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L’Art d’en parler – Vicdoux : « Ce sont les petites révolutions qui libèrent la femme »

©VICDOUX
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Peintres, graphistes, acteurs ou metteurs en scène… Chaque mois, Maze donne à la parole à un artiste émergent, l’interroge sur ses inspirations et son processus de création. Le cinquième épisode de L’Art d’en parler est consacré à l’illustratrice sur Instagram Vicdoux, du compte @lesdessinsdevicdoux.

C’est dans un café que l’on se retrouve. Souriant de la bouche et des yeux, comme ses dessins iconiques, Victoire Doux nous emmène avec elle dans son univers. Un univers fait de dessins, mais aussi de conseils, de valeurs, et d’engagement pour un monde (un peu) meilleur.

Victoire Doux a 30 ans. Elle n’a pas de formation artistique, ayant commencé par le journalisme politique, pour ensuite passer du “côté obscur” (selon ses mots) comme attachée de presse pour des personnalités politiques. Pas de background artistique, donc, en revanche elle dessine depuis qu’elle sait tenir un crayon dans la main.

© lesdessinsdevicdoux Instagram
Quand avez-vous décidé de vous lancer dans l’illustration  ?

J’ai arrêté de bosser en politique en 2019 et je me suis dit que c’était le moment de me lancer à temps plein dans l’illustration. Avant, je ne montrais pas forcément mes dessins, mais à force d’avoir des avis extérieurs de mes amis, ça m’a donné confiance et envie de partager ce que je faisais. Pour la petite histoire, mon compte Instagram est né pour impressionner le mec duquel j’étais amoureuse  ! Après, il a évolué en même temps que moi. Ce qui me passionne c’est le féminisme, l’amour de soi… Je suis quelqu’un de très engagée, donc je me disais que j’allais partager ça sur mon compte. Ma petite sœur m’a beaucoup aidée au niveau de la ligne éditoriale également. C’est donc un compte qui fait partie de mon travail et qui évolue. J’y mets tout, c’est à la fois mon portfolio et mon endroit de libre expression. 

Comment décririez-vous l’évolution de votre compte depuis son lancement en tant que compte d’illustration  ? 

Quand je dis qu’il me ressemble, c’est aussi parce qu’il est un endroit où je me sens libre de faire ce que je veux. Je tends également à faire de la création de contenu. Des petits reels par exemple, où l’on est moins dans le dessin mais plutôt dans la forme d’expression. J’essaye de mener mon compte vers un mélange de dessin et de création de contenu engagé.  En tout cas, la construction de ce compte a été fortement influencée par mon travail dans la politique. Et notamment auprès de personnes qui ne partagent pas du tout les mêmes valeurs que moi, par exemple sur l’image de la femme.

J’essaye de m’inspirer de ce que j’ai vécu, de ce que j’ai ressenti. Je me dis que plus ce sera sincère, plus mes dessins seront réussis pour moi. Et plus je donnerai une image fidèle qui suit la ligne éditoriale que je veux donner à mon compte. Instagram est une vraie libération pour moi. Ça m’a permis de me retrouver, de mettre de l’ordre dans mes valeurs, mes pensées, et de m’exprimer totalement. Et c’est aussi agréable, après avoir passé du temps à travailler pour des gens, de se dire qu’on est sa propre cheffe  !

© lesdessinsdevicdoux Instagram
Comment le voyez-vous évoluer par la suite  ?

J’aimerais vraiment être beaucoup plus dans la création de contenu engagé, de manière régulière. Sans m’éloigner de l’illustration évidemment  : dans ce domaine-là, j’aimerais beaucoup sortir mon propre livre. L’année dernière, j’ai eu la chance d’illustrer le Petit guide de la foufoune sexuelle de Julia Pietri. 

Quel serait un bon sujet de premier livre pour vous  ? 

J’aimerais parler des injonctions. A la base, je voulais me concentrer sur les poils, mon rapport à la pilosité, parce que je trouve que c’est un bon «  prétexte  » pour finalement parler de l’ensemble des injonctions. Ce serait un livre beaucoup plus dessiné qu’écrit, assez simple. Il parlerait de toutes ces petites choses qui sont des petites révolutions sociétales. Qui libèrent la femme petit à petit.

Il y a donc aussi un projet de joindre l’illustration à la création d’influence  ? 

En effet, j’ai aussi lancé une newsletter en début d’année 2022. Elle permet de consolider la base de gens qui me suivent et qui veulent approfondir les sujets que je traite en dessins. Je donne des petits conseils pour s’aimer plus, contre les injonctions, qui résonnent avec les publications de mon compte. Dans la prochaine, j’aimerais parler de la solitude et du plaisir d’être seul·e. Mais je n’ai pas envie de me mettre des barrières trop strictes dans ce que je fais. Je veux être régulière, mais rester libre.

Quels sont vos projets futurs  ?

J’ai eu le plaisir d’illustrer une BD pour le premier journal de Cul de Poule. C’est un média originellement sur Instagram qui met en avant tous les métiers de cuisine du point de vue des femmes. Cette première publication concerne les fromagères, et j’ai illustré un article sur une journaliste qui fait sa propre feta maison. Mais en termes de projets futurs, écrire le livre sur les injonctions est le plus important pour moi. 

Sur un autre ton, j’aimerais aussi pouvoir vendre mes cartes chez Strends, qui est une librairie à New York que j’adore. Elle vend beaucoup de cartes assez engagées, et comme je suis obsédée par New York ce serait incroyable de vendre là-bas  ! 

© lesdessinsdevicdoux Instagram
Pouvez-vous nous parler d’un projet qui vous tient particulièrement à cœur  ? 

Ce qui me vient en tête est mon expérience avec le Petit Guide de la foufoune sexuelle. Il a été écrit par Julia Pietri, du Gang du clito. Ça a été un challenge à plusieurs niveaux  : j’ai dû faire à peu près 180 dessins en dix jours, et en plus ce devaient être des dessins accessibles aux enfants. Ça a été un vrai pari parce que j’ai dû faire attention à mes dessins, m’appliquer davantage que sur les ceux de mon compte. 

J’ai été assez libre de faire ce que je voulais, et donc inclure toutes mes valeurs dans mes dessins. Il y avait tout un tas de sujets qui me tenaient à cœur, qu’il a fallu adapter pour des enfants. Typiquement sur le sujet du consentement, il a fallu faire un dessin pour qu’un enfant de 4 ans puisse le comprendre. On a également fait apparaître la masturbation, et c’était très important pour moi parce que c’est quelque chose que beaucoup d’enfants expérimentent mais dont on ne parle pas. 

C’est un projet qui m’a passionnée car il est très lié à mes idées féministes, engagées, liées à l’amour de son corps. Nous, on a grandi avec le Petit guide du zizi sexuel, mais la petite fille/femme n’avait pas autant sa place que là. L’objectif de ce compte, c’est de donner à une communauté une base de valeurs autour desquelles iels peuvent s’identifier. Des valeurs que je partage, et que je veux partager. Et tout ça en dessin, mais pas que  !

© lesdessinsdevicdoux Instagram

Retrouvez l’artiste sur Instagram et Facebook.

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