexuelle et des campagnes de prévention plus efficaces permettraient par exemple d’informer le public et de déculpabiliser les victimes de viol. Aujourd’hui, seulement 10 % d’entre elles osent porter plainte. Ainsi, une réforme du système judiciaire (dans le but de mieux prendre en charge les victimes et de reconsidérer la responsabilité des auteurs) et des moyens plus efficaces pour agir en cas de problème dans les transports en commun sont également des points essentiels, selon la jeune femme.

A noter, enfin, que le collectif Slutwalk France a mis en ligne une pétition que chacun peut aujourd’hui signer afin de rappeler au gouvernement que des mesures sont possibles pour améliorer la situation. N’oublions pas que pour faire évoluer les mentalités, nous pouvons tous faire entendre notre voix.

You may also like

More in SOCIÉTÉ