CINÉMA

(Re)Voir – « Quand Harry rencontre Sally » : Le temps de l’amour, des copains et d’une aventure

Meg Ryan et Billy Cristal © MGM

Sorti en 1989, le mythique Quand Harry rencontre Sally de Rob Reiner est un petit bijou d’écriture. Souvent copié, rarement égalé, ce chef d’œuvre de la comédie romantique est à retrouver en ce moment sur Ciné+.

Un homme rencontre une femme, rien de bien nouveau sous le soleil. Mais quand Harry rencontre Sally, c’est toute la sphère de la comédie romantique qui explose. Le scénario de la papesse du genre Nora Ephron (Nuits blanches à Seattle) et la caméra de Rob Reiner, à qui l’on doit notamment Misery, Des hommes d’honneur (ou plus récemment, le rôle du père de Jess dans New Girl) offrent à Billy Crystal et à Meg Ryan les rôles les plus iconiques de leur carrière.

Un duo mythique

Fraîchement sortis de l’université, Harry et Sally voyagent de Chicago à New York pour démarrer leurs vies respectives. Un périple d’une dizaine d’heures où ces deux êtres, qu’au départ tout sépare, vont faire plus ample connaissance et se quitter (une première fois) en se détestant. Paumé poli, honnête cynique, Harry pense tout savoir de la vie. Celle-ci le malmène, il le lui rend bien. Son impertinence sert son charisme et tranche avec le féminisme assumé de Sally. Susceptible et enjouée, elle est dans une quête perpétuelle du contrôle, et va même parfois jusqu’à bousculer les bonnes mœurs. Pour faire mentir un Harry qui assure savoir lorsqu’il fait « miauler une femme », elle simule un orgasme en plein milieu du « Katz’s Delicatessen ». Ce qui est apparu comme une transgression à la fin des années 1980 est aujourd’hui devenu culte.

Billy Cristal, Rob Reiner et Meg Ryan © D.R

Des thématiques intemporelles

Car cette scène, souvent citée pour illustrer l’esprit du film, n’est qu’un symptôme de la relation qui se dessine entre Harry et Sally. L’amour est évoqué tout au long du film dans ce qu’il a de plus cru et de plus simple : le sexe, le désespoir, les coups d’un soir, les rapports de domination en jeu entre les femmes et les hommes, la pression sociale, les normes. Rien n’échappe à cette réalisation fine et épurée, nourrie de dialogues incisifs, qui ne cesse de se mettre au service de questions plus actuelles que jamais, trente-deux ans après sa sortie.

Ironie donc lorsque Harry brandit lui-même l’impossible amitié homme/femme en étendard. Comme s’il refusait le dénouement manifeste qui l’attend. Et pour cause, dès le début du film, l’« happy end » est annoncé. It had to be you, interprété par Harry Connick Jr. (et pour laquelle il remportera un Grammy Award de la meilleure interprétation masculine de jazz) ouvre ce qui deviendra la référence en matière de « rom-coms ».

Comme une évidence

Jamais niais, souvent drôle, toujours tendre, Quand Harry rencontre Sally n’invente rien, mais reconnecte avec l’essentiel. Aucune intrigue ne soulève le film si ce n’est celle de savoir quand et comment ce pétillant binôme va s’abandonner. L’architecture est des plus classiques (rencontre, séduction, conflits, retrouvailles). Mais si la romance a un goût de banalité, elle est très loin d’être évidente. La simplicité de l’histoire d’amour vécue par leurs meilleurs amis respectifs, Marie (Carrie Fisher) pour Sally et Jess (Bruno Kirby) pour Harry, va venir contraster avec les tourments que connaissent nos héros. Il ne faudra pas moins de douze ans à Harry et à Sally pour admettre ce qu’eux seuls ignorent : ils s’appartiennent. La caméra cherche elle aussi à les réunir. Plus l’intimité se fait, plus l’image se resserre ; jusqu’à ce split screen nous laissant croire qu’ils regardent ensemble Casablanca, dans le même lit.

Meg Ryan et Billy Cristal © D.R

Entrecoupés de saynètes où plusieurs couples vont tour à tour raconter leur histoire, les chapitres d’Harry et de Sally seront ponctués par une bande originale qui participe à la tendresse et à la nostalgie dont le film est empreint. Ces standards de jazz, là encore interprétés par Harry Connick Jr. sur des arrangements musicaux de Marc Shaiman (La Famille Adams, Hairspray, Sister Act), font perdre au spectateur toute notion du temps, pourtant bien visible à l’écran. Voilà toute l’intelligence de cette réalisation  : rappeler que l’amour, comme le cinéma, n’est qu’une histoire de timing.

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