SOCIÉTÉ

Municipales : un scrutin à enjeux !

Élections qui mobilisent le plus le corps électoral, les municipales agitent les états-majors politiques  : entre volonté d’assister à un « vote-sanction » pour les uns et nécessité de rappeler le caractère local des élections pour les autres.

Si le Parti Socialiste (PS) devait se contenter de suffrages équivalents à la côte de popularité du chef de l’État, François Hollande, ce serait la bérézina rue de Solférino… Il y a quelques mois, pourtant, Jean-François Copé, le patron de l’Union pour un Mouvement Populaire (UMP), y croyait : il promettait une « vague bleue » à qui voulait bien l’entendre. Mais, depuis, l’enthousiasme à droite s’est modéré. La droite s’attend en effet à des résultats mi-figue mi-raisin pour le scrutin municipal des 23 et 30 Mars prochains. Ainsi, dans un sondage CSA publié le jeudi 23 Janvier, les listes de droite et du centre ne seraient amenées à recueillir que 46 % des intentions de vote au premier tour, ce qui dans l’absolu semble tout à fait encourageant. En réalité, c’est deux points et demi de moins que lors des municipales de 2008, quand le PS avait réussi à récupérer près d’une trentaine de villes importantes à la droite.

Le principal ennemi des partis de gouvernement, c’est l’abstention. Une abstention qui, très souvent, profite aux extrêmes, en particulier au Front National. Il faut rappeler qu’il faut dépasser 10 % des suffrages pour arriver à se qualifier pour le second tour, ce qu’aurait pu mathématiquement faire le parti frontiste dans 900 villes lors des dernières présidentielles. Cela laisse imaginer de nombreuses triangulaires qui promettent de pourrir la vie des responsables de l’UMP, qui refusent dans leur grande majorité une alliance avec le FN. Mais cette présence au second tour pourrait limiter la portée de la reconquête souhaitée.

Peu de changements dans les grandes villes

Paris, Lyon, Nantes, Toulouse, Montpellier, Lille, Rennes… Des grandes villes qui devraient rester, sauf grosse surprise, dans l’escarcelle socialiste. Le seul basculement d’importance redouté par l’UMP pourrait avoir lieu à Marseille. L’UMP a donc révisé ses objectifs à la baisse et va se concentrer sur la prise de mairies de taille moyenne et de capitales régionales. “Sur le millier de villes de plus de 9 000 habitants, 550 sont aujourd’hui à gauche. A nous d’en reconquérir le plus possible”, explique Jean-François Copé.

Pour ce faire, l’UMP a utilisé le thème de la « nationalisation du scrutin », appelant les électeurs à sanctionner la gestion du pouvoir par les socialistes durant tout le début de la campagne. Stratégie logique, quand la majorité a plutôt tendance à le « municipaliser », pour éviter de subir un vote-sanction. Mais, depuis quelques semaines, l’argument a été paradoxalement moins utilisé… Peut-être est-ce l’effet de la lecture de sondages comme celui de l’institut CSA, qui établit que 66 % des électeurs comptent voter en premier lieu avant tout pour des enjeux locaux, mettant au second plan l’action gouvernementale.

« La ville qu’on aime pour vivre ensemble »

L’objectif est donc de limiter la casse côté socialiste. Son slogan, en forme de mot d’ordre « La ville qu’on aime pour vivre ensemble » ne laisse que peu de place au doute et se résume à un « jugez nous sur la politique menée localement et laissez de côté ce qui se fait à la tête de l’État ». D’ailleurs, le PS a déjà subi la loi du vote-sanction, perdant systématiquement les élections partielles tant cantonales que législatives depuis l’accession de François Hollande au sommet de l’État, ne se qualifiant parfois même pas au second tour, comme ce fût le cas lors de la très médiatique cantonale partielle de Brignoles qui eût lieu en octobre dernier, voyant le FN Laurent Lopez rafler la mise.

Malgré ce contexte favorable, l’UMP reste prudent sur sa réussite électorale. Selon la droite, les socialistes et leurs alliés détiennent aujourd’hui 54,5 % du millier de communes de plus de 9 000 habitants et l’objectif affiché consiste simplement à faire baisser ce pourcentage. Face à ces pudeurs électorales, la lucidité semble prévaloir au PS. Après analyse des trois derniers scrutins municipaux, la direction a constaté qu’à chaque élection, environ 15 % de villes de plus de 10 000 habitants changeaient de couleur politique : 10 % au détriment du parti au pouvoir et 5 % aux dépens de l’opposition. Ce qui voudrait dire que, fin mars, le PS pourrait en perdre entre 100 et 120.

La gauche a des atouts en poche

La gauche pourrait donc s’en sortir convenablement pour cette fois. Symboliquement, ce scrutin pourrait même devenir une réussite. Le PS devrait réussir à conserver aisément la mairie de Lyon, où tous les sondages donnent un écart confortable en faveur du maire sortant, Gérard Collomb. Même chose à Paris, où Nathalie Koscuisko-Morizet rencontre de nombreux obstacles dans sa conquête de la mairie : entre buzz négatif à coup de photos clope au bec près du canal Saint-Martin avec des SDF et nombreuses dissidences jusqu’au sein même de son propre camp, orchestrée notamment par l’homme d’affaires Charles Beigbeder, qui a été viré dans la foulée du parti après avoir lancé sa liste dissidente.

Le suspense demeure en revanche en ce qui concerne Marseille. Son basculement constituerait une victoire précieuse pour le PS, d’un point de vue symbolique et médiatique. Le dernier sondage connu réalisé à la mi-novembre par l’institut BVA donne bien le maire sortant, Jean-Claude Gaudin (UMP), en tête avec 31 % des intentions de vote au premier tour, mais battu d’une courte tête au second par Patrick Mennucci (PS) – 41 % contre 40 % – dans une triangulaire avec Stéphane Ravier (FN).

Un Front National qui promet donc de jouer un rôle de faiseur de roi durant cette élection. Marine Le Pen avait dépassé le seuil des 10 % de suffrages exprimés dans près de 900 communes lors des présidentielles d’avril 2012. Il promet de rebattre les cartes du jeu électoral là où il pourra se maintenir au second tour… et devrait faciliter la vie du PS, diluant le vote de droite. Encore faudrait-il que le parti des Le Pen parvienne à compléter ses listes électorales, ce qui ne semble pas assuré partout…

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