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 « Showgirl » – relecture réussie du controversé film de Paul Verhoeven

© Jérôme Pique

Marlène Saldana et Jonathan Drillet revisitent à leur manière le Showgirls de Paul Verhoeven (1995). Un (presque) seul en scène bien plus drôle et corrosif que l’original.

Performance ? Cabaret ? Comédie musicale ? Marlène Saldana et Jonathan Drillet ont eux-mêmes du mal à définir leur statut et celui de leur dernière création. Interrogés à l’issue d’une représentation, ils expliquent avoir pendant un temps tenté de réhabiliter le terme de « spectacle » sans véritable succès, après des directeurs et directrices de théâtre. Et pourtant, en sortant de leur Showgirl, c’est exactement le sentiment ressenti : nous sommes allés au spectacle. Marlène Saldana et Jonathan Drillet ont fait le show.

Relecture réussie

En 1995, lorsque Showgirls sort sur les écrans, il est supposé propulser Elizabeth Berkley, son actrice principale vue dans Sauvés par le gong, sur le devant de la scène. Mais le film est détesté par la critique et la comédienne raillée pour sa performance. Progressivement, le long-métrage de Paul Verhoeven acquiert toutefois le statut d’objet culte. Il l’est notamment dans la communauté de la danse, en raison de ses nombreuses scènes de backstage et de performance.

En vérité, le film est sûrement quelque part entre le navet et le chef-d’œuvre. C’est l’histoire très banale de l’ascension fulgurante d’une jeune danseuse de Las Vegas et de sa chute tout aussi rapide. Les comédiennes sont au mieux passables, les chorégraphies kitsch et surtout, le regard porté par le réalisateur sur le corps des femmes qu’il filme est très complaisant. L’ensemble n’a donc pas spécialement bien vieilli, même si la volonté de Verhoeven était de dénoncer l’exploitation des femmes dans les revues de Las Vegas. Pour y parvenir, il aurait fallu les filmer de manière un peu moins lubrique et les doter de personnalités un chouia plus complexes…

Le Showgirl (sans s) spectacle proposé par Saldana et Drillet est complètement débarrassé de ces oripeaux gênants. Pendant une heure trente, le duo entreprend de nous raconter le film par certaines de ses scènes clés. Comme si elle était un personnage de l’histoire, Marlène Saldana, toujours aussi impériale, décrit l’action en chantant sur une musique entêtante de Rebeka Warrior. Elle est parfois rejointe par Jonathan Drillet pour des échanges sur le film, son réalisateur ou la vie en général.

© Jérôme Pique

Le résultat est tout d’abord très beau. Le travail sur la scénographie et surtout des lumières permet de créer des tableaux colorés magnifiques. L’ensemble s’avère adorablement foutraque et en ce sens, pas si éloigné du long-métrage original. On retrouve des éléments de décor (un volcan en papier mâché), des costumes et quelques passages clés. On passe du one man show au cabaret puis au buto japonais sans vraiment s’en rendre compte.

À la fois un peu naïf, très caustique et irrévérencieux, le spectacle régale par son humour. Un peu enfantin l’énorme chandelier en forme de sexe masculin ? Certes, mais alors que toutes les scènes du film de Verhoeven comportent des seins nus (voire plus), on ne voit jamais aucun pénis… Il fallait un peu rétablir l’équilibre, non ?  Faire rimer « mouise » et « valise », n’est-ce pas un peu facile ? Oui, et donc ? Selon Rebeka Warrior, il n’y a que ces rimes pauvres qui marchent vraiment, alors laissez-vous emporter.

Ce qu’on regrette le plus, c’est finalement que ce spectacle semble terminer sa tournée nationale sur une si petite série de dates au Théâtre de Chaillot. Il paraît toutefois que les deux artistes travaillent à une adaptation de la comédie musicale Cats. Un spectacle pour douze artistes à propos d’une troupe qui souhaite monter Cats mais qui se retrouve enfermée dans le théâtre et qu’on découvre quarante ans après… Prometteur, non ?

Showgirl de Marlène Saldana et Jonathan Drillet. Durée : 1h30. Informations : www.theatre-contemporain.net

Rédactrice "Art". Toujours quelque part entre un théâtre, un film, un ballet, un opéra et une expo.

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