CINÉMA

Festival Jean Carmet 2021 – Rencontre avec Megan Northam

© Léïna Jung pour Maze

C’est à l’occasion du Festival Jean Carmet 2021 que nous avons rencontré l’actrice Megan Northam. Après avoir été primée en 2019 pour son rôle dans le court métrage Miss Chazelles à ce même festival, elle fait cette année partie du jury Jeune Espoir. Rencontre.

Le Festival Jean Carmet (de l’acteur éponyme réputé pour ses nombreux seconds rôles) a été créé en 1995 par l’association Ciné Bocage. Ce rendez-vous met les comédiens à l’honneur, en s’appuyant particulièrement sur les acteurs de second plan. Il compte en effet une compétition Seconds Rôles ; une compétition Jeune Espoir (courts-métrages) ; ainsi qu’un Prix des détenus (courts-métrages). Ce sont des rencontres, des échanges, de la reconnaissance et une valorisation des formats courts. En 2019, c’est Megan Northam qui remporte le prix du jury du Meilleur jeune espoir féminin. Elle interprète alors Clara, jeune fille de 17 ans, candidate au prix de Miss Chazelles-sur-Lyon. Marie, sa rivale, a été promue l’année passée. Tandis qu’au village la pression monte entre les deux camps, Clara et Marie semblent entretenir une relation ambiguë. De nommée à jury, Megan nous raconte.

Après avoir participé au festival en 2019 en tant que nommée, te voici de retour en tant que membre du jury. Peux-tu nous parler de cette évolution  ?

Je suis venue à Moulins pour la première fois en 2019, pour le court métrage Miss Chazelles de Thomas Verney, qui a été présenté ici au Festival Jean Carmet. J’ai directement été charmée par ce rendez-vous cinématographique. Je viens cette année pour la troisième fois consécutive et j’y prends à chaque fois le même plaisir. En 2020, on m’avait proposé de venir en tant que membre du jury. Comme j’avais un autre projet qui tombait sur ces dates, je n’ai pu venir que quelques jours. Ils ont alors décidé de me mettre en tête d’affiche, ce qui était complètement fou pour moi. Céline Richard, qui s’occupe de la programmation, m’avait dit que le jury «  ce sera pour l’année prochaine, qu’ils me réservaient ma place  ». Ça m’avait fait plaisir, évidemment, mais je n’y ai pas véritablement cru. Et pourtant  ! Me voilà ici, comme promis, en tant que membre du jury. Et qu’est-ce que je m’amuse  !

Le Festival Jean Carmet t’a en quelque sorte révélée en te décernant ce prix et t’accompagne depuis deux ans. Qu’est-ce qui rend ce festival si unique à tes yeux ?

Quand on vient à Moulins, on fait partie d’une sorte de communauté d’intéressés de cinéma, tous traités de façon égale et tous voués à d’agréables conversations. Il n’y a pas cette séparation entre le public et les équipes, pas de hiérarchisation liée à la profession. J’adore le fait qu’il n’y ait pas ce tapis rouge que la plupart des festivals adorent dérouler. Tout le monde bénéficie du même traitement, ce qui laisse place à un tout nouveau rapport à la création audiovisuelle. C’est un mélange de convivialité, de disponibilité, basé sur de véritables relations humaines. On s’y sent à l’aise, légitime, inspiré. On croise les réalisateurs au dîner, les acteurs à l’hôtel, les cinéphiles sont partout. C’est vraiment une expérience incroyable. Pour les jeunes qui font souvent leurs premiers pas dans le cinéma, c’est une grande chance de passer par le Festival Jean Carmet  : c’est l’occasion de découvrir à quel point il peut être plaisant de défendre un film, tout en découvrant le travail des autres.

Le fait d’être jury permet vraiment de rencontrer de nouvelles têtes, de découvrir ces courts métrages qui deviendront peut-être de longs formats, et voir l’évolution de chaque créateur. On croise ceux que l’on retrouvera sur son parcours et bien que l’on ne retienne pas obligatoirement tous les noms et toutes les histoires, moi je me souviens de visages. Et c’est si agréable de retrouver une tête marquante, et d’évoquer ainsi des souvenirs.

Megan Northam au Festival Jean Carmet 2021 © Léïna Jung pour Maze

Si tu devais décrire ton parcours vers le cinéma, quel serait-il  ?

Sans vouloir être actrice, j’ai été attirée par le cinéma jeune, au point d’aller en option cinéma au lycée à Nantes. J’ai adoré les cours, et je pense que cette option qui m’a beaucoup aidé à obtenir mon bac. Après ce cursus, on avait l’occasion de faire la classe prépa cinéma qui en découlait, mais bon comme mes notes n’étaient pas fameuses, il n’en fut rien pour moi.

