MUSIQUEMusique en bref

MUSIQUE EN BREF – Un air d’hiver

C’est reparti pour une tournée de chroniques musicales. Nos rédacteurs.ices décortiquent pour vous les albums et EP qu’il ne fallait surtout pas manquer ces deux dernières semaines.

Born Idiot – Full Time Bored 

Le groupe basé à Rennes sait comment adoucir les mœurs et nous le prouve un peu plus avec ce second album – trois ans (déjà ?) après Afterschool. La totalité de cette composition s’impose comme une belle ballade pop et synthétique aux sonorités lo-fi. Full Time Bored est une invitation sincère à prendre le temps – comme sur A Coin For A Jukebox qui tout en douceur mêle la voix à la candeur froide des guitares ; I’d Rather Lie, mettant magnifiquement en relief la rondeur des accords, ou Asphalt, qui joue sur une seule et même ligne légère et tamisée. L’album s’écoute comme un ensemble, mais bien sûr quelques compositions se démarquent tangiblement, comme Is My Color Blue ou My One True Sin, se voulant résolument plus pop – et indéniablement valorisés par leur sortie sous forme de singles avant la sortie de l’album. On notera également ici le superbe travail visuel de l’artiste Camille Le Treust – 1000rouges – qui signe une cover d’album parfaitement en accord avec le mood transmis par le contenu musical.

Sortie le 20 novembre

Coups de cœur : Is My Color Blue, Under Colors

Caroline Fauvel

Le Juiice – JEUNE CEO

Après Trap Mama, Le Juiice s’affirme comme figure montante sur Jeune CEO. Introspectif, ego trip à souhait, grosse trap et flows imposants, la jeune artiste, originaire du 94, nous raconte sa vie de jeune entrepreneuse. Après être apparue aux côtés des plus grosses pointures (Hayce Lemsi, Kpoint, Joé Dwèt Filé, Jok’air etc), Joyce s’était faite remarquée sur son projet projet introductif en avril dernier. La rappeuse est fédératrice et elle s’entoure de poids lourds : Meryl sur le titre Onono, en feat avec Jok’Air avec qui elle avait déjà collaboré pour le titre Bonne bonne et enfin, l’excellent Buvance accompagnée d’un Stavo (13 Block) toujours plus performant. Si Jeune CEO est un condensé de punchlines teinté de trap, des sonorités sensuelles sur Rich Sex (feat. Jok’air), ou intimes et mélancoliques sur Flashback, viennent contrebalancer un ego trip assumé et inspirant.

Sortie le 27 novembre

Coups de coeur : Drip en stock, Buvance

Inès Zeghloul

Dinos – Stamina,

Dinos qualifiait Stamina, comme étant le meilleur album de sa vie. Si cette appréciation reste personnelle, le 5ème projet de l’artiste est un bijou de surprises couronnant parfaitement une carrière au talent d’une sensibilité croissante. Stamina, c’est la consécration de Dinos à ce qui semble être son meilleur niveau, le fruit d’un travail de longue haleine qui s’épanouit dans ce très complet 14 titres. L’opus s’offre la surprise des fans qui ne s’attendaient pas à une tracklist dissimulant six featurings de très haut standing : Nekfeu présent sur la très grosse collaboration rap Moins un ; Maman m’aime avec Da Uzi ; le talentueux Tayc sur le hit Je Wanda  ; Le Nord se souvient accompagné de la hype de Leto ; le seul feat annoncé avec Laylow sur Ciel pleure et enfin l’inattendue et prometteuse présence de Zikxo et Zefor sur le titre Judas. Quant à ses titres en solo, le rappeur peut compter sur de très lourdes productions. La renommée de Twinsmatic pose son empreinte sur les morceaux Dyptique et Moins un. Le rappeur embrasse parfaitement le mouvement drill avec Corbillard et, accompagné d’un blues typique, sur Césaire. Si la marque de Dinos est palpable sur des titres d’une juste mélancolie romantique tels que Demain n’existe plus ou Madone, l’épilogue 93 mesures est un véritable coup de cœur général. « Le bonheur est dans les choses simples », la justesse sans fioriture des lyrics posées sur le piano d’un morceau fleuve est un véritable symbole, l’apogée du projet, si ce n’est d’une carrière.

