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Après cinq jours de festival en ligne, la deuxième édition de Format Court s’est clôturée ce dimanche 22 novembre. Palmarès et coups de coeur de la rédaction, cette sélection 2020 nous prouve que le court a de beaux jours devant lui !
Se réinventer en ligne. Paris tenu pour la deuxième édition du festival Format Court. En cinq jours : cinq sessions de cinq films en compétition visibles pendant 24h. De cette organisation particulière, se dégagent des réalisateur.rices tous plus talentueux les uns que les autres, l’inventivité des courts d’animation, la diversité des sujets, des techniques, des visions, des histoires, etc. Dimanche dernier, le jury a rendu son verdict, six prix ont été attribués par ce dernier, deux par le jury presse et un par le public.
Palmarès :
Grand Prix : Genius Loci de Adrien Merigeau
Des dessins sublimes – empreints d’une poésie colorée et particulière – racontent la déambulation d’une jeune femme prénommée Reine animée par un esprit. Autour d’elle, tout est en mouvement, la ville bouge dans un mystère indescriptible et fabuleux, comme une libération.
Prix de l’image : Philippe Ulysse pour En faire le tour de Philippe Ulysse
Le port du Havre, les falaises d’Étretat, les galets des plages hautes-normandes. Deux marginaux, frères et soeurs, y vivent dans un monde bien à eux jusqu’à ce que lui rencontre une jeune femme au bord de l’eau. Philippe Ulysse rend compte à travers ces images d’une atmosphère particulière entre réalisme et onirisme au contact d’acteur.rices singulier.ères.
Prix du scénario : Loïc Barché et Marie Monge pour L’aventure atomique de Loïc Barché
Algérie, 1961. Des soldats français sont envoyés jusqu’au point d’impact pour effectuer des prélèvements et des mesures de la radioactivité après les bombes atomiques envoyées par la France. Pourtant, l’ambiance qui règne dans le film de Loïc Barché ne semble pas être celle des années 1960 en Algérie. Un souffle de western galactique enrobe la mise en scène dans ce désert qui pourrait être la découverte d’une planète éloignée. Les comédiens Swann Arlaud, Olivier Rabourdin et Matthieu Lucci (L’Atelier) sont à l’image de l’écriture entre douceur et aridité.
Prix de la meilleure création sonore : Machini de Frank Mukunday et Tétshim
Dans ce court métrage à l’inventivité bricolée, les réalisateurs évoquent les ravages écologiques et sanitaires causés par l’extraction minière en République Démocratique du Congo. Efficace, ce film agit comme un appel à l’aide, sur ce tableau noir du malheur, les cailloux s’animent et le travail du son – pour lequel le film est récompensé – est effectivement d’une incroyable puissance.
Machini / Frank Mukunday & Tétshim / 2019 / Teaser Fr from Atelier Graphoui on Vimeo.
Prix d’interprétation : Jackie Ewing dans Sole Mio de Maxime Roy et Nadia Moussa dans Genius Loci de Adrien Merigeau
Comment retenir ses larmes face au regard que porte le personnage de Jackie Ewing sur son fils dans Sole Mio ? Depuis quatre ans, la mère de Daniel se morfond sans nouvelles du père de ce dernier. Quand celui-ci vient retrouver son fils, en Lisa avant de partir faire son opération, Daniel aimerait qu’il aille l’annoncer à sa mère. Intimiste et profond, Maxime Roy capte des instants d’émotions saisissants de ces personnages et acteur.rices.
Mentions spéciales : Notre territoire de Mathieu Volpe et Désirée de Eloïse Guimard
https://player.vimeo.com/video/323573899
Désirée se présente comme un documentaire animé où l’histoire violente d’une famille se raconte. Les secrets enfouis se dessinent tandis qu’en voix off les horreurs et leurs conséquences nous sont narrées.
