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(Re)Voir – « Perfect Sense » : Spectacle de l’intime

Perfect Sense
Perfect Sense (2012) - David Mackenzie © Pretty Pictures

Perfect Sense (2012) prend à contre-pied le genre du film catastrophe et David Mackenzie livre une œuvre volontiers plus intimiste que spectaculaire. Avec un dispositif réduit, le film parvient (parfois) à ses fins grâce à son duo de comédiens de premier plan. Perfect Sense est disponible sur Ciné +.

Au sein de l’Écosse contemporaine, Michael (Ewan McGregor), cuisinier enchaînant les rencontres dénouées de sentiments croise le chemin de Susan (Eva Green), une épidémiologiste désabusée. Brutalement, l’Humanité perd ses sens un par un. D’abord, l’odorat, puis le goût, etc. Au milieu du chaos, Susan et Michael tentent de surmonter les difficultés.

Trop de symbolique tue la symbolique

Perfect Sense bénéficie et souffre de son concept. L’idée de départ, inscrire une histoire d’amour ordinaire au sein d’une catastrophe mondiale, permet au film de jouer sur les échelles. Le résultat est conforme aux intentions de réalisation. L’ampleur de la pandémie et la perte quasiment chapitrée des sens inscrit la romance dans une dynamique logique… et attendue. Si la note d’intention de Mackenzie consiste à rendre l’histoire entre les personnages banale, Perfect Sense peine à l’exécution, souffrant de trop de lieux communs d’écriture. Les protagonistes sont assez caricaturaux : Michael est seul, il a abandonné sa fiancée mourante et ne se pardonne pas. Susan se mure dans une carapace faite de travail et de monotonie.

Le réalisateur britannique n’est pas timide dans ses effets. Certaines transitions sont bien pensées, certaines prises de vues sont particulièrement immersives. Malgré cela, Perfect Sense peine à devenir un film sensoriel. À chaque perte de sens, Susan raconte en voix hors-champ comment le monde s’adapte au nouveau fléau. À l’écran, différents films d’archives illustrent ses dires. D’un côté, l’idée accentue la dimension intimiste, de l’autre s’installe une routine, une rengaine parfois agaçante.

Un film Idéal

Perfect Sense souffre malheureusement de la comparaison avec un autre long-métrage sorti la même année. Take Shelter (2011) de Jeff Nichols est aussi une variation du film catastrophe avec le couple comme unité de valeur. Le drame romantique américain propose une véritable évolution à l’échelle de ses personnages. Tandis que les plaies d’Égypte sont réelles et admises dans Perfect Sense, les visions de Curtis (Michael Shannon) dans Take Shelter sont conditionnelles et surprennent lors de leurs irruptions dans la narration.

Eva Green et Ewan McGregor livrent une partition immaculée. Les deux interprètes insufflent beaucoup de subtilité et d’épaisseur dans les personnages. Ils sont particulièrement crédibles en tant que couple de cinéma. La fin du film est aussi un passage réussi. Mackenzie utilise la perte de la vue finale pour poser un voile pudique sur les retrouvailles de Susan et Michael. Encore, en utilisant un fondu au noir, le réalisateur cède à la convention, mais cette fois la progression du climax justifie un tel choix.

Perfect Sense n’est pas un mauvais film. Malheureusement, il se repose trop sur son concept ingénieux. Heureusement, le réalisateur a poussé suffisamment loin la mise en scène. Quelques fois, la mayonnaise prend, d’autres fois, ça ne marche pas.

Perfect Sense (2012) – David Mackenzie © Pretty Pictures

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