LITTÉRATURE

Du vin, des vers et le classique d’Août …

Après le théâtre, place à la poésie. Nous allons donc vous faire découvrir ou redécouvrir une œuvre particulière et originale, même encore aujourd’hui : le recueil de poésie Alcools, de Guillaume Apollinaire.

 Apollinaire Alcools, oeuvre majeure d’Apollinaire, a été publiée au début d’un siècle tourmenté qui s’annonçait pourtant si bien, avec les balbutiements de l’aviation et de la modernité, au moment du renouveau artistique en Europe. L’auteur est un avant-gardiste, notamment par rapport au Surréalisme en littérature. C’est un recueil de poèmes épars, volontairement placés dans le désordre chronologiquement parlant, où l’on retrouve les traces d’amours contrariées. Apollinaire est aussi issu du Symbolisme, il dépeint de véritables tableaux mouvants, fait appel aux sens, raconte les sirènes, les femmes, invente des mots et crée des associations bizarres. Quelques poèmes reflètent son époque, d’autres s’en évadent, mais il en résulte un recueil profondément moderne.

Il commence par se montrer provocant envers le progrès dans “Zone”, le premier poème, écrit juste avant la publication… C’est l’introduction du recueil, dans lequel il voyage à travers le temps, en laissant des traces de sa propre histoire et à travers l’espace, par des paysages différents. Il se promène dans Paris, décrit des univers atypiques en poésie, en parlant de zone industrielle par exemple.

Le recueil est aussi hanté par des figures féminines ambiguës, dangereuses et attirantes, dont il fait l’éloge, puis il les dénigre et les méprise un peu plus loin. Apollinaire partage plusieurs fois sa douleur, suite aux deux principales aventures qui ont marqué sa vie à vingt ans puis trente ans, mais toujours avec une certaine pudeur, brouillant les pistes sans cesse.

D’Alcools émane une ivresse étonnante, mélange d’émotions et d’impressions hétéroclites : mélancolie douce, regrets, souffrance, nostalgie, qui se mêlent à un plaisir de vivre l’instant, dans une sorte de contemplation qui, en nous faisant nous évader du réel, nous raccroche étrangement à lui de cette manière par cet assemblage de choses variées et incongrues.

La suppression de la ponctuation, décidée à la dernière minute, donne une force surprenante aux poèmes. Sans repères, c’est au lecteur de trouver un rythme dans la lecture qui finit par couler de manière fluide. Il y a ainsi une interprétation différente à chaque lecture et le poème en devient animé, changeant, puisqu’aucune indication n’est donnée par le rythme.

De l’ensemble résultent des interprétations parfois douteuses, on trouve des vers ambigus comme le fameux « mon verre s’est brisé comme un éclat de rire » : est-ce l’éclat de rire qui se brise soudain, à l’image de son illusion, l’ivresse qui disparaît subitement, fin de l’enchantement ? Ou bien ce bruit évoque-t-il au contraire l’éclat même d’un rire joyeux, cristallin, qui rompt le silence, paroxysme de l’enchantement ?

Emma

« Enivrez-vous » disait Baudelaire, et ce recueil en est l’illustration même, s’enivrant du réel mêlé à l’imaginaire propre au surréalisme, c’est pourquoi il convient de finir en rajoutant que ces poèmes sont intemporels ; ils se lisent pour le plaisir, pour découvrir cette douce folie, qui, sans prétention, nous transporte dans un ailleurs délicieux et imprévisible.

Aime la culture, TOUTE la culture, et l'anonymat. Pas facile d'en faire une biographie, dans ce cas. Rédactrice et Secrétaire de Rédaction pour Maze. Bonne lecture !

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