CINÉMA

« Scream » – Mise en abyme sans fond

Scream ©Paramount Pictures
Scream ©Paramount Pictures

La saga Scream continue même si son créateur, Wes Craven, est décédé en 2015. Mais ce cinquième volet est une lourde mise en abyme de deux heures.

Une jeune fille est seule dans sa cuisine, la nuit. Ses parents semblent s’être absentés et partout autour d’elle les fenêtres la rendent visible, vulnérable. Soudain le téléphone sonne. Surprise (ou non), il s’agit de Ghostface qui lui fait passer un quiz sur les protagonistes des films Stab (1998). Ainsi commence le clin d’œil aux premiers Scream et la mise en abyme.

© Paramount Pictures

Formule classique

C’est il y a vingt-cinq ans, en 1996, que paraissait au cinéma le premier Scream. En 2022, les smartphones ont remplacé les téléphones fixes (même si certains vestiges subsistent pour la référence) et les personnages sont au fait des codes du slasher movie. Ne pas aller seul·e dans un endroit isolé, se méfier de tout le monde, savoir que le meurtrier ou la meurtrière fait partie du cercle proche…etc. L’histoire elle-même joue sur cette boucle : dans la diégèse, il y a vingt-cinq ans que les meurtres ont eu lieu. Alors, quand un nouveau tueur masqué met à jour la liste des victimes, on s’inquiète, on s’appelle, on se réunit et on discute posément de la marche à suivre. Comme si les personnages eux-mêmes étaient blasés de la situation.

La version 2022 de Scream annonce rapidement la couleur : on ne change pas une formule qui marche. Donc on prend les mêmes et on recommence. Les acteurs (survivants) des premiers films sont ainsi re-convoqués dans la petite ville de Woodsboro lorsque les meurtres débutent. Pour faire un remake nostalgique il faut les figures de proue de la première heure, acteur·ices comme personnages : Sidney Prescott (Neve Campbell), Gale Weathers (Courtney Cox) et Dewey Riley (David Arquette) surtout. Mais pour faire un remake nostalgique, il faut également une bande de jeunes ami·es complète. Aux côtés de ces figures familières évolue donc une nouvelle génération, composée entre autres de Mikey Madison (Once Upon a Time in Hollywood), Dylan Minnette (13 Reasons Why) et Jasmin Savoy Brown (The Leftovers) . Une façon habile de redistribuer les cartes des suspect·es.

Métafiction

Aux manettes de ce premier Scream sans Wes Craven, deux co-pilotes  : Tyler Gillett et Matt Bettinelli-Olpin. Deux quasi-inconnus habitués aux films d’horreur et à la filmographie commune, Scream étant leur huitième film à quatre mains. Il est vrai qu’un peu de fraicheur aurait été bénéfique pour cette saga si populaire qu’elle a été très rapidement parodiée, dans Scary Movie (2000) notamment. Ses codes étaient clairs et efficaces, les ficelles étaient toutes trouvées pour faciliter les pastiches humoristiques. Alors pour (dé)jouer avec ces versions, la carte de la métafiction a été dégainée dès le second volet. Mais à force de cynisme, les spectateur·ices prennent de la distance en perdant de vue l’empathie et l’angoisse. Si dans ce cinquième volet les fameux jump scares sont répétitivement détournés ironiquement, il est difficile de réagir lorsque la troisième fausse alerte n’en est pas une.

Malgré un bon rythme et de bonnes idées, Scream ne parvient pas vraiment à ses fins. Le dosage entre humour et horreur est lourd et le film ressemble à une pâle parodie de lui-même plus qu’à une mise en abyme habile. Les blagues sont trop appuyées et les frissons ne sont pas au rendez-vous. Les plus indulgents salueront la fidélité des lieux, des personnages et des situations même si toutes ces récurrences peuvent être vues comme le signe d’un scénario à bout de souffle. « Hollywood est à court d’idées » déclare l’une des personnages. À force d’auto-référentialité, c’est ce que semble nous dire la franchise elle-même.

You may also like

More in CINÉMA