MUSIQUEMusique en bref

MUSIQUE EN BREF #3 – Come-back rock

Visuel par Guillaume Lacoste

Toutes les deux semaines, les journalistes de Maze vous proposent un tour d’horizon des albums et EP qui ont fait l’actualité musicale.

Alias – Jozef

Emmanuel Alias, écourté à son nom de famille pour son nom d’artiste, nous délivre un album électrique, psyché et sulfureux : Jozef. Le musicien nous emporte dans un voyage parfois planant, captivant et dans de multiples dimensions. Chaque titre a une ambiance différente, tout en restant dans un univers cohérent et rock. Entre mélodie industrielle, noise, jazzy ou punk, Alias ne se cantonne pas uniquement à un style mais expérimente et multiplie ses modes d’expression.

Dès le premier regard sur la pochette de l’album, l’esthétique est posée : une demeure mystérieuse, chapeautée par une entité vicieuse ayant pour mission de manipuler qui ose s’aventurer dans son antre. Alors rentrer dans le monde d’Alias c’est se laisser aller à l’expérience cathartique, au jeu et aux histoires fantastiques. Jozef est une hypnose de 12 titres que l’on expérimente encore et encore.

Sortie le 28 septembre 2022

Coups de cœur : Dance with a psychokiller, Keep on dancing, Start a fire, Together, What a shame

Eva Duc

Walter Astral – Hyperdruide

Le duo des druides musicaux le plus iconique est de retour avec leur premier EP haut en couleurs : Hyperdruide. 5 titres, 4 éléments, 1 entité qui fait le lien. Chez Walter Astral c’est dans une transe psychédélique techno dans laquelle vous êtes invités à entrer. Entre rythme oriental et plus industriel, l’EP se déroule avec aisance et nous passons du domaine de l’eau au feu en passant par la terre et l’air, pour finir devant les maîtres divins : les hyperdruides.

C’est toujours autour de l’instrument fétiche, le banjo, que l’EP se forme, c’est lui qui apporte ces mélodies qui semblent tout droit sorties d’un conte des Mille et Une Nuits

Hyperdruide se faisait attendre et maintenant que nous l’avons dans nos oreilles, nous pouvons danser au rythme du banjo céleste et nous envoler parmi les astres.

Sortie le 7 octobre 2022

Coup de cœur : Tout l’EP

Eva Duc

Alvvays – Blue Rev

Cinq ans après le brillant Antisocialites, les petits prodiges de la scène indie rock canadienne ont bien grandi. Avec Blue Rev, leur nouvel album sorti le 7 octobre dernier, il semble qu’Alvvays ait laissé l’ère de la mélancolie adolescente derrière eux pour se plonger définitivement dans l’âge adulte. Le temps du coming of age semble révolu pour le groupe. Pourtant, c’est peut-être ce qu’il manque quelque peu à l’album qui, s’il s’avère aussi entraînant qu’harmonieux, laisse d’abord un sentiment d’insatisfaction.

Blue Rev s’écoute probablement en trois temps. À la première écoute apparaît presque de la déception, comme si l’album rompait brusquement avec l’identité d’Alvvays. Puis, vient l’entre-deux, le moment latent de la tête qui bouge et des épaules qui balancent progressivement. Enfin, le troisième temps, celui à partir de Very Online Guy et Velveteen, laisse l’album s’apparenter à une véritable réussite. Si le côté intensément bruitiste de Blue Rev, bien plus présent que dans les albums précédents, se révèle parfois dur à appréhender, il est évident qu’Alvvays prend des risques, se réinvente, trouble et séduit.

Sortie le 7 octobre 2022

Coups de cœur : Pharmacist, Very Online Guy, Velveteen, Belinda Says, Bored in Bristol.

Julia Vaudron

TH da Freak – Coyote

Thoineau Palis, plus connu sous le nom de TH da Freak, nous livre un nouvel opus Coyote imbibé d’ondes teenage et de grunge des années 90. Avec ce quatrième album, on vogue loin de la surf musique et psychédélique que le freak Thoineau avait pour habitude de nous refiler.

Nous entrons dans un monde pop grunge où notre cœur d’adolescent, pour ceux qui ont grandi dans les années 90, était rempli et bercé par les complaintes poétiques et dépressives d’Eliott Smith, Nirvana et bien d’autres. Elliot Smith presque ressuscité dès les premières notes de l’album sur le planant Killing Bleach et l’hymne à tout plaquer et ses douze cordes Magaly Should Run. Puis le multi-instrumentiste sort les violons et la guitare saturée sur Pretty Cool, avant de nous rappeler le regretté Kurt Cobain sur le morceau crade et grunge du dark Notorious Man.

On retrouve une mouvance émo rock désaccordée sur No Future, pour finir par donner le coup de grâce sur les sublimes balades étranges de My Queen (Ola) et Coyote, qui nous emmène bien plus loin que les travers d’une adolescence boutonneuse. Un nouvel effort qui appelle à l’évasion sur des notes nostalgiques et liquoreuses d’un rock nineties.

