SÉLECTION OFFICIELLE – COMPÉTITION – Le réalisateur italien Nanni Moretti s’est trouvé à nouveau en compétition pour la Palme d’Or, six ans après Mia madre. Ce dernier s’attaque une fois de plus au mélodrame avec Tre Piani.
Tre Piani s’ouvre sur un accident de voiture, causé par Andrea, le fils de Dora et Vittorio, entrainant la mort d’une femme en pleine rue. Cet accident se passe sous les fenêtres d’un immeuble bourgeois situé à Rome, annonçant une succession d’événements troublants pour les familles qui y vivent. Trois étages, trois familles, trois actes et trois périodes énonçant des récits de vie entrelacés sur près de dix années.
Composé à partir du roman israélien de l’auteur Eshkol Nevo, Tre Piani vient interroger les relations familiales et plus particulièrement la filiation. La peur pour sa fille qu’il soupçonne d’avoir été abusée pour Lucio, le rejet de Vittorio pour Andrea, ce fils qui l’a toujours déçu, le détachement pour Monica qui peine à se sentir légitime et épanouie dans son rôle de mère. Chacun·e à leur manière les personnages déroulent leurs difficultés à se positionner en tant que parents, mais aussi en tant qu’adultes vis-à-vis des éléments qui leur échappe.
C’est aussi tout un raisonnement sur la notion de justice et de morale, savoir ce que l’on peut faire ou non, ce qui est accepté par les un·es et les autres, ce qui déçoit ou ce qui décevra potentiellement dans les choix que l’on fait. Ces interrogations conditionnent les destins fragiles de ce groupement de personnages : une liaison interdite, un fils que l’on laisse partir, des proches avec qui l’on rompt définitivement, des instants que l’on laisse filer.
Les personnages de Dora – interprétée par Margherita Buy, fidèle accompagnatrice de Moretti sur ses films – et de Monica – Alba Rohrwacher -, sont écrits de manière simplement belle et se révèlent peu à peu tout au long du film. Ces deux femmes portent merveilleusement le récit et le propos du film. Toutes deux elles existent progressivement par elles-mêmes, loin des hommes qui ont conditionné leurs choix de vie et leur rapport au sens de « la famille ». Un rapport biaisé et patriarcal qui les enfermait, les cloisonnait hors de ce à quoi elles aspiraient. La tristesse de cette condition féminine imposée laisse ainsi place à une libération solaire et délicate.
En salles le 27 octobre 2021