SOCIÉTÉ

Le pragmatique

Autant à droite que dans son propre camp, on accusait Hollande, surtout pendant la campagne, d’être un mou. Lors de son intervention télévisée du jeudi 28 mars, le président de la République a montré qu’il était bien le chef de l’Etat. Incisif et méthodique, François Hollande a tenté d’expliquer sa politique : à l’heure où sa plongée dans les sondages est abyssale, il était nécessaire de tenter un peu plus de pédagogie sur les réformes engagées. Et cela n’a pas été payant. L’inquiétude face à la crise, le chômage en hausse constante et l’absence de perspective positive à court terme ont pris le dessus sur le discours voulu rassurant du président. Du côté des politiques et des observateurs, on aura retenu une chose du grand oral présidentiel : François Hollande se pose en pragmatique. Il est loin le temps de “mon ennemi, c’est le monde de la finance” ou des “je veux réenchanter le rêve français”. La réalité est trop éloignée de ces formules, les Français ne cherchent plus des concepts mais des actions concrètes.

Et c’est également ce que pensent les socialistes. Certains même s’expriment à ce sujet, et de manière assez virulente. En effet depuis quelques temps, le couple Hollande-Ayrault doit faire face à la fronde de l’aile gauche de leur propre camp. Si le parti dirigé par Harlem Désir affiche un soutien sans faille au gouvernement, certains parlementaires, notamment des “jeunes”, haussent le ton pour appeler le gouvernement à (re)devenir de gauche, en agissant sur la vie quotidienne des Français, en abandonnant l’austérité. Une volonté de pragmatisme social en quelque sorte ? Seulement, François Hollande a eu un mot lors de son intervention : “Je ne suis plus un président socialiste”. A sa gauche, Jean-Luc Mélenchon et le Front de gauche vous dirons qu’il ne l’a jamais été. A sa droite, on vous dira qu’il l’est encore beaucoup trop. D’ailleurs, Jean-Marc Ayrault a dû affronter une motion de censure déposée par l’UMP à l’encontre de son gouvernement. Une pilule de plus à avaler pour les socialistes, au bout de dix mois de pouvoir.

Du vocabulaire, des formules et des face à face politiciens : à l’heure où la crise inquiète les Français, leur classe politique traditionnelle s’étripe pour savoir qui parle le mieux. Et pendant ce temps-là, il y en a une qui en profite. La législative partielle de l’Oise l’a montré, Marine Le Pen et son Front National soit disant modernisé amasse les déçus du sarkozysme d’une part, mais également les déjà déçus de la gauche au pouvoir. L’ambiguïté du pragmatique, c’est qu’il ne veut être ni de droite, ni complètement de gauche. De quoi justifier le discours anti “UMPS” de la présidente du parti d’extrême-droite. Et ce chemin sur lequel pourrait être entraînée la République n’est peut-être pas le plus sûr. Pourtant, nos dirigeants ne pourront s’en prendre qu’à eux-mêmes. Pragmatique non ?

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