Cette année le Nancy Jazz Pulsations a soufflé ses quarante bougies avec une belle programmation à la clé.
Éparpillés dans le tout Nancy, allant même jusqu’à avoir lieu de manière sauvage dans des endroits insolites, les concerts ont afflué durant toute la durée du Festival s’échelonnant du 9 au 19 octobre dernier, fêtant par la même occasion la quarantième édition. Au terme de ses soirées jazz, blues, rock et électro se sont entremêlés pour notre plus grand plaisir dont certaines avaient pour thème la Nouvelle Orléans. Maze revient dessus.
En guise d’ouverture l’Autre Canal, partenaire du Nancy Jazz Pulsations nous a proposé trois artistes bien distincts : Chassol, Mendelson et Aufgang. Le premier, notamment connu pour être l’arrangeur de Phoenix et Sébastien Tellier nous a offert une performance mêlant l’instrumental autour d’un piano et d’une batterie couplés à des images projetant un film réalisé par Christophe Chassol lui-même, Nola Chérie imprégnant ainsi le public dans une atmosphère aux couleurs de la Nouvelle Orléans, les sons de cuivres provenant directement de la vidéo. Et si l’instrumental était de mise sur scène, la vidéo, elle, transmettait quelques paroles comme par exemple une présentation de divers musiciens ayant joué pour lui et qu’il accompagne au piano en fonction de leur débit de paroles. Il imbrique d’ailleurs une touche entre pop et électro dans ses compositions donnant toute son originalité à sa prestation. On retiendra l’utilisation de quelques secondes d’une vidéo d’un homme racontant l’angoisse d’une femme prise dans l’ouragan Katerina et appelant à l’aide, Help apparaissant comme le titre du morceau. Ce sont d’ailleurs ces paroles qui ont été retenues et qui se sont vues répétées en boucle, rendant le tout d’une violence insoutenable. Plus tard dans la soirée le trio Aufgang nous a proposé une nouvelle touche instrumentale, alliant avec élégance classique et électro, dosant le tout savamment. Électrisant l’Autre Canal ils ont su emmener le public avec eux malgré un cadre plus qu’intimiste puisque la salle était loin d’afficher complet en ce premier soir, et s’ils nous ont montré leurs capacités à mélanger les genres, la batterie reprenant parfois ses droits sur un titre initialement classique.
C’était sans compter sur une deuxième soirée sous le thème du Air avec les Fills Monkey, duo de batteurs déjantés, puis, Airnadette dont la Comédie Musiculte remporte un franc succès depuis quelques années maintenant et dont nous vous avions déjà parlé dans un précédent numéro. A noter que les Fills Monkey avaient pu se produire en première partie d’Airnadette lors de leurs débuts et qu’ils signent ainsi leurs retrouvailles au Nancy Jazz Pulsations. Evidemment nous n’auront pu évité Gunther Love, double champion du monde de Air Guitare et Moche Pitt de faire un petit saut dans le public nancéien malgré le manque de réceptivité à pouvoir les rattraper au vol. Les six membres auront cependant réussi à attirer l’attention de la foule qui s’amusera même à reprendre les citations des films cultes utilisés tout au long de ce show monté sous le signe de l’humour. Didier Wampas quant à lui conclura la soirée, n’ayant rien perdu de son énergie du haut de ses 51 ans, nous présentant son deuxième album solo, Comme dans un garage sortie le 15 avril dernier. Il nous offrira également Magritte ou encore Punk Ouvrier présents sur Taisez-Moi (2011) ainsi que du Wampas avec Petit PD et Quelle Joie Le Rock’n’Roll où les fans se feront un véritable plaisir de le rejoindre sur scène pour conclure le set en beauté. Mais Didier ne s’arrête pas là, après quelques détours dans son public comme d’accoutumé pour danser et chanter avec lui il s’attaque à des reprises tels que Comme d’habitude/My Way ou encore Brand New Cadillac de The Clash en version française.
Mais les festivités ont pris un réel tournant avec le début du weekend grâce à la venue de l’israélien Asaf Avidan sur la scène du Chapiteau qui affichait complet pour l’occasion. Lui qui s’est produit sur de nombreux festivals au court de l’été et était déjà venu jouer à l’Autre Canal en Novembre 2012 a fait son grand retour sous un public déjà conquis et surtout impatient de le retrouver. Mais avant cela les Trombone Shorty ont enflammé le Chapiteau aux couleurs de la Nouvelle Orléans d’où ils sont originaires. Pas de doute, le swing était de mise ce soir-là et on peut vous dire que le groupe est parvenu à emmener le public avec lui de l’autre côté de l’Atlantique avec sa musique dansante. Le chanteur demandera d’ailleurs la participation de ce dernier à de multiples reprises, le Chapiteau vibrant alors sous les applaudissements. Et si les cuivres étaient de sortie, une battle entre guitare et basse a elle aussi eu sa place donnant aux musiciens l’occasion de s’exprimer en montrant leurs talents respectifs. Puis Asaf Avidan prend le relais sous les exclamations du public lui décriant déjà son amour, proposant une setlist similaire à celle des festivals dans lesquels on a pu l’apercevoir quelques mois plus tôt. L’israélien a su jongler entre les titres de son dernier opus en date, Différent Pulses, dont la chanson arrive en troisième position avec ceux de ses deux précédents sans jamais faire de faux pas. Lui aussi n’a pas oublié les personnes venues l’écouter et a pris le temps de revenir sur l’histoire de la composition de quelques titres dont l’un d’entre eux à d’ailleurs été écrit à Paris suite à une soirée bien arrosée à Pigalle. Evidemment on n’a pu échappé à Reckoning Song, plus connue sous le titre de One Day suite au remix de Wankelmut. Elle nous a cependant été présentée ici dans un premier temps dans une version guitare/voix comme la version originale puis avec un ajout d’instruments la gardant tout de même l’intensité du morceau. Pour conclure son set, Asaf a demandé à ce que la salle soit rallumée un instant et demande à tous de se lever afin de sauter pour ne “plus être en gravitation” avec la terre pendant quelques secondes. Le public s’est gentiment prêté au jeu, le Chapiteau s’élevant alors d’un bond durant le titre aux allures rock, renouant avec les débuts du chanteur que l’on avait tant apprécié. Le weekend se poursuivra lui avec d’un côté Texas au Zénith de Nancy le samedi mais aussi une soirée électro à l’Autre Canal avec les Sexy Sushi et Miss Kittin. Le dimanche quant à lui proposera de nombreux concerts gratuits au parc de la Pépinière, amenant du monde en ce jour ensoleillé.
