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Sorti en salles en 1977, L’Emmurée vivante de Lucio Fulci est actuellement disponible sur le site d’Arte. Mais ce giallo vaut-il véritablement le détour ?
Fulci est surtout connu pour ses films gores ou ses westerns spaghettis, mais en homme de cinéma sachant saisir les chances qui se présentent à lui, il s’essayera aussi à plusieurs reprises au giallo.
Ce genre cinématographique – dont on fait fréquemment remonter la naissance aux années 1970 – pourrait grossièrement se résumer à un mélange de policier, d’épouvante et d’érotisme, le tout dans un décor marqué par un usage de couleurs vives participant à créer une ambiance presque onirique.
Un film à suspens inspiré du giallo
Si L’Emmurée vivante n’est ni un giallo révolutionnaire, ni le meilleur film de Fulci, le long métrage n’en est pas moins digne d’intérêt. Avec ce film d’une petite heure et demie, le cinéaste parvient à apposer sa patte sur ce genre très codifié en proposant un concept initial plutôt innovant qui teinte son métrage de fantastique.
Comme toujours, il est question dans L’Emmurée vivante d’un cas de meurtre dont subsiste des témoins. Ou plus particulièrement un témoin prenant les traits ici de Virginia Ducci (Jennifer O’Neill). Dotée d’un véritable don, Virginia a des prémonitions et ce sont ces dernières qui la rendent dangereuses aux yeux du tueur qui sévit en usant d’un mode opératoire pour le moins cruel, puisqu’il a la fâcheuse tendance d’emmurer vivantes certaines de ses victimes, comme l’indique le titre du film.
Si la perception et l’aspect parfois trompeur du regard qu’on pose sur la réalité a toujours été au centre du giallo, ici, Fulci met littéralement le regard de Jennifer O’Neill au centre de son métrage. Les yeux de la protagoniste agissent comme un miroir nous renvoyant vers les visions dont la jeune femme est frappée. Elle devient alors une enquêtrice amatrice et nous entraîne dans son sillon, ses visions agissant comme autant d’indices permettant au spectateur de deviner qui est responsable des crimes jalonnant le film. C’est en compagnie de Luca Fattori, son parapsychologue (Marc Porel) et de l’assistante de ce dernier, Bruna (Jenny Tamburi) – presque aussi perspicace qu’une Vera dans un épisode de Scooby-Doo – que Virginia remontera jusqu’au meurtrier.
Mais finalement, il semblerait que L’Emmurée vivante tienne beaucoup plus du film à suspens que du giallo dont il réutilise certains codes mais en abandonne totalement d’autres. L’originalité de ce film repose sur sa tendance à s’intéresser bien plus à l’aspect psychologique de ses personnages qu’à la mise en scène esthétisée des assassinats dont le spectateur est témoin. Cette originalité n’efface pas néanmoins la surenchère d’effets visuels grossiers dont Fulci fait usage dans sa mise en scène.
Un film vieilli ou savoureux
Visuellement, Fulci nous offre quelques plans inventifs, surprenants (la scène d’ouverture du film) et/ou à la symbolique forte. Comme dans nombre de giallo, le réalisateur fait baigner ses scènes les plus marquantes dans des tonalités de rouge indiquant la mort qui se trouve au détour de la caméra. Néanmoins il fait un usage beaucoup moins maîtrisé de ces couleurs que ne le faisaient à la même époque Mario Bava et Dario Argento dont les films marqueront plus durablement les esprits par leur esthétique très fouillée.
Le spectateur du XXIème siècle pourra trouver certains tics du réalisateurs totalement désuets. De fait, Fulci use du zoom manuel (accompagné d’effets sonores outranciers) avec une telle insistance que d’aucuns trouveront que L’Emmurée vivante touche parfois presque au ridicule. D’autres trouveront à ce film made in 70 un véritable charme suranné et se laisseront bercer par la bande son – aujourd’hui kitschissime – qui accompagne le métrage et les accents à couper au couteau du casting, majoritairement italien. Quoiqu’il advienne, quiconque s’essayant à regarder L’Emmurée vivante devrait y trouver un bon divertissement.
Le film rediffusé le dimanche 11 novembre à 23h30 sur Arte est à voir ou à revoir en VOD sur le site d’Arte jusqu’au 29 avril 2021.