Avec Boum Boum, Laurie Lassalle revisite des événements qui ont chamboulé la France entière : les manifestations des Gilets jaunes. Mêlant reportage documentaire et confessions personnelles, elle propose un premier film percutant, au cœur des protestations.
Fin 2018, la France ne sait pas encore qu’elle va connaître une vague de manifestations qui vont atteindre tout le pays, et durer plus de deux ans. Le mouvement des Gilets jaunes, d’abord peu considéré, va rapidement s’organiser et bousculer, comme un électrochoc, les consciences et les débats. C’est dans ce contexte sans précédent que Laurie Lassalle réalise son tout premier long, un documentaire témoin proposant un retour en images très personnel sur de longs mois d’affrontements. Armée de sa caméra et d’une sensibilité touchante, on la découvre ainsi à travers les images de Boum Boum.
Les Champs-Elysées, brouillard, gaz lacrymogènes
Donnant la parole librement aux Gilets jaunes qui marchent, la réalisatrice choisit d’adopter une certaine distance qui, si elle paraît parfois impossible, lui permet finalement d’explorer des dizaines de points de vue à la fois, toujours sans une once de jugement. Elle explore toutes les facettes d’un peuple en colère, révélant tour à tour ses luttes, ses paradoxes, ses horizons incertains. Les discussions priment, jusqu’à ce que la rencontre entre manifestants et police viennent y mettre un terme abrupt. Laurie Lassalle filme depuis le cœur battant du mouvement, puisqu’elle porte sa caméra jusque sur l’avenue des Champs-Elysées, qui a vu les manifestations, mais également les répressions, les plus importantes pendant de longs mois. Elle offre ainsi un témoignage particulièrement pertinent.
Si elle documente les événements depuis les manifestations, la réalisatrice fait pourtant un choix singulier, fort, qui apporte à la fois du poids et une certaine forme de transcendance à son propos. En parallèle des images prises sur les Champs-Elysées, elle raconte un coup de foudre, la naissance d’un amour qui vivra au rythme des week-ends sur le pavé.
L’histoire d’un amour
Alors que le mouvement des Gilets jaunes naît seulement, Laurie rencontre Pierrot. Une conjoncture qui va bouleverser sa vie, puisqu’elle tombe très vite amoureuse de lui. C’est aussi pour être avec lui qu’elle se joint aux manifestations et assiste à ces événements historiques. Dévouée comme on l’est à une cause, un idéal, elle suit l’homme qu’elle aime, s’interrogeant sur le lien invisible qui les unit, sur l’avenir et les succès que la vie leur réserve.
En choisissant de mêler cette histoire profondément intime aux images souvent violentes des affrontements dans les rues parisiennes, Laurie Lasalle établit comme un parallèle entre cet amour naissant et la vie du mouvement qu’elle accompagne. Cette énergie qui l’anime vit en parfaite symbiose avec le soulèvement sans précédent qui bouleverse soudain la France. Si sa caméra s’arrête sur de nombreux manifestants, l’objet du film reste Pierrot, l’être aimé dont elle s’imprègne un peu plus avec chaque image.
Boum Boum capture un instant critique pour les Français et les pouvoirs en place, avec une volonté parfois naïve mais, surtout, une immense honnêteté. Si elle marche avec les manifestants, sa caméra révèle sans qu’elle ait besoin d’artifices la réalité d’un conflit où les points de vue se multiplient, et où la violence de la réponse policière prend souvent le pas sur les rêves d’idéaux et les débats sociétaux. C’est finalement ce qu’elle capture le plus profondément : la brutale collision entre un idéal et la réalité d’un monde souvent moins beau qu’il ne veut bien le laisser paraître.
Pour son amour comme pour les manifestants, ce choc inévitable vient rebattre les cartes et bouleverser les certitudes. Alors que la fiction s’est déjà prêtée au jeu, avec notamment La Fracture, en compétition à Cannes l’année dernière, Laurie Lassalle propose un point de vue unique sur la répression des manifestations, en replaçant une humanité sincère au premier plan de son récit.
Le film sortira en salle le 15 juin.
Publication soutenue mais non-relue par JHR Films.