Sortie le 26 novembre

Coups de cœur : 93 mesures, Je Wanda

Inès Zeghloul

13 Block – BLO II

Zed, Stavo, Zefor et OldPee réaffirment leur marche forcée vers les plus hauts échelons du rap français. Après Triple S (2018) et BLO l’an passé, les sevrannais lâchent un 19-titres explosif. Plusieurs semaines de teasing accompagnées par la sortie du banger Tieks en feat avec Niska et du découpage de mesures orchestré sur Babi, avaient suffit à propulser la sortie de BLO II dans la catégorie des albums les plus attendus de cette fin d’année. Les promesses sont au rendez-vous. BLO II est un projet complet entre son agressif à souhait (S.W.P.V, Traîtres), classiques à la 13 Block comme sur Heps ou Plata qui rappelle Triple S, sonorités dansantes sur Bendo, ou encore, mélancolies entêtantes avec Oiseaux, Je me démerde ou Moula. L’album joue surtout à la gonflette avec cinq grosses collaborations. Si l’alliance sevrannaise de Maes paraît logique, le tout aussi attendu Aminata (feat. PLK) met le kickage de côté pour privilégier des rythmiques mouvantes. La hype de Zola est mise à l’honneur sur Kobe, accompagnée d’une prod taillée sur mesure. Mention spéciale au bien moins prévisible feat avec SCH. Sur une sombre production maîtrisée par le talentueux Junior A La Prod, le marseillais échange les punchlines avec un unique Stavo qui explose totalement, se hissant au fil de l’album à un niveau remarquable, à suivre d’urgence.

Sortie le 27 novembre

Coups de cœur : Babi, Pavel, Oiseaux

Inès Zeghloul

Bingo Club – Separated (EP)

Aligné il y a quelques jours sur la scène du FGO Barbara dans le cadre du festival Ici Demain, Bingo Club y présentait son premier EP Separated, sorti quelques jours plus tôt. Mixé par Al Carlson (crédité sur les prods de Weyes Blood, Peaking Lights ou encore St Vincent), les 5 titres de l’EP témoignent d’une généreuse et agréable légèreté, tant dans la voix de Martin que dans les sonorités douces et lancinantes que véhicule l’EP. Des inspirations évidentes, de Timbre Timbre (Dance Me) à Procol Harum (Call Center) en passant par Lou Reed (Now it’s never), Bingo Club offre ici un soft rock cotonneux et mélancolique. Sans oublier ses clips, tournés à la Super 8, qui retracent les multiples pérégrinations de la bande (Martin, Marie-Paule, Emile et Vassili), de l’Europe aux États-Unis en passant par le Sahara et l’Himalaya. Et s’il n’y a plus vraiment de surprise à la sortie de l’EP – en partie causée par la stratégie compte gouttes opérée depuis le premier single Dance Me – le disque n’en reste pas moins une très belle sortie et conforte la promesse qu’il faudra garder un l’œil sur ce collectif. 

Sortie le 20 novembre


Coups de cœur : Now it’s never, Call Center, Dance Me

Guillaume Lacoste

Zinée – Futée (EP)

C’est un monde brumeux et obscur qui s’ouvrait devant nous à la découverte du premier single de Zinée Personne paru au courant de l’année 2020. La magicienne triste originaire de Toulouse sème par la suite trois tracks pour nous guider dans sa bulle musicale et dessiner les contours de son projet. Membre du collectif 75 ème session (Georgio, Népal, Di-Meh), elle s’est entourée du rappeur, beatmaker, ingénieur son Sheldon pour composer ses productions. Le 20 novembre dernier, elle dévoilait son premier EP Futée, un quatre titres ténébreux et mélancolique où elle calme le rythme et déferle ses états d’âmes gris. Un premier essai où la voix sensible et atypique de Zinée se pose sur des instrus tantôt drill (Ces gens), tantôt aériennes et nébuleuses (Orchidée, Minitel). Démons intérieurs, quête de lumière et complaintes solitaires : la rappeuse nous livre son carnet intime de maux et ses facettes les plus sombres. Un projet qui mérite d’être entendu tant pour l’esthétique numérique élaboré avec soin que pour le talent qui coule dans le sang de cette graine d’artiste. Une étoile triste du rap qui jette des fleurs fanées sous nos pieds et bercera pour sûr vos plus belles errances.

Sortie le 20 novembre

Coups de coeur : Minitel, Orchidée

Pauline Pitrou

KARLITA – AMOR FABOLA (EP)

S’il y avait ne serait-ce qu’une prodige de la French house à suivre en ce moment il s’agirait de KARLITA. Révélée en partie par le premier vinyle de Trax Magazine sorti cet été, cette artiste mêle ses influences trip-hop et ambient pour proposer une musique limpide et incandescente. Elle suggère un son à la fois solaire et très sophistiqué ce qui ne manque pas d’accrocher l’oreille, et ce dès la première écoute – comme sur le titre A tiger in the heart qui nous berce sans difficulté, ou sur Body Language qui bien que plus rythmique laisse place à une véritable fluidité dans la matière sonore mobilisée. Après un premier EP sorti en 2019 – Lazydayz – la jeune femme appuie ainsi son esthétique visuelle et sonore, accordant une position plus affirmée à la voix dans ses compositions, et créant une symbiose prononcée entre ses morceaux.

