LITTÉRATURE

« Un Hamster à l’école » – Le collège entre notes et anecdotes

Crédits : Les éditions La Fabrique

Un Hamster à l’école se veut une «  traversée  » de l’Éducation Nationale, une réflexion aussi bien autobiographique que critique du monde de l’école. Écrivaine et enseignante, Nathalie Quintane interroge nos années collège grâce à une écriture au service du comique, du politique ; et parfois un peu trop, de l’anecdotique. 

La polyphonie irrigue de plusieurs façons ce récit autobiographique. On entend successivement Nathalie Quintane la collégienne, la lycéenne, l’étudiante en khâgne, la professeure à Lisbonne, l’enseignante mutée de collège en collège. C’est justement cette variété des expériences qui donne autant de force que de légitimité au propos. Rajoutons à cette voix celles d’amis se souciant de l’avenir de leurs enfants, de collègues plus ou moins autoritaires, ou encore de collégiennes déconcertées de ne pas pouvoir porter un débardeur en pleine canicule. Se libère alors un regard perplexe et kaléidoscopique sur les salles de classes de nos années collège. 

Celles et ceux qui connaissent déjà l’œuvre de Nathalie Quintane retrouveront avec joie sa plume corrosive qui extrait des emplois du temps réguliers d’écoliers des moments tristement vrais qui nous font rire. 

«  En fait c’est vraiment le truc le plus bizarre que j’ai vécu dans l’éducation nationale ces quatre années où j’ai bien mangé à la cantine. Ça et l’arrivée de l’Histoire de l’Art. »

Un Hamster à l’école, Nathalie Quintane

Des souvenirs de classes aux critiques de l’institution 

Nathalie Quintane a le mérite de nous rendre par moment nostalgiques, et de nous faire voir l’envers du décor. Telle une petite souris, nous observons les interactions dans la salle des profs, nous découvrons le plaisir de corriger une dictée, l’absentéisme des profs comme ceux des élèves, la scoliose latente à cause de la correction des copies, ainsi que la langue des bulletins.

«  Une fois, un collègue a eu un mot nouveau : «  perfectible  ». Du coup, on s’est tous mis à taper «  perfectible  ». Perfectible, perfectible, Perfectible, ça faisait.  » 

Un Hamster à l’école, Nathalie Quintane

De plus, l’autrice ne se restreint pas à ces simples vignettes de salles de classes. Elle parsème son texte de critiques sur l’institution, déconstruit les clichés réactionnaires sur le rôle social et politique de l’école, discute tour à tour de la question de l’autorité – notamment par la disparition de l’estrade – , de l’adhésion implicite des fonctionnaires à un État policier, des réformes scolaires (qui ne sont en réalité que lexicale, « on ne dit plus connaissance mais compétence »), et de la sempiternelle évaluation qui reste le pilier le l’éducation française, qu’elle soit chiffrée, colorée ou explicitée par une lettre.

Un propos politique parfois trop anecdotique

Si, comme l’affirme l’autrice, «  la structure de l’école c’est la note  » , il serait possible d’affirmer que la structure de son livre c’est l’anecdote. Certes, le plaisir à la lecture de certains passages ne peut être nié, cependant, on s’agace par moments de la simple juxtaposition d’anecdotes, drôles mais souvent gratuites. La syntaxe hachée et les perpétuels enjambements semblent n’exister que pour vernir d’une autorité littéraire ce qui parfois ressemble à un simple recueil, faussement sociologique, d’histoires drôles sur l’école. 

Les réflexions critiques perdent de leurs forces quand elles sont émises par une écrivaine jouant la sociologue à la place des sociologues. Autrement dit, bien qu’il interroge avec humour la mutation du statut d’enseignant, le livre de Nathalie Quintane n’apporte aucune solution, s’arrête au stade de la critique impressionniste bien agencée. A la fin de la lecture le hamster à l’école, enfermé dans sa cage qu’est l’institution, court toujours sans se poser de questions. L’écriture énergique de Nathalie Quintane est à double tranchant : elle fait rire par sa radicalité autant qu’elle empêche l’analyse objective et détaillée de l’école.

Un Hamster à l’école, Nathalie Quintane, La fabrique éditions. 13 euros.

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