© Christophe Raynaud de Lage pour le Festival d’Avignon
Avec Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones, Jan Martens signe une pièce d’envergure réunissant pour la première fois dix-sept danseurs. Une œuvre exigeante et enthousiasmante.
Sur scène, les danseurs sont tour à tour seuls, en couple ou en groupe. Il arrive qu’ils soient synchrones, mais, le plus souvent, ils ne s’embarrassent pas de ça. Jan Martens dote chacun d’un répertoire de gestes qu’il va inlassablement répéter sur l’entêtante partition d’Henryk Gorecki pour clavecin ou une chanson de Kae Tempest. Parfois, ils s’approprient tous le geste d’un seul, se muant ainsi en une hydre à dix-sept têtes. D’autres fois, ils se contentent de marcher au pas, tel un bataillon du 14 juillet particulièrement gracieux.
Répétition
Rescapée de l’édition 2020 annulée du festival, la pièce est présentée comme une réflexion sur la résistance, le collectif et l’immobilité. Soit. Un peu surprenant quand même pour un spectacle qui ne comporte qu’un seul moment d’arrêt général (lorsque les dix-sept danseurs reproduisent un sit-in allongés sur le ventre). Mais il est vrai que s’agiter n’a jamais suffit à aller quelque part. Mouvement et immobilisme ne sont probablement pas si antinomiques. Mais au fond, qu’importe. Comme on a déjà pu le voir dans d’autres pièces de Jan Martens, c’est surtout la notion de répétition qui est au cœur de cette nouvelle pièce. Une répétition proprement envoûtante et fascinante qui suit une logique quasi-géométrique qui capte l’attention du spectateur, lui impose de faire attention à chaque détail pour repérer (prédire ?) les moindres variations de la chorégraphie.
Le spectacle doit beaucoup à sa mise en scène, d’abord simple puis enrichie de lumières très graphiques (signées Jan Fedinger et Vito Walter). Il doit aussi évidemment énormément à ses interprètes, tous très différents mais unis par la qualité de leur danse et de leur précision. Les voir évoluer puis les reconnaître procure une vraie satisfaction. Cette réussite globale n’est gâchée que par l’insertion de deux passages parlés, vaine tentative très convenue de politiser le fond de la pièce qui se suffit amplement à elle-même. Dommage, mais pas rédhibitoire.
Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones de Jan Martens. Au Festival d’Avignon (Cour du Lycée Saint Joseph) jusqu’au 25 juillet à 22 puis en tournée. Durée 1h30.