Pour sa huitième édition, la manifestation mise sur une programmation ambitieuse, portée par des comédiens talentueux et la volonté de faire renaître la culture en dehors des grandes villes.
Une grande bâtisse en pierres, quelques gradins, des tables, des chaises, un patio suffisamment grand pour improviser une buvette et des champs, des champs à perte de vue. C’est dans ce paysage bucolique de la région bordelaise que s’est tenu cette année, comme les années précédentes (hors période Covid), le Festival Pampa, du nom de ce collectif de théâtre qui ambitionne de décloisonner la culture et de la rendre accessible en dehors des grandes villes. Et pour cause, on en est bien loin, des grandes villes : une heure de train depuis Bordeaux pour accéder à Sainte-Foy-la-Grande, puis six kilomètres en voiture, à slalomer entre vieilles maisons en pierre et préfabriqués modernes.
Quelques dizaines de personnes se pressent pour accéder au site du festival. Devant la grande roulotte qui fait office de billetterie, des familles et des personnes âgées ont fait le déplacement dans la fraîcheur du matin pour assister à la première représentation, une adaptation d’Hansel et Gretel des frères Grimm. Deux comédiens adultes jouent les enfants, avant d’être rejoints sur scène par de vrais enfants, cette fois. On navigue avec eux d’une scène à l’autre, sur fond de vignes. La cinquantaine de personnes réunie pour assister à l’office réserve un tonnerre d’applaudissement à cette mise en scène ingénieuse, qui parvient à faire beaucoup avec peu – quelques décors, quelques costumes, et le talent des interprètes.
Pour quel public ?
La programmation ressemble à son festival : on mise tout sur les comédiens et sur des mises en scènes sobres et efficaces. C’est le cas de L’Ours, de Tchekhov, quarante minutes de comédie romantico-burlesque impeccablement mises en scène par Florent Hu. On y retrouve d’autres crus du répertoire classique, Électre de Sophocle, et des pièces plus contemporaines, comme Guten Tag Madame Merkel d’Anna Fournier, qui avait eu beaucoup de succès quelques mois plus tôt à Avignon, ou Occupe-toi du bébé de Dennis Kelly, pièce anglosaxonne qui évoque, entre autres, la duplicité de certains élus sur fond de faits divers, une intrigue qui raisonne avec certaines problématiques rencontrées par les territoires ruraux.
Une table ronde est organisée sur le théâtre « à proximité » et c’est ce fil rouge-là qui guide les dix jours de la manifestation. Pendant les pauses déjeuners, les comédiens, réunis en de grandes tablées, s’interrogent à l’ombre d’un grand arbre sur les moyens de rendre l’évènement plus attractif, déplorent le manque de moyens financiers pour un travail qui est pourtant d’utilité public. En bout de table, une comédienne évoque la difficulté à parler à certains publics, ceux qui n’ont jamais vu de théâtre, et qui, pour cette raison, en seraient pour toujours hermétique. Autant de spectateurs qui ne verront jamais une salle de spectacle et mettent indirectement en danger l’avenir du métier de comédien.
Plus tard, un professeur de lycée, s’ouvre à un ami des difficultés qu’il a à convier les jeunes aux manifestations culturelles de la région. C’est toujours le même schéma, ils sont convaincus qu’il « ne se passe rien » à Sainte-Foy-la-Grande et alentours, quittent la campagne pour aller s’installer à Tours et à Bordeaux. Les défis à relever ne manquent pas.
Festival Pampa, Huitième éditions, Sainte-Foy-la-Grande, du 19 au 29 août 2022.