Nusky & Vaati reviennent avec un nouvel album. Annoncé comme un disque de duos, on retrouve Philippe Katerine, Cléa Vincent ou encore The Pirouettes. Rencontre avec deux fous d’indépendance.
Il nous manquait ce duo. Celui de Fantôme, de Pour moi et de tous ces morceaux envahis de synthétiseurs, d’Auto-Tune qui sature quand ça vrille mélancolique. Il fallait bien quelques années de vadrouille chacun de leur côté avant de revenir avec cet album solide.
Les guitares prennent davantage de place, mettant la partie rap plus en retrait. Chaque morceau comporte son petit lot de bizarreries sonores, d’accélérations qui déstabilisent à la première écoute. Pendant leur séparation, ils ont peut-être mûri, mais ils ont surtout peaufiné leur technique. Les instruments pour Vaati, la profondeur dans les textes pour Nusky.
Il y a des rencontres évidentes, celle de Philippe Katerine notamment. Il y a aussi des fantômes comme celui de Christophe, avec qui ils ont travaillé pour son premier album de duos. Cette nouvelle page de leur discographie, on voulait l’ouvrir en revenant sur la parenthèse de séparation qui explique bien la texture composite de l’album à venir.
Avant d’arriver à votre très bel album qui vient de sortir, j’avais quelques questions sur les projets solos de Nusky, notamment autour du son Photo. C’est Augustin Charnet qui s’occupe de la production et ça se ressent dans la tonalité très mélancolique. Comment tu te sens par rapport à ce son ?
Nusky : Photo, c’est une soirée passée avec Vaati, Augustin Charnet et Mathilda chez Christophe. On a travaillé sur quelque chose avec Augustin et on s’est toujours dit qu’il fallait faire cette chanson en souvenir de cette nuit-là. C’était le dernier projet que je voulais sortir avant de revenir avec Vaati.
Et toi Vaati, tu as travaillé sur quelques morceaux de l’album de duos de Christophe.
Vaati : Exactement. Il a fait son album Christophe etc et il invitait des gens pour reprendre des titres de son répertoire. On a fait quelques productions ensemble, notamment pour Señorita (avec Sébastien Tellier). On travaillait la nuit, évidemment. Il y avait de longues discussions avant de dîner au restaurant. De la musique, je retiens surtout la précision d’Augustin, qui était totalement dévoué à Christophe.
L’album s’ouvre avec BIP, morceau très léger. Tu dis que ta vie est à Paris, ce qui peut faire écho à ton morceau Paname, et tu déclines tes goûts. On a l’impression d’un nouveau départ. C’est comme ça que vous avez conçu ce titre ?
Nusky : Ça allait bien pour une première chanson mais on ne l’a pas forcément conçu dans cette optique. J’avais tout le texte et c’est assez rare avant de faire une chanson. Ça remonte à longtemps, l’écriture de cette chanson. Quand on compose, généralement, on essaie de faire une production et on vient ensuite aux thèmes d’écritures sur les paroles. On écrit davantage à deux par rapport à avant.
Accélérer les choses est un morceau que j’aime beaucoup, tout plein de douceur comme le précédent morceau. Comment la rencontre s’est-elle faite avec The Pirouettes ?
Vaati : La rencontre est assez vieille. Mon grand frère, qui fait de la photographie, était dans la même école que Vickie. Depuis que je suis adolescent, j’entends parler de ce groupe. Quand Nusky faisait son album solo, j’ai accompagné The Pirouettes sur leur tournée. Je jouais de la basse pendant leurs concerts, et en parallèle de cette activité, j’ai réalisé quelques prod’ avec eux.
Cette fois-ci, tu n’as pas réalisé le clip, Vaati. Quand on connait un peu l’histoire de vos deux groupes, c’est très touchant cette réunion après une rupture. La course de karting symbolise bien cette idée que différentes trajectoires se côtoient et ne se rejoignent parfois jamais. C’est l’histoire d’amour ou d’amitié qui connait des pauses, des ruptures et des accélérations. Pourquoi as-tu laissé la main pour la réalisation ?