Sortie le 7 octobre 2022

Coups de cœur : Killing Bleach, Magali Should Run, Pretty Cool, Notorious Man, My Queen (Ola), Coyote, The Call

Thomas Soulet

Dodie – Hot Mess

Quatre titres, douze minutes. Un EP court mais efficace, qui marque le retour de Dodie, deux ans après Build A Problem. Après avoir dévoilé les singles « Got Weird » et « Hot Mess » cet été, la chanteuse originaire de l’Est de l’Angleterre nous propose comme à son habitude tout un panel d’émotions brutes.

Intensité, douleur et exaltation sont les ingrédients qui semblent nécessaires à toute chanson de Dodie. Un savant mélange de joie et de tristesse, saupoudré d’une musique tout en finesse qui vient sublimer le texte. « Mon dieu, 27 ans et je pleure toujours dans les voitures » (ndlt), entend-on dans « Hot Mess » – un clin d’œil aux clips de « When » et « I Kissed Someone (It Wasn’t You) », des titres de son album précédent. Des paroles intimes sur des dates ratés, l’envie de dépasser la dépression et l’anxiété causées par le confinement de 2020, ou encore l’acceptation de ses sentiments – « No Big Deal (I Love You) ».

Un EP qui vient comme exutoire, qui permet une respiration et une introspection nécessaires face à ce trop-plein d’émotions. L’énergie et l’envie d’aller de l’avant sur « Hot Mess » ; un côté plus mystérieux à la Billie Eilish sur « Got Weird »  ; la plus tranquille balade à la guitare « Lonely Bones »  ; et enfin l’apaisement, avec « No Big Deal (I Love You) ». L’album précédent comportait quatorze titres ainsi que huit démos, espérons que cet EP soit précurseur d’autres titres aussi touchants que ceux-ci.

Sortie le 30 septembre 2022

Coups de cœur  : Hot Mess, No Big Deal (I Love You)

Marie Starecki

Gabriels – Angels & Queens Part I

Gabriels, on les connaît depuis un moment. À peu près un an qu’on tape du pied sur Love and Hate in a different time et qu’on se laisse porter par Blame, tous deux sortis en 2021. C’est donc l’effet d’une bombe qui se fait sentir quand le trio californien annonce début septembre l’arrivée quasi imminente de leur premier album Angels & Queens (Part I). Une claque musicale qui démarre dès le single éponyme et fait son bonhomme de chemin sur les 7 titres qui arborent le tracklisting.

Jacob Lusk, le lead vocal, évoque dans un communiqué « une pop soul venue du futur », une machine à voyager dans le temps dont la somptueuse production est signée Sounwave. Oui, le co-producteur de Kendrick Lamar est carrément dans l’affaire. Une euphorie groove qui se dégage sur l’ensemble d’Angels & Queens, un disque solaire aux pulsations soul et gospel qu’il convient naturellement d’affirmer qu’il se positionnera parmi les meilleurs albums de l’année. En attendant la deuxième partie, prévue en mars 2023…

Sortie le 30 septembre 2022

Coups de cœur : Angels & Queens, Remember Me, If you only knew

Guillaume Lacoste

Arno – Opex

Avant de se faire la belle, Arno a jeté ses dernières forces dans l’enregistrement d’Opex, sorti le 30 septembre dernier. Le chanteur belge décédé d’un cancer le 23 avril 2022 à l’âge de 72 ans nous laisse un album testament de dix chansons inédites, oscillant inlassablement entre tristesse et espoir, mêlant rock, blues, reprises et collaborations sensibles. On retrouve tout Arno sur ce disque chanté tant en français qu’en anglais et en ostendais ; son humour, sa rage électrique, son blues, sa tendresse, sa poésie mutine.

Opex, du nom du quartier d’Ostende où Arno a passé son enfance, est peut-être le disque le plus personnel du flamand. Le chanteur y revisite en quelque sorte sa vie, tant dans le style musical que dans les paroles et les reprises. Tout commence par ce premier morceau si nostalgique, La Vérité. Arno y chante, la voix intacte, « Embrasse le passé, il n’existe plus. » On retrouve aussi une reprise du piano-voix enregistré en 2021 avec le pianiste Sofiane Pamart, et rien de moins qu’un duo avec son idole de toujours, Mireille Mathieu, sur le titre La Paloma Adieu. Morceau qu’il n’a pu entendre dans sa version définitive, puisque la chanteuse Avignonnaise achevait d’enregistrer sa partie le jour même du décès d’Arno.

Dans un registre plus sombre, le titre Mon Grand-père résonne comme un magnifique slow caverneux et syncopé, dans lequel il raconte sa rencontre avec la fille de la maîtresse de son aïeul. L’album se termine par I’m Not Gonna Whistle, qui scelle l’irrévérence du chanteur. « Tout commence et tout finit avec le blues. » Opex transpire l’urgence, et les textes d’une beauté cataclysmique nous offrent un hymne à la vie en un clair obscur bouleversant.

Sortie le 30 septembre 2022

Coups de cœur : I’m Not Gonna Whistle, Mon Grand-père, One Night With You

Romane Fragne

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