Berlin, été 42 raconte l’histoire d’Hans et Hilde Coppi, un couple de résistant·e·s qui opéraient en Allemagne nazie. Le film d’Andreas Dresen évite de nombreux écueils du film de résistance, et propose une vision originale de l’histoire.
Hans Coppi est communiste, Hilde Rake en est amoureuse. Tous·tes deux appartient à l’Orchestre Rouge (« Die Rote Kappelle »), un vaste réseau d’espionnage qui officia en plein cœur de l’Allemagne nazie et des territoires occupés, en fournissant des renseignements à l’URSS et à l’Armée rouge. Par exemple, l’auteur de théâtre Günther Weisenborn, joué par Rainer Werner Fassbinder dans Lili Marleen, en fut membre. Hilde, comme Hans, ne verront pas 1945.
Le film fait le choix de se concentrer sur le personnage de Hilde, jeune femme au destin tragique dont on suivra le point de vue tout le long du film. C’est l’histoire de sa rencontre avec Hans, jusqu’à son exécution par guillotine, en passant par la naissance de leur fils, Hans Coppi Jr. Andreas Dresen éclate son film en deux strates narratives distinctes. Il alterne ainsi des séquences que l’on peut dater entre fin 1942 et 1943, avec d’autres, celles de la rencontre et des activités des deux protagonistes. Ce kaléidoscope d’images brasse un nombre important de thématiques qui se complètent et s’opposent : la prison, la natalité, la mort, d’un côté, et l’amour, la liberté, l’espoir, la résistance, de l’autre.

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Summer’s Almost Gone
Liv Lisa Fries, déjà à l’œuvre dans la série Babylon Berlin, interprète avec beaucoup de dignité Hilde Coppi. Les séquences en prison sont d’un réalisme remarquable. La scène de l’accouchement en apparaît comme l’apothéose. Certes, elle est filmée de manière très crue. Mais elle est aussi un signe d’espoir, de vie, et d’avenir positif : Hans Jr., devenu historien, est toujours en vie.
Il est étonnant de constater que le tableau global de ces séquences carcérale n’est pas si horrible que cela. Il y a même une forme d’humanité qui pointe dans ces geôles. Symptomatique de cela, le portrait progressif, et tout en nuance de l’une des gardiennes, Frau Kühn, interprétée par Lisa Wagner. Il y a aussi ce personnage du pasteur, joué par Alexander Scheer, qui incarne les vestiges d’humanité dont les nazis – le cinéma n’a jamais cessé de le montrer – étaient dénués.
Au contraire, les séquences consacrées à la période de résistance apparaissent plus brouillonnes, et manquent de souffle. En effet, on peine à ressentir la symbiose entre Liv Lisa Fries et Johannes Hegemann – qui joue Hans. Quant aux activités proprement dites, elles sont pour le moins modestes et n’intéressent guère Andreas Dresen. Il est également difficile de cerner l’identité et les rôles accordés aux autres résistant·es qui gravitent autour d’eux.
Loin de rejouer les notes d’un héroïsme triomphant, Berlin, été 42 s’interroge avant tout sur la notion de résistance. Peu de signes rappellent la période ou le régime en place, de sorte que le film échappe largement aux codes de la reconstitution. Le titre original (In Liebe, Eure Hilde, soit « Avec amour, votre Hilde », la signature de sa dernière lettre) sonne alors comme une adresse au présent, comme un rappel de la nécessité de l’amour dans un monde troublé.