Vaati : C’est mon grand frère qui a réalisé ce clip. J’en ai réalisé plusieurs mais cela génère beaucoup de fatigue. Le fait de passer la main permettait d’obtenir quelque chose de plus professionnel. Là, on a voulu avoir un « vrai » clip avec une lumière bien travaillée, des caméras récentes ainsi qu’une équipe de techniciens.
Nusky : Mes envies de réalisations ont toujours été très maigres mais j’aime toujours autant jouer. Depuis que Vaati est chaud d’avancer dans ce chemin de clips, je me retrouverai peut-être dans un documentaire animalier (rires). Je le suivrai partout dans cette aventure. Pour être plus sérieux, ça nous semblait important de réaliser nos clips pour garder une totale indépendance.
Flashback me fait penser à un morceau des années 1980 avec sa grosse batterie et ses relents de synthétiseurs. Tu avais quoi en tête comme référence, Vaati, quand tu as composé ce morceau ?
Vaati : Quand je commence un morceau, j’ai rarement des références en tête. Je connais très peu la musique des années 1980, on me cite parfois Phil Collins mais je n’ai jamais écouté. Au niveau du cinéma de cette décennie, j’ai peu d’exemples qui me viennent. Il y a un trou de culture à ce niveau là, donc j’aborde des sonorités qui sont liées à cette époque sans en connaître vraiment l’histoire.
La rencontre avec Philippe Katerine était évidente par rapport à votre univers. A quel moment est-il arrivé dans la conception de l’album ?
Vaati : Dans une interview, Philippe Katerine citait notre morceau Aux souvenirs oubliés et il avait réitérer ses propos lors d’un concert. Par l’intermédiaire de Christophe, on a eu son numéro de téléphone et on lui a envoyé un SMS. Il a dit oui directement pour participer au morceau. On a enregistré ça chez moi, dans le 78, en toute tranquillité.
C’est toujours un plaisir de retrouver Cléa Vincent sur un morceau, surtout en votre compagnie. Il y a plus de guitares que dans vos précédents albums ? J’ai l’impression que le rock vient davantage montrer sa tête.
Vaati : Quand on a commencé à faire des albums avec Nusky, au tout début, il n’y en avait pas du tout. C’est revenu par l’intermédiaire des concerts, et depuis on évite d’allumer l’ordinateur pour démarrer une session. À la fin du processus créatif, il y a des guitares un peu partout et je suis presque devenu phobique de l’ordinateur. Mon ordinateur fonctionne mal depuis quatre ans, c’est donc aussi pour ça qu’il y a beaucoup de guitares (rires). Je trouve ça assez équilibré dans les morceaux, même si ça ressort davantage dans cet album.
C’est un disque d’amitié, au-delà de l’amour, marqué par la présence de Mathilda, qui a aussi travaillé avec Christophe et Augustin. Elle a une voix sublime, qui nous embarque bien souvent dans la mélancolie. Sur une production toute en retenue – une guitare principalement-, vous racontez une histoire d’amour finie, qui ne cesse de regarder dans le rétroviseur. C’est un sentiment qui est source de création pour vous ?
Nusky : C’est surtout une humeur qui vient d’Augustin et de Mathilda. Ce qui provient de nous, c’est sûrement le côté introspectif, lié à une démarche de sincérité. Il y a un peu de narration sur cet album mais c’est l’introspection qui domine l’ensemble. On ne s’en rend pas compte quand on compose les sons.
Une tournée est prévue pour la sortie de l’album ?
Vaati : Après l’album de Nusky, on a fait un album qui s’appelle L’aventure et qui n’est pas encore sorti. Si tournée il y a, ce sera avec cet album pour ne plus avoir d’ordinateurs sur scènes. On pourra mobiliser des musiciens et revenir avec un plus gros budget.
Quels sont vos projets pour la suite ?
Nusky : On se concentre sur les deux albums qui vont sortir à peu de temps d’intervalle. Il nous fallait au moins ça pour nous retrouver avec Vaati.