Prix de la presse : Notre territoire de Mathieu Volpe
Mention spéciale : Machini de Frank Mukunday et Tétshim
Vote du public : Sole Mio de Maxime Roy
Nos coups de coeur :
La Veillée – Riad Bouchoucha
Salim et Imad sont deux frères que tout oppose : l’un est très religieux, l’autre pas du tout, l’un est parti faire sa vie d’avocat à Paris alors que l’autre n’a jamais quitté le nid familial. Lorsque leur mère décède, toute la famille se rassemble pour observer les traditions funéraires et honorer la défunte. Alors que leur appartement familial est envahi par des proches que Salim ne reconnaît pas, les tensions entre les deux frères s’intensifient. La Veillée traite d’un sujet purement universel, le deuil, à travers le prisme des traditions. Des traditions qui les éloignent souvent, mais qui vont finalement être l’occasion pour Salim et Imad de se retrouver. Un hommage intimiste à la force des traditions au sein de cette famille désunie, en proie à une épreuve des plus douloureuses.
Garance Nicpoń
Caroline – Celine Held et Logan George
Texas, un jour de canicule. Alors que sa mère se rend à un rendez-vous, Caroline reste seule dans la voiture, en charge de ses jeunes frère et soeur. C’est finalement elle qui va endosser le rôle de mère, s’occupant de sa famille sans percevoir clairement le danger de la chaleur caniculaire qui réchauffe de plus en plus le véhicule. Ce court métrage poignant met en lumière une jeune fille confrontée à des responsabilités d’adulte, sans vraiment comprendre les circonstances tragiques entourant sa famille. Face à une mère célibataire désorientée qui lutte pour garder ses enfants près d’elle, elle fait preuve d’une innocence bouleversante. Un dessin dur et émouvant d’un évènement déchirant à travers les yeux d’une enfant.
Garance Nicpoń
Caroline Trailer from ELO films on Vimeo.
Music for one apartment – Johannes Stjärne Nilsson et Ola Simonsson
Music for one apartment s’appuie sur un principe de base surréaliste : à la manière de cambrioleurs, six musiciens s’attaquent à un appartement. Planqués devant leur immeuble, ils attendent patiemment qu’un couple quitte son domicile pour s’y faufiler en douce. De la cuisine au salon, ils « braquent » l’appartement en interprétant dans chaque pièce un morceau de musique à l’aide des objets présents dans l’appartement. Ce court métrage suédois complètement délirant a quelque chose de furieusement poétique. Là où nous sommes habitués à voir de la violence, c’est tout à coup la musique qui prend place. Décalé, unique, Music for one apartment est un petit OVNI très divertissant débordant d’une douce folie.
Garance Nicpoń
Les Derniers feux – Benjamin Busnel
Mise en abyme expérimentale, dans Les Derniers feux un réalisateur se rend au Festival de Cannes avec son actrice ici interprétée par Clotilde Hesme. Hommage à La Jetée de Chris Marker, les photos en noir et blanc de la comédienne se superposent les unes après les autres. Pendant ce temps, en voix off rythmée par la musique et les sons de la ville, le réalisateur raconte, le texte est sincère, brut et poétique, « Évidemment, je ne lui dis pas que je la trouve de plus en plus belle avec le temps qui passe. » Les personnages recherchent des financements pour un film qu’ils ont écrit mais c’est un autre qui voit le jour sous nos yeux.
Diane Lestage
Gronde marmaille – Clémentine Carrié
Le soleil plombant de la fin du mois d’août chauffe les corps des enfants. Pendant que ses parents font l’amour, Boubou s’ennuie devant la caravane du camping. Elle entraîne alors avec elle son ami Danny pour affronter l’orage qui gronde autour d’eux. L’insouciance sauvage et innocente de l’enfance face au intempéries, une manière d’affronter le monde en dansant et chantant, eux deux contre l’univers. Puissant.
Diane Lestage
Gronde Marmaille – Trailer VO from Manifest on Vimeo.
Les Saints de Kiko – Manuel Marmier
Une illustratrice japonaise prénommée Kiko est en mission en France. Alors en manque d’inspiration, elle croise deux hommes faisant l’amour dans les dunes pendant une promenade. Obsédée par cette image, Kiko va les épier, les dessiner, gribouiller les pages de son calepin. A travers ces deux hommes, ces corps, ces sexes, si éloignés d’elle et de sa culture, la jeune femme se découvrira et tout son monde sera bouleverser de son travail au plus profond de son être. C’est beau comme une épiphanie.
Diane Lestage