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Rencontre avec Romance – « La langue française, c’est brut »

Charles, Lise et Pierrick, qui composent Romance
© Charlotte Mouly

Nous retrouvons le groupe Romance, à l’occasion de la sortie de leur premier EP, Paris-Prague, ce 28 mai. En visioconférence, nous avons pu échanger avec le collectif dandy punk, composé de Charles, Lise et Pierrick. Faisant suite au single Cache-Cache, cet opus se veut romantique, énergique et désinvolte.  

Romance est né d’un attrait commun de la scène, à l’origine de l’amitié de ses membres. Le collectif est composé de Charles Crocq, au chant et à la guitare, de Lise Lechopier, aux choeurs et à la basse, ainsi que de Pierrick Orfao, à la guitare lui aussi. Le groupe, aux influences punk rock, se la joue débrouillard et prône le franc-jeu dans leur art. Ce premier opus prend impose leur vision de l’amour ; ici, pas de clichés cinématographiques ni d’amourettes insipides. Seule transpire la sincérité des paroles, qui sentent le vécu et traitent de trahisons inguérissables, de séparations douloureuses et de nouveaux départs. Ce premier effort énergique et brut touche par son honnêteté et tient ses promesses. Maze les reçoit pour discuter de leur première livraison musicale.

Vous vous faites appeler Romance. Pourquoi mettre ce concept au centre de votre art, d’en faire votre nom de scène  ? 

Charles Crocq : Je trouve que c’est un mot que l’on connaît tous. Qu’on a tous en nous. C’est un concept fort, délicat, qui peut passer dans n’importe quelle situation qui marque un être humain. 

Lise Lechopier  : On l’a tous en nous, donc c’est libre à l’interprétation, ce n’est pas forcément une romance amoureuse  : elle peut aussi être amicale. On en a toustes vécu une, donc on peut tous l’interpréter comme on veut. C’est ce qu’on cherche, on souhaite que les gens puissent comprendre les paroles des chansons comme ils l’entendent. Comme le dit souvent Charles, ce n’est pas seulement son histoire, car chacun peut se retrouver dans ses paroles et interpréter sa propre romance. 

Charles  : Chacun l’exprime et le définit comme il veut et écoute nos sons comme il l’entend, avec sa signification personnelle. 

Lise  : Même au sein du groupe, on a tous notre idée de la romance et on interprète chacun les paroles comme on le souhaite. C’est différent selon Charles, Pierrick ou moi. 

Sur l’EP, on retrouve «  Plus comme avant  », qui traite du regret, du pardon. C’est aussi une chanson universelle, chacun peut y trouver son interprétation. Est-ce que cela suit l’idée de la romance pour vous  ? 

Charles  : Oui. C’est marrant que tu prennes celle-ci comme exemple, parce que Lise y chante les chœurs et avait une certaine interprétation des paroles. Ce n’était pas du tout ce que moi je comprenais dans la chanson. C’est ce qui est génial, parce que chacun peut entendre ce qu’il souhaite.

Lise  : Carrément. J’ai une interprétation différente, à cause de mon histoire personnelle, très particulière, et des choses que j’ai vécues, qui me sont propres. Ce ne sera pas la même interprétation pour Charles ou Pierrick. Quand on joue, on joue avec notre propre idée de la romance, ça apporte différentes influences, différentes manières de jouer, c’est ce qui est cool. 

Charles  : C’est aussi la force de chanter en français. Au moins… On comprend (rires). Un mec qui chante en anglais, j’y comprends que dalle  ! Au moins, on est compris dans notre cercle amical, familial et dans notre niche musicale. En fait, la langue française, c’est brut. C’est une mise à nu, c’est quelque chose qui a des folies punks, tout simplement. On chante des choses que tout le monde pourra comprendre, même si c’est personnel. On s’en fout d’être jugé, on ne veut pas se cacher derrière des mots en anglais. C’est bien joli, mais ton interlocuteur il ne comprend pas ce que tu racontes. 

L’EP est titré «  Paris-Prague  ». Pourquoi jumeler ces deux villes  ?

Charles  : L’EP a été créé entre mes 18 et 22 ans. C’étaient quatre années très délicates pour moi. J’habitais à Renne avant, j’y ai fait mes classes. Et il était temps pour moi de changer d’endroit, j’avais plus de défis à y réaliser, j’avais fait le tour. À 20 ans, j’ai changé de ville aussi, car j’avais vécu des trahisons amicales, des blessures amoureuses, qui sont tout de même inspirantes. Avec mon ancienne copine, on a donc quitté Rennes pour ouvrir un nouveau chapitre dans nos vies respectives. Les quatre titres parlent un peu de cette histoire-là. C’était logique de l’appeler ainsi. C’est cette histoire, avec mon départ à Paris, et le départ d’une autre personne pour Prague, qui m’a donné toute l’inspiration pour l’EP. Le lien entre ces deux villes était à l’origine de la création de cet EP. 

Je rebondis sur le dernier morceau de l’EP, «  J’irai à Prague  ». Il fait écho à cette histoire, non  ? 

Charles  : Cette chanson représente un vrai fantasme. On espère que tout reviendra à la normale, pour faire le lien avec Plus comme avant. En fait, c’est impossible, on fantasme. Après, ça reste mon interprétation. On espère y aller, récupérer cette personne, et que tout ira mieux, alors que non. Il faut penser à soi, aller de l’avant, et voilà  ! 

Avec ces précisions, la tracklist de l’EP a plus de sens. C’est très logique, et «  J’irai à Prague  » représente la conclusion non seulement de l’EP, mais aussi de cette trame générale. 

