CINÉMA

Intouchables : Touchés, coulés.

C’est l’histoire d’un petit film à 9 millions d’euros, avec un acteur français qui ne cherche plus à faire ses preuves, François Cluzet et un jeune made in Canal +, très en vogue, Omar Sy. Une affiche un peu marketing, laissant songeur les plus perplexes devant un engouement sans précédent pour une comédie française en 2011. Un phénomène de ce genre, ça n’est pas forcément rassurant, on repense vite à  « Bienvenue chez les ch’tis » et d’autres comédies ne faisant pas spécialement les heures glorieuses de l’art cinématographique français. J’y suis allé, attendant une éventuelle surprise, et surtout très curieux de connaître quels tenants et aboutissants pouvaient passionner les français à ce point.

Alors évidemment les stéréotypes sautent aux yeux, on est devant un film très caricaturé, un bourgeois qui n’écoute que des opéras et les classiques du classique, un jeune banlieusard dont l’entourage se méfie…  Même les jeunes semblent tirés de la comédie « LOL », des petits bourgeois, mécheux, rebelles, à la voix désagréable. Cette représentation est-elle comique ? C’est du vu et du revu, ça devient lassant, presque blessant. On est bien loin de la vraie vie, et pour traiter un sujet comme cela c’est assez embêtant. En effet, à part le rire (où devrais-je dire des sourires pour ma part, car si l’étiquette SAV n’a pas décrochée d’Omar, les gags ne m’ont jamais rendu hilares), il est bien difficile de ressentir quelque chose où de s’identifier à quelconque personnage.

Il ne faut cependant pas dresser un tableau trop noir de ce film, ne pas le qualifier de soupe TF1-Canal, comme certains ont pu le dire. Certes très marketing, avec une communication très forte qui a en partie fait son succès, ce film aurait cependant pu être un excellent téléfilm, on est diverti. Il est bien là le problème : les français vont au cinéma pour être divertis, et l’art cinématographique passe un peu à la trappe. Quand on cherche un côté plus subtile dans les récentes productions françaises, le choix reste restreint car la demande n’est plus aussi importante. Et ici, Intouchables n’a  aucune mise en scène, des champs contre champs incessants, des mouvements de caméra très simplistes, un ensemble de qualités cinématographiques très vide. Ce qui prouve bel et bien que tout se joue dans le scénario et le casting, un tout plus savoureux quand on est tranquillement et gratuitement assis devant sa télévision.

Un film mainstream quand les grands films sont ailleurs ? C’est presque certain, quand juste avant le générique est utilisé le procédé le plus en vogue en ce moment : « regardez, regardez, c’est une histoire vraie et voici les vraies personnes ! ». Ce qui est beau dans le cinéma,  c’est d’être transporté, de pouvoir supposer, c’est cette place importante que de bons réalisateurs savent laisser à notre imaginaire. Et très souvent, lorsqu’un film nous fait cet effet, on ne peut décoller du siège, on veut laisser notre esprit dans ce que l’on vient de voir, laissant passer une longue partie du générique et ressassant des heures, voire des jours. A la fin de ma séance et au premier nom du générique, tout le monde s’est levé, est reparti dans son train-train quotidien, a certainement croisé un handicapé sans s’en soucier.

Bien sûr, moi le premier, mais ce phénomène aura eu le mérite de m’agacer.

Co-créateur et rédacteur en chef de MazeMag, musicocinéphile. Animateur radio à ses heures perdues.

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