CINÉMA

« Belfast » – Plongée dans une jeunesse irlandaise

© Rob Youngson / Focus Features

Après Mort sur le Nil la même année, Kenneth Branagh repasse derrière la caméra pour Belfast, drame étincelant et autobiographique d’une enfance dans un pays fragilisé. À voir en salle le 2 mars.

Belfast, commune du nord de l’Irlande d’un peu plus de 300 000 habitants était aussi auparavant le théâtre de luttes entre catholiques et protestants. C’est ce que Kenneth Branagh, connu notamment pour avoir réalisé et joué dans ses propres films tels que Le Crime de L’Orient-Express ou plus récemment Mort sur le Nil, a voulu mettre en scène à travers un récit autobiographique et en restant derrière la caméra. Au moyen d’un noir et blanc étincelant qu’on a eu l’habitude de voir sur des récentes productions (The Tragedy of Macbeth, Nos âmes d’enfants), il dépeint une réalité dure qui fait tache dans l’histoire du pays. 

Fin des années 60, Burdy (Jude Hill) est un petit garçon de 9 ans heureux, qui a pris l’habitude de jouer dans sa ruelle. Seulement voilà, cette dernière n’est pas épargnée par les luttes et les pillages entre catholiques, souhaitant la réunification avec l’Irlande, et les protestants, farouchement défenseurs de l’appartenance au Royaume-Uni. Kenneth Branagh en a lui-même fait les frais, au même âge que son personnage, contraint de quitter Belfast pour l’Angleterre avec sa famille.

Belfast s’accompagne d’un précieux casting mené par Jamie Dornan et Caitriona Balfe, tous deux Irlandais, qui jouent les parents de Burdy. Ils incarnent à la fois des parents dévoués, mais aussi tourmentés pour l’avenir du pays et de leur famille. Saluons par ailleurs la prestation de Caitriona, plus qu’émouvante en mère aimante souriante et tiraillée. Cette famille ouvrière qui semble à première vue heureuse, fait face également à certaines difficultés financières dû aux magouilles du père. Au-delà de l’aspect historique du film, Belfast est aussi et surtout un récit sur une famille et leur volonté d’affronter les difficultés ensemble. 

Violence et simplicité

La première scène est significative pour comprendre le propos du film. La douceur innocente de Burdy qui joue avec son faux bouclier et son épée en bout de bois face à la violence qui survient d’un coup, surprenant également les spectateurs. Bruit assourdissant, cris et mouvements de foule… dès les premières minutes du film la violence fait rage. 

Mais le récit s’accompagne aussi d’une certaine tendresse grâce à ce jeune garçon dont l’objectif est surtout d’avoir des bonnes notes, de plaire à celle qu’il aime et d’être libre sans avoir à quitter sa ville natale. La violence n’est donc pas antinomique de la tendresse, elle vient surtout créer l’opposition et réveiller le spectateur dans ce qui semble être le quotidien des habitants. Impromptue, inattendue, la violence peut arriver à tout moment et bousculer alors les moments simplistes plein de vies du film. 

Cette violence reste maîtrisée et apaisée grâce à des scènes empreintes de simplicité, mais procurant beaucoup de bonheur à Burdy. Entouré de sa famille, ces moments au cinéma sont sublimés par le passage du noir et blanc à la couleur, comme pour montrer deux mondes similairement opposés. La fiction devient la couleur pendant que le noir et blanc montre la réalité. Véritable prise de risque par rapport à ses précédents long-métrages, Belfast se détache de la filmographie du réalisateur et propose un véritable bijou narratif et visuel.

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