La semaine reprend avec la pop australienne de Micky Green qui nous a offert un joli set ampli de bonne humeur, la chanteuse s’amusant à traduire le titre des différents morceaux en français pour son auditoire tel que Bus Stop par “arrêt de bus”. Elle récitera même l’alphabet jusqu’à la lettre “n” avant que quelqu’un ne reprenne derrière elle un “o” déclenchant alors son titre phare Oh !. S’il est bien une chose que nous avons pu voir au terme de cette soirée c’est que l’australienne est allée de l’avant avec son public et qu’elle a su lui communiquer sa bonne humeur qui le lui a bien rendu. Les jours défilent et nous amènent auprès du groupe belge Amatorski qui nous a transporté dans son univers en créant une bulle sans le moindre contact et qui pourtant nous a convaincu, la musique nous berçant durant tout leur set. Puis à Shannon Wright, seule en scène avec sa guitare ou son piano, et ce, jusqu’à Mesparrow et Heymoonshaker. La première, découverte lors du Chantier des Francos en 2011 a depuis sorti son premier album Keep The Moment Alive en Mars dernier et nous a ici offert une prestation seule en scène alternant entre jeu au piano, autour de ses boucles mais aussi a capela, initiant le public à une musique sincère et profonde. Ce dernier s’est même prêté à la participation sur le dernier titre, sortant de son silence l’espace de quelques minutes. Le même soir, le duo beatbox blues Heymoonshaker se produisait au Magic Mirror pour une performance live autour de l’improvisation. S’ils ont sorti leur premier EP, Shakerism en mars dernier, le duo prend le courant à contre pied et continue de proposer de l’improvisation lors de ses concerts. Seul Colly Drop, dernier single en date a été abordé, même si le morceau ne sera pas joué dans son intégralité. Les garçons ont gardé leur tact et font “50-50” nous proposant une performance solo du beatboxer Dave Crowe, avant que l’inverse n’ait lieu avec un titre en solo du chanteur et guitariste blues Andy Balcon. A noter l’invitation des Hoboken Division, eux aussi programmés au Nancy Jazz Pulsations pour une reprise percutante de House of Rising Sun.
Pour clore le Nancy Jazz Pulsations nous nous sommes rendus au concert de la belle anglaise qui fait sensation depuis quelques mois avec son premier album Together Alone, Alex Hepburn. Entre Janis Joplin et Pink dont son titre le plus populaire à ce jour Under n’est pas sans rappeler cette dernière, Alex nous a offert une superbe prestation, sa voix surplombant le reste. Malheureusement de nombreux arrêts dus à de multiples problèmes techniques ont rendu le set bien moins agréable, la chanteuse demandant sans cesse à ce qu’on lui règle en vain. Qu’importe, Alex en tant que bonne professionnelle a su jouer la carte de la franchise avec son public et a même ajouté : “normalement on ne le dit pas mais nous avons un problème technique sur scène. Je préfère être honnête“, ce qui lui a valu des applaudissements, le public soutenant sa cause depuis le début du concert. Contre vents et marées Alex Hepburn prend sur sa colère et ne s’arrête pas pour autant, poursuivant son set, alliant les titres de son premier album tels que Love to Love You, Miss Misery, ou Yeah Yeah à de superbes reprises dont on retiendra celle de Woman de Neney Cherry. Interagissant en français, la belle a ajouté une touche d’humour à son set en s’attardant sur le terme “reprise”, persuadée initialement de devoir traduire “cover” par “couverture”, ce qui a fait rire l’assemblée, la rendant plus touchante encore. A l’annonce de son dernier morceau, Stop Fucking Around, elle a de nouveau reprit la parole pour de plus amples explications sur le titre qui ne signifie pas du tout “arrêtez de …” ce qui la fait rire lorsque quelqu’un continue sa phrase avec le bon mot mais plutôt “Arrêtez de déconner”, titre qui rassemble bien en trois mots ce qui s’est passé durant tout son set. On espère donc qu’elle aura plus de chances sur ses prochaines date.
Au terme du festival, le Nancy Jazz Pulsations a su amener quelques 100 000 visiteurs autour de 212 concerts dont 12 contenaient des artistes de la Nouvelle Orléans, thème de cette 40e édition. Avec une programmation ouverte à tous les âges, le festival a trouvé le bon filon en nous offrant dix jours de bonheur pour tout amateur de musique actuelle comme traditionnelle.