Sortie le 27 novembre

Coups de cœur : d’I Can’t Wait à Unfaithful (tout l’EP)

Caroline Fauvel

La Belle Vie – Bluettes (EP)

Quelque part entre une après-midi d’été brûlante et une nuit torride il y a La Belle Vie. Après une poignée de titres colorés lancés dans nos oreilles depuis l’année dernière, le groupe originaire de Saint-Etienne dévoile son tout premier EP Bluettes. Un titre doux et floral qui signifie finalement une “oeuvre sans prétention, empreinte de sentimentalisme”. C’est tout ce que nous offre La Belle Vie : une traversée romantique entre soleil orange et nuit bleue où la musique se fait tantôt pop, tantôt rap autotuné. Un premier essai empli de légèreté qui ne manque pourtant pas de techniques, rien d’étonnant pour cette bande d’ami-es rencontré-es sur les bancs de l’école, entre fac de musicologie et conservatoire. Bluettes respire l’amour et nous invite à danser la vie entre groove enflammés et berceuses tropicales. Un bouquet de six titres pour célébrer la vie douce et le romantisme moderne.

Sortie le 27 novembre

Coups de cœur : Orphée, Zéphir, Professionnelle

Pauline Pitrou

TRENTE – Novembre (EP)

Il est des artistes qui font de leurs plus grands chagrins des chansons couvertures dans lesquelles on s’enveloppe en attendant le retour de la lumière. Parmi eux, on compte sans hésiter Trente, dompteur de sons, de mélancolie et d’images qu’on croise à la réalisation de clips pour Pomme, Tim Dup ou plus récemment Fils Cara. Quelques temps après la sortie de son EP Confinée paru en mai dernier, il revient nous bercer avec un quatrième EP Novembre plus expérimental et plus froid que le précédent. Un hymne aux disparu-es (Aux Absents) ou aux quartiers glacés de Paris (Gare du Nord, Pigalle) tous hantés par l’absence et la nostalgie d’un amour perdu. Des sample de rires et d’instants d’euphories, des choeurs qui s’emmêlent et toujours ces guitares aériennes et mélancoliques qui traversent l’univers musical fantomatique de Hugo Pillard. Dans Novembre, la mélancolie n’est pas morne et noire, elle est définitivement vivante et lumineuse. Un cinq titres où le jeune artiste peint avec sa voix et ses machines ses angoisses et ses peines qui nous aidera sûrement à embaumer l’hiver.

Sortie le 27 novembre

Coups de cœur : Aux Absents, Gare du Nord, Jamais Voulu

Pauline Pitrou

Shygirl – ALIAS (EP)

C’était la sortie d’EP à ne pas manquer ces derniers jours. Derrière cette pochette qui en cringera plus d’un.e ,e trouve le projet supra esthétique et ambitieux de Shygirl. Sorti chez Because ALIAS est un concentré vif de rythmiques denses, et de voix qui confèrent à la musique de Shygirl un élan certain d’enpowerment à la fois puissant et sexy. Dans chacune de ses compositions Shygirl attribue une énergie différente mais toujours bienvenue, comme sur FREAK qui bouscule tout sur son passage dans une techno deep, ou TASTY qui se veut être un hymne plus house et analogique. Près de quatre ans après ses débuts sur le single Want More, Shygirl poursuit cette dynamique musicale vibrante. ALIAS se veut être une invitation enivrante au clubbing – ce qui ne fait qu’accroître notre désir de potentiels live et/ou DJ Set à venir.

Sortie le 20 novembre

Coups de cœur : FREAK, SIREN

Caroline Fauvel

Yseult – BRUT (EP)

Après un passage par la Nouvelle Star dès 2013, qui fera d’ailleurs suivre un album «  qui ne lui ressemble pas  », Yseult nous livre désormais le dernier EP de son triptyque «  Rouge, Noir, Brut  ». Suite à de malencontreuses expériences, Yseult décide de créer son propre label, se libérant ainsi des maillons de la bienséance obsessionnelle. Plus de censures, plus d’obligations, plus de retenues. Que de la passion et des sentiments. Si Rouge était une invitation à fouler la piste d’un déhanché rythmé, que Noir exprimait la volonté d’une liberté retrouvée, Brut quant à lui explore les troubles de la relation amoureuse. Les titres abordent des sujets douloureux, conservent pourtant de douces mélodies. Ainsi Indélébile dépeint le deuil amoureux, tandis que Sexe -parsemé de strophes en anglais, est une ode aux rapports charnels.101 Regrets offre S. Prit Noir en featuring, BB touche au RnB, Néon Rouge valorise le regard de l’autre, et pour clore cet EP de six titres Bad Boy évoque l’amour de passage qui détruit. Celui qui ne dure «  qu’une chanson  », «  qui rend chienne  ». Un panel de sentiments obscures, mêlés d’un brin d’amour sincère. Mention spéciale pour Bad Boy (la version de Piano Va Sano à retrouver ici à 01:29:30.

Sortie le 20 novembre

Coup de cœur : Bad Boy

Léïna Jung

Fervente prêtresse de la pop française et de tout ce qui s'écoute avec le coeur.

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