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« Transversari » – Triste portrait de l’homme moderne

© Ilanit Illouz

Dans un monde ultra-moderne où l’image est maîtresse, Vincent Thomasset chorégraphie dans Transversari un personnage qui se cherche seul dans son appartement.

Transversari vient du latin traverser – et nous allons suivre tout au long du spectacle l’aventure spirituelle et personnelle du personnage. Au commencement, un écran blanc accueille l’ombre de l’interprète Lorenzo De Angelis, créant des formes épurées mais confuses. Lorsque le danseur sort de derrière l’écran, le mystère de ces informités est dévoilé. Il est en fait vêtu de vêtements colorés et de froufrous aux allures d’Arlequin avec la blancheur de Pierrot. Tout se passe avec une lenteur exquise propice à la contemplation.

Miroir de l’Homme

De manière gracieuse et légère mais avec beaucoup de souffrance, le danseur exécute les gestes du quotidien à répétition. Nous suivons sa quête personnelle loin des préconçus de la société. Il nous livre cette aventure avec une douceur des gestes. Des gestes qui sont tant dramaturgies que libres d’interprétation. Entre envolées, légèreté et lourdeur des actions, il se passe tout et rien à la fois.

Sa tête ensevelie sous un masque en silicone gris, sans émotion, fait trembler les spectateurs par sa froideur. Nous tressaillons car nous nous reconnaissons en lui, l’identification est forte mais triste. Il représente toute l’austérité et l’ennui que subit l’homme moderne.

© Ilanit Illouz

La solitude de nos existences contemporaines se lit à travers le grand espace vide et sombre dans lequel le personnage évolue. Le danseur, dans la solitude de son appartement, a pour seule clarté celle de son écran blanc. Cet écran est le support des images desquelles il est prisonnier.

La danse des gestes accentue son isolement. Il pense agir sur les autres, insinuant une présence dans l’intention mais le public constate la tristesse de la réalité de sa solitude. La danse lente qu’il emprunte traduit l’ennui que subit le personnage.

Il y a finalement une sorte d’apaisement qui émane de cette solitude, elle construit une bulle dans laquelle le temps et les injonctions extérieures sont comme suspendues.

Une prouesse atmosphérique

Sans trop en dire, le spectacle contient une dramaturgie croissante. Grâce à une logique suggestive au lieu d’explicite, Transversari invite le public à la contemplation et à l’évasion individuelle. Il est difficile de ne pas partir dans ses propres pensées face aux images que nous offre ce spectacle. C’est là aussi que se trouve la force du spectacle : en étant sobre en terme de moyen technique, il réussit à instaurer une atmosphère dans laquelle tout le monde se retrouve, bien que glaciale et distante.

Le danseur est hybride, mi humain mi robotique à l’instar des personnages de jeux vidéo, ses gestes sont parfaitement calculés et exécutés. L’atmosphère qui se dégage du spectacle est tant familière que lointaine et fictionnelle. Nous nous retrouvons dans un futur qui se trouve être amèrement notre présent.

Site officiel de Vincent Thomasset, où il est possible de retrouver des images de la pièce.

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