Lise  : C’est vraiment le but. On a bien fait attention à l’ordre des chansons. J’irai à Prague représente la fin de l’EP, mais aussi de ce que Charles a vécu. C’est totalement réfléchi. C’est pour ça, d’ailleurs, qu’on ne souhaite pas continuer cette histoire dans nos projets futurs. On ne cherche pas à faire de continuité, on veut raconter autre chose. C’est la fin. C’est un morceau de vie. 

Charles  : On va créer de nouvelles histoires, de nouvelles aventures, de nouvelles choses à vivre. Pour le second EP, on voudrait parler de thèmes plus positifs. Je me sens tellement mieux à Paris qu’à Rennes, on vit des expériences différentes, et j’ai la chance d’être très bien entouré. La vie est bien plus joviale aujourd’hui. Il y a une logique de texte, mais il existe aussi une logique musicale. 

Pierrick Orfao : Les paroles m’impactent moins que la musique. J’interprète plus les choses en jouant. En y réfléchissant, la construction de l’EP est définie par l’histoire, mais, musicalement parlant, on trouve aussi un ordre. Cache-cache est catchy, c’est un peu la “musique radio” de l’EP, pour une première écoute. Après, Plus comme avant calme le jeu avec cette touche de mélancolie, et Gare à toi a une touche plus punk. 

Charles  : J’irai à Prague est plus longue, plus aboutie. 

Pierrick  : C’est important de bien finir les choses, autant au niveau des textes que de la musique. 

Charles  : On met aussi les morceaux les plus catchy en premier, pour capter l’attention du public. Surtout à l’ère de Spotify, quand on peut passer facilement d’une piste à l’autre. Je suis persuadé qu’à un moment donné, si on sort un album, il ne faudra pas qu’il dépasse 9 titres. C’est devenu long d’écouter un album. Le dernier que j’ai vraiment beaucoup aimé, c’est le nouveau de Victor Solf, qui fait 12 titres. C’est pourquoi on a mis les sons les plus «  singles  » en premier dans la tracklist. 

Votre EP paraît au moment où la culture commence à sortir la tête de l’eau. Vous allez bientôt retourner sur scène  ? 

Pierrick  : Oui. Si tout va bien, on va jouer cet été, ça se profile bien. Mais c’est délicat, car la situation pourrait changer. On n’a toujours pas joué, donc on l’espère. Je n’ai jamais fait de concerts en tant que musicien, et n’ai été que spectateur. Je ne connais pas du tout le ressenti. S’il y aura du stress, de l’euphorie… Je ne sais pas comment l’appréhender. 

Charles  : En répétition, on veut juste lâcher les chevaux pendant 35 minutes, puis c’est terminé et on range, pour faire encore mieux la prochaine fois. Ça bouillonne à l’intérieur de notre corps, c’est indescriptible. Jouer avec le public, ça nous fait bouillonner. Rester au stade de la répétition sans objectif, c’est hyper délicat. Quand on saura quand jouer, ce sera différent. 

Pierrick  : De mon côté, il y a beaucoup d’attente qui s’est installée, parce qu’on devait monter sur scène pour la première fois le 28 mars 2020. On s’était formés deux mois plus tôt. Alors que maintenant, on a travaillé, enregistré un EP. Au lieu de plonger directement dans le bain, les concerts ont été repoussés. Ça a créé une attente, donc les choses seront différentes. 

Le public va aussi donner une autre vie à l’EP une fois qu’il l’aura en main, et pourra l’entendre en live, non  ? 

Charles : J’espère. C’est primordial. C’est bien mieux que d’avoir le copié-collé studio. Quelque chose va se jouer, c’est live  ! Moi, j’ai toujours préféré les live aux studios. Les gens pourront l’écouter, et avoir une première idée de ce qu’on jouera en live. 

Pierrick  : Il y aura peut-être cette chance que certaines personnes connaissent les paroles, s’ils ont écouté l’EP. 

Charles  : Par exemple, on a sorti Cache-Cache. Quand les potes la mettent, c’est évident de chanter sur le refrain. C’est la force du chant en français, tout le monde comprend donc c’est plus évident de pouvoir chanter. C’est toujours assez marrant. Je trouve quand même que c’est bien plus compliqué de chanter en anglais. Mais ce n’est pas le délire du groupe.

Ce qui est bien dans Romance, c’est qu’on a été aidé par plein de gens qu’on connaissait. Pour notre premier clip, c’étaient que des potes, dans un bar tenu par une pote. Romance s’est créé comme ça, l’enregistrement aussi. Dans ce collectif, tout le monde a mis sa pierre à l’édifice, de près ou de loin, pour travailler dans un but commun  : faire la meilleure sortie possible, en termes d’EP et de clip. C’était hyper important que notre entourage ait cru au truc et nous ait aidé. C’est ce qui est merveilleux. Ça nous fait chaud au cœur. Quand on a tourné le clip et que tout le monde avait été présent, je me suis dit “wow”. C’est un plaisir, c’est une reconnaissance de fou. 

Cette convivialité a dû être importante pendant le processus de création de l’EP, vous avez dû vous sentir soutenus. 

 Pierrick  : C’est cool de voir à la sortie du clip que ça marche un peu. Ça a fait un peu de vues alors que personne ne nous connaît (rires). Que quelque chose qu’on a adoré faire, avec notre entourage, marche comme ça, c’est fort. 

Charles  : Ce qui nous a fait encore plus chaud au cœur, c’est quand Spotify nous a sélectionnés dans la playlist Frog’n’Roll. C’est aussi une reconnaissance d’un gros truc, ce qu’on fait peut plaire à des mecs qui s’y connaissent. Ça nous aide beaucoup dans les écoutes, plein de gens peuvent tomber sur la playlist et nous écouter. C’est génial. 

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