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« Les Cahiers d’Esther » – Tome 5 : l’âge de conscience

Crédits : Riad Sattouf – Les Cahiers d’Esther / Allary Éditions

C’est devenu un rituel depuis maintenant quatre ans, la sortie des Cahiers d’Esther de Riad Sattouf est un petit événement synonyme de légèreté pour les lecteurs.trices. Nous retrouvons Esther cette fois pour l’année de ses quatorze ans, l’année de la 4ème, puis celle de la 3ème, une année charnière dans une adolescence en pleine effervescence.

Si nous le connaissons essentiellement pour le succès de l’Arabe du Futur, on apprécie aussi les talents de Riad Sattouf pour cette BD devenue incontournable, Les Cahiers d’Esther, série où le bédéaste relate des morceaux de vie, des parenthèses, du point de vue d’une véritable Esther, devenue ici le personnage de sa propre vie. En témoigne cette planche à la page 13, où la jeune fille explique s’être rendue à l’exposition Riad Sattouf au Centre Pompidou et observe incognito les réactions diverses des visiteurs à son personnage.

La force des Cahiers d’Esther réside dans un processus d’identification qui nous lie de plus en plus, Esther s’approchant de l’âge adulte, ses raisonnements concordent progressivement avec le public auquel est destiné cette BD (à savoir un lectorat adulte et adolescent), et s’éloignent d’une certaine naïveté ; qui bien qu’encore présente laisse place à une forme de lucidité sur le monde. Cette force d’identification se trouve tout simplement dans l’évocation de faits culturels majeurs proches de nous aussi bien temporellement que culturellement. Ce sont des souvenirs collectifs récents, qu’il s’agisse de la mort d’Aznavour (page 7), du phénomène pop Angèle (page 38), des Gilets Jaunes (page 15), ou encore de l’incendie de Notre Dame (page 34). La proximité entre les faits et la sortie de la BD continue de développer l’effet documentaire de celle-ci.

Crédits : Riad Sattouf – Les Cahiers d’Esther / Allary Éditions

Esther se trouve dans cet entre deux partagé entre une conscience naissante du monde qui l’entoure – qui s’amorçait déjà dans les précédents tomes – et cette légèreté encore propre au rapport entretenu avec l’enfance. Esther appréhende les premiers amours qui deviennent plus sérieux (page 52), le comportement (parfois) problématique des garçons (page 8), ou des prises de conscience politiques poussées par le contexte social et l’influence de son amie Zoé (page 31). Nous retrouvons cependant cet aspect primaire des sensations qu’elle décrit et qui nous échappe peu à peu en grandissant. Se dégage entre les pages une pointe de nostalgie, en songeant à la Esther de 10 ans, dont les punchlines détachées nous marquaient significativement, une évolution dont elle prend elle-même conscience ; lorsqu’elle revoie des photos de son ancienne meilleure amie Cassandre (page 29) ou qu’elle imagine sa vie dans 30 ans (page 32).

Crédits : Riad Sattouf – Les Cahiers d’Esther / Allary Éditions

Quoiqu’il en soit il est toujours agréable de se (re)plonger dans ces aventures simples mais singulières empreintes d’une époque, d’une culture et qui documente cette période de transition entre l’enfance et l’âge adulte, où Esther se rêve en idéaliste affirmant progressivement ses idées et convictions pleines de bons sentiments. – La BD se poursuivra encore pour quatre tomes jusqu’aux 18 ans d’Esther.

Les Cahiers d’Esther – Tome 5, Histoire de mes 14 ans / Allary Éditions – 16,90 €

Du cinéma et de la musique - Master Métiers de la Culture

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