CINÉMA

« Novembre » – Au cœur de la cellule anti-terroriste

Novembre © 2021 RECIFILMS - CHI-FOU-MI PRODUCTIONS - STUDIOCANAL - FRANCE 2 CINEMA - UMEDIA
Novembre © 2021 RECIFILMS - CHI-FOU-MI PRODUCTIONS - STUDIOCANAL - FRANCE 2 CINEMA - UMEDIA

Deux ans après le controversé Bac Nord, Cédric Jimenez revient sur grand écran accompagné de nouveau d’un fait réel  : les attentats du 13 novembre 2015. Mais loin d’être un film empathique et empli de compassion, il s’avère être une œuvre de tension électrique.

Nous sommes vendredi soir, il fait doux pour le mois de novembre. Certains Parisiens sortent aux terrasses des cafés, d’autres sont réunis dans les bars pour regarder le match qui se déroule en direct au Stade de France. La soirée bat son plein lorsque, dans les bureaux de la brigade antiterroriste, un téléphone sonne… puis deux, puis trois, jusqu’à ce qu’une dizaine de sonneries forment un boucan épouvantable, apportant un message d’horreur  : des attentats ont eu lieu au cœur de la capitale.

Les différents membres de la brigade savent qu’ils doivent agir rapidement pour retrouver les terroristes qui se sont enfuis. Chacun est sous-tension car la moindre erreur peut faire échouer la mission. La frustration règne et les prises de décisions semblent prendre trop de temps pour certains. Une chasse à l’homme se déploie dans les rues de la métropole.

Une mise à l’écart des sentiments

Par un simple discours, Fred, interprété par Jean Dujardin et chef de la brigade, invite son équipe ainsi que le spectateur à mettre de côté les sentiments et les émotions. Nous ne serons pas amenées à vivre la tristesse des victimes, et nous n’en avons d’ailleurs aucun point de vue, seulement des témoignages utiles pour l’enquête. C’est bien le sentiment d’empathie que semble vouloir éviter à tout prix le réalisateur, au point de ne donner qu’une forme vague d’identité à ses personnages, toujours nommés par leurs prénoms. Personnages qui, de plus, paraissent tous êtres les protagonistes principaux de l’histoire.

Si, dans un premier temps, le réalisateur suit Fred en Grèce durant la traque d’Abdelhamid Abaoud, permettant au spectateur de rentrer in medias res dans le long-métrage et lui faisant comprendre qu’il ne sera pas question de sensibilité, dans un second temps, il accompagne Inès, merveilleusement interprété par Anaïs Demoustier, dans la traque d’un autre suspect. Puis, le récit passe d’équipe en équipe, découvrant Sofian Khammes, Sandrine Kiberlain, Stéphane Bak tous d’une justesse saisissante. Pourtant, l’humanité existe dans cette avancée mécanique de l’intrigue, à travers le personnage de Lyna Khoudri, qui se retrouve malgré elle au cœur du danger. Samya donne au film un aspect réaliste et touchant, permettant alors de ressentir ce voile de compassion qui promet au spectateur un long-métrage légèrement plus profond qu’un simple film d’action.

Novembre-Cédric Jimenez
Lyna Khoudri et Anaïs Demoustier dans Novembre de Cédric Jimenez

Trop tôt ?

Comme nous l’avait déjà prouvé Cédric Jimenez avec la scène d’assaut dans Bac Nord, le réalisateur maîtrise à la perfection les scènes de tensions et les scènes d’actions. Pendant la majorité du film, le spectateur est bouleversé et secoué par les rebondissements. Il se tient en haleine sur son siège face à l’intrigue qui se déroule sous ses yeux. Pourtant, une question plane pendant la projection  : ne serait-ce pas trop tôt  ?

Effectivement, la sortie de ce film en salle colle parfaitement avec la fin des procès qui ont jalonnés cet été. Mais la distance et le manque d’émotions voulu dans le film font oublier de quoi il est réellement question. Les attentats n’ont pas dix ans, et Cédric Jimenez décide d’en faire un film, non pas rempli d’empathie, comme Alice Winocour avec Revoir Paris, où le traumatisme des victimes est le sujet du film, mais un film d’action que le spectateur a déjà, si ce n’est vécu, suivi. Peut-être que d’un point de vue juridique, l’affaire est enfin terminée, mais ce n’est sûrement pas le cas des personnes qui ont vu leurs vies basculer ce jour-là. Ainsi, Novembre est un film maîtrisé et bien rythmé mais qui interroge.

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