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« Feuilles volantes » – Entrer dans un nouveau millénaire

Alexandre Clérisse © Dargaud
Alexandre Clérisse © Dargaud

La bande dessinée Feuilles volantes publiée ce mois-ci par les éditions Dargaud joue avec les temporalités. Son auteur Alexandre Clérisse mêle plaisamment Moyen-Âge, époque contemporaine et futur fantasmé.

Le jeune Max ne rêve que d’une chose : faire des BD. Il aimerait y passer sa vie mais ses parents l’obligent à faire d’autres choses. Lorsqu’il découvre de vieilles presses dans la bâtisse que son père restaure, c’est pour lui le prétexte d’une nouvelle histoire.

Il imagine alors la vie d’un prêtre qui découvre l’invention de l’imprimerie et aspire à recopier autre chose que les textes sacrés. Lui-même imagine une vie future avec des personnages inventés et inventifs. La boucle est lancée.

Alexandre Clérisse prête régulièrement sa palette de couleurs à d’autre artistes. Il a notamment collaboré à plusieurs reprises avec son ancien professeur de l’Ecole européenne supérieure de l’image d’Angoulême, Thierry Smolderen. Il a également travaillé sur des éléments de décors des films The French Dispatch de Wes Anderson et l’Astérix et Obélix de Guillaume Canet. Feuilles volantes est son quatrième projet solo, éclatant de couleurs.

Temporalités et enluminures

L’origine des « feuilles volantes » remonte aux débuts de l’imprimerie, lorsque des textes courts étaient imprimés et distribués en cachette par des marchands ambulants. Permettant une diffusion large de textes de propagande ou de critiques contre le pouvoir en place, ces feuillets se dispersèrent de plus en plus à mesure que les techniques d’impressions progressaient.

Dans les trois temporalités dessinées par l’auteur, les feuilles volantes ont trois aspects. Celui historique pour l’homme de Dieu, celui concret pour Max qui laisse tomber ses feuilles dans la forêt, et celui plus métaphorique de feuilles virtuelles pour Suzie qui vit vers 2070.

Dans Feuilles volantes, Alexandre Clérisse bouscule la perception du temps. Pas seulement parce que ses personnages naviguent d’une époque à une autre grâce à l’imagination et à leur art. C’est au niveau des planches elles-mêmes que tout se joue. Comme l’écrivait le narratologue Raphaël Baroni : « En bande dessinée, le temps, c’est de l’espace ». Ici, les personnages se déplacent avec inventivité au sein d’une même case.

Dans Feuilles volantes, ce sont les pages qui représentent le Moyen-Âge qui sont sur ce point les plus inventives. Si l’on pense à Papa Zoglu de Simon Spruyt ou encore à Peau d’homme de Hubert et Zanzim, on peut remarquer que l’univers médiéval et ses enluminures inspirent aux artistes des idées de planches très libres et détaillées.

Alexandre Clérisse © Dargaud

Si le scénario déçoit un peu à cause de certaines facilités et de quelques pirouettes narratives, les couleurs d’Alexandre Clérisse atténuent ces défauts. L’inventivité et la beauté des planches de l’album font de Feuilles volantes une belle lecture.

Feuilles volantes par Alexandre Clérisse, éditions Dargaud, 23,00€

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