Je me destinais plutôt au métier de scripte ou scénariste, rien à voir avec comédienne. Comme ma moyenne ne me donnait pas accès aux grandes écoles, je me suis orientée vers l’art du spectacle à Rennes. À l’époque c’était une connerie parce que je me suis rendue compte que je voulais faire un métier où je pouvais me servir de mon corps et pas seulement étudier l’histoire de l’audiovisuel. À 26 ans ça m’intéresse énormément, mais à 19 ans ça me disait beaucoup moins.

J’ai alors pensé que je n’étais pas faite pour le cinéma, et je suis repartie vers la musique (j’en ai beaucoup fait quand j’étais petite). J’ai voulu monter à Paris et c’est ce que j’ai fait. Pendant 5 ans je n’ai pas arrêté d’enchainer les petits boulots  : bar, brasserie, friperie, tout en prenant des cours à droite à gauche dans des conservatoires de quartier. Ce n’était pas vraiment une formation, parce que c’était plutôt aléatoire. Ça faisait un peu peur cette inconstance parce que tous mes amis avaient des diplômes, des titres auxquels s’accrocher. Mais bon finalement aujourd’hui je suis contente d’avoir ce parcours.

Pendant ces cinq années, je me baladais souvent sur Cineaste.org ou Facebook et j’ai trouvé quelques castings par ci par là. J’ai tourné dans quelques clips, dont l’un pour une réalisatrice de la Fémis qui m’a fait tourner sur son travail de fin d’étude. Grâce ça j’en ai fait un second et je suis arrivée sur Miss Chazelles qui est le court métrage qui m’a lancé jusqu’à maintenant.

As-tu un souvenir lié à ce festival que tu puisses nous raconter  ? Une rencontre qui t’a marquée  ?

Ma rencontre avec Tatiana Vial, directrice de casting (et maman de l’acteur Swann Arlaud) qui était dans le jury quand j’ai eu mon prix. On était à la soirée de la remise des prix. J’étais tétanisée, je n’avais rien mangé de la journée à cause du stress, je n’étais vraiment pas bien, complètement fébrile. Puis cette femme est venue vers moi. Il faut dire qu’elle est très impressionnante, intimidante même. Elle s’est adressée à moi avec beaucoup de gentillesse. Nous avons longuement discuté, et au cours de cette très agréable conversation, elle m’a beaucoup conseillé. Je pense que je lui dois une grande partie, si ce n’est-ce l’entièreté de la suite de mon aventure cinématographique. C’est elle qui m’a introduite à mon premier agent, qui me suit encore à ce jour et que j’adore pleinement  : François Tessier. On s’entend merveilleusement bien. Je vis le rêve de l’agent avec lui  : pour moi un agent ce n’est que du positif (rires)  !

C’est ce que l’on souhaite à tous les créatifs  : de sympathiques agents  ! En parlant d’agent, quels sont tes projets pour les prochains mois  ?

Alors, niveau long métrage, j’ai commencé à tourner en novembre dernier et pour l’instant j’ai eu la chance immense de tourner dans trois réalisations, pour de petits rôles, mais dont je suis chaque fois très reconnaissante. Je suis très contente de découvrir ce milieu à tâtons, un peu comme sur un stage d’observation. Il y a eu Robuste de Constance Meyer avec Déborah Lukumuena et Gérard Depardieu  ; Les passagers de la nuit de Mikhaël Hers avec Noée Abita, Charlotte Gainsbourg, Emmanuelle Béart et Les Clés de jade de Jeanne Aslan et Paul Saintillan avec Chloé Mons et Céleste Brunnquell. Et je tourne actuellement dans une série écrite par Hervé Hadmar pour Netflix. Et le reste : top secret  !

Si tu avais l’occasion de composer ton prochain rôle de toutes pièces, quel serait-il ?

Un film de Xavier Dolan, pourquoi pas au Canada, un rôle de composition. Un personnage qui évolue d’un extrême à l’autre, un personnage qui pète un plomb dans le film et chez qui on voit un vrai passage d’un état émotionnel à son contraire. Sinon rien à voir, une énorme comédie romantique, à l’ancienne. J’adore.

Le fait d’entrer dans le monde d’un réalisateur t’attire, les acteur.rices de la distribution moins  ?

En fait, j’aime jouer avec les gens quels qu’ils soient. Donc le réalisateur.trice avant tout.

Ce sont davantage ceux qui créent que ceux qui transmettent qui te font vibrer alors  ?

Ah oui peut-être. C’est vrai que ça rejoint un peu ce que j’éprouvais petite : mon père travaillant dans l’Opéra, j’ai un peu baigné dans la mise en scène. Et quand j’y repense, c’est assez ironique de se dire que j’étais fascinée par tout ce qui est coulisses et réalisations en amont, mais que les acteurs/chanteurs m’ont toujours effrayé. Après c’est de l’Opéra, ce n’est pas exactement la même posture : les grosses voix, les tenues, le maquillage. Mais oui, si on devait conclure : je suis finalement bel et bien passée de l’autre côté …

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