Netflix a dévoilé ce week-end une mini-série coup-de-poing au sujet sensible et pourtant si important. Unbelievable dépoussière avec justesse le genre policier en redonnant une voix aux victimes de viols réduites au silence par les autorités.
Aucune promotion n’a été faite pour annoncer la sortie de ce drame glaçant composé de huit épisodes. Et pour cause, comment communiquer sur une série qui traite de violences sexuelles et pointe du doigt les dysfonctionnements des forces de l’ordre ?
L’intrigue s’articule autour du personnage de Marie Adler (brillante Kaitlyn Dever), une adolescente au parcours tumultueux. Enfant du système depuis toujours ou presque, Marie a connu de nombreuses familles d’accueil avant d’obtenir son propre logement. Une nuit, un homme cagoulé s’introduit chez elle et la viole dans d’affreuses circonstances. Marie se confie à la police après cette nuit d’horreur. La série de Susannah Grant donne alors à voir les étapes par lesquelles les victimes sont forcées de passer : répéter, encore et encore, les atrocités de l’agression à des policiers différents, la paperasse interminable à remplir et les examens médicaux pénibles à endurer. Cependant, le récit de Marie ne convainc pas les autorités qui décèlent des incohérences dans son discours. Face à la pression des deux enquêteurs et aux doutes de plus en plus persistants de ses proches, la jeune femme retire sa plainte et admet avoir menti. Le traumatisme est alors double pour Marie qui passe de la position de victime à celle de l’accusée : elle est poursuivie pour déclaration calomnieuse. L’univers de l’héroïne s’écroule progressivement lorsqu’elle perd son emploi, son logement mais aussi la confiance de ses proches.
Traitement double
En parallèle de l’histoire de Marie, la série fait un bond dans le temps de trois ans pour suivre deux policières (Toni Collette et Merritt Wever) amenées à travailler ensemble après avoir remarqué des similitudes entre leurs enquêtes respectives. La prise en charge des victimes, là aussi de viols, est radicalement différente. Alors que Marie est soumise à des discours condescendants de la part des agents de police, Amber (Danielle Macdonald) est traitée avec soin et empathie par la détective Karen Duvall. Unbelievable dénonce ici le manque de compétences de certains policiers qui ne sont pas formés à la prise en charge de victimes d’agressions sexuelles.
Cette double narration, extrêmement bien menée, entraîne le spectateur dans les dessous d’une enquête aussi horrible que prenante. La chasse à l’homme débute pour retrouver ce violeur en série et les femmes en ayant subi les sévices sont progressivement introduites dans le récit. Là où la série excelle, c’est dans la représentation qui est faite des victimes de ce bourreau. Toutes d’âges et d’horizons différents, Unbelievable donne un visage multiforme et réaliste aux victimes des ces attaques et rappelle que toutes les femmes peuvent être concernées. La série met également en lumière les différentes réactions qui font suite au traumatisme vécu. Marie prétend aller bien malgré son entrée progressive dans la dépression, Lily n’arrive plus à sortir de chez elle sans avoir peur et Amber se réfugie, sans le comprendre, dans le sexe.
Le récit n’hésite pas à nous mener avec intelligence sur des fausses pistes et avance à tâtons, à l’image des enquêtrices qui cherchent à retrouver la trace de ce violeur au mode opératoire quasi-militaire. Très vite, les deux femmes émettent l’hypothèse que seule une personne qui connaît les rouages du système policier américain peut être à l’origine de tels actes. L’intrigue souligne encore un peu plus les failles organisationnelles des forces de l’ordre et notamment le fait que les services ne communiquent pas les uns avec les autres.
Une série définitivement féministe
Alors que Marie vit en silence avec les atrocités dont elle a été victime, il faudra attendre trois longues années pour que la vérité soit enfin révélée grâce au travail de deux policières bien décidées à rouvrir l’enquête. Deux femmes donc, qui se sont emparées du dossier pour enfin l’élucider malgré le peu d’indices à leur disposition. Ces personnages féminins viennent bousculer la traditionnelle figure d’autorité masculine que l’on retrouve dans de nombreuses séries policières. Le genre est ici fraîchement renouvelé et la série prend la forme d’un polar passionnant et indéniablement féministe. Ce récit bouleversant l’est d’autant plus lorsque l’on sait qu’il est inspiré d’une histoire vraie.