Depuis le 31 mars 2019, les manifestations anti-gouvernement se multiplient à Hong Kong. Devenues au fil des mois de plus en plus violentes, elles avaient pour objectif initial de protester contre l’amendement de la loi d’extradition vers la Chine.
Suite aux discussions liées à l’amendement de la loi d’extradition vers la Chine, quelques manifestations pacifiques s’organisent à Hong Kong via une application de messagerie dès février 2019. Le mouvement, qui compte également des membres du Front civil des droits de l’homme, prend de l’ampleur au fil des mois.
Les origines du mouvement social
Lors de ces premiers rassemblements pacifiques, les manifestants demandent le retrait de l’amendement sur l’extradition vers la Chine. Ils craignent que l’entrée en vigueur de cette loi menace l’indépendance juridique de Hong Kong qui possède le statut de RAS (Région Administrative Spéciale) depuis sa rétrocession à la Chine en 1997. Ce statut spécial garantit, en temps normal, à Hong Kong une grande autonomie sur le plan économique, politique et social. Les pros-démocrates redoutent que le pouvoir de la RPC (République Populaire de Chine) s’étende à leur territoire, remettant en cause leurs libertés et les menant vers un système plus autoritariste. Toute personne se trouvant sur le territoire hongkongais et jugée comme un criminel par la RPC pourra ainsi être extradé et jugée par le régime autoritaire chinois.

Face aux pressions exercées par 70 ONG ainsi que les membres de son parti politique, Carrie Lam, la cheffe de l’exécutif hongkongais a presque renoncé au-dit amendement à la mi-juin. La suspension de ce projet de loi devait permettre de calmer les tensions et de mettre fin aux manifestations grandissantes. Face à cette mesure, jugée insuffisante par les opposants au gouvernement, les rassemblements se sont poursuivis pour demander à ce dernier le retrait définitif du projet de loi contesté.
Affrontements civils
Mais cet évènement politique et social majeur semble avoir pris une toute autre tournure et les Hongkongais se livrent désormais à de véritables affrontements civils. Lors des manifestations contre l’amendement de la loi d’extradition, les opposants au gouvernement se sont montrés vêtus de noir. En opposition à ces pros-démocrates, des Hongkongais vêtus de blanc et soutenant le gouvernement de Carrie Lam ont récemment fait leur apparition dans les médias. Les images montrant des combats entre les deux factions se multiplient. Sur Twitter, à l’autre bout du monde, on s’indigne de ces images d’une grande violence et le mot-dièse #PrayForHongKong réuni déjà 148.000 tweets suite à la révélation de ces images.



Dans ces vidéos violentes, le combat oppose des hommes en blanc, armés de bâtons, aux manifestants pro-démocratie vêtus de noirs et armés de parapluies pour se protéger des bombes lacrymogènes de dispersion employées par la police lors des manifestations. Un combat inégal dans lequel les manifestants pros-démocrates semblent victimes d’hommes en blancs accusés d’être des membres des triades hongkongaises. La police, qui n’interviendra que bien plus tard ce jour-là, sera accusée de complicité par les militants pros-démocrates.



Ces rassemblements qui avaient pour but, à l’origine, de protester contre le vote d’une loi sont aujourd’hui devenus le symbole de la division du peuple hongkongais face au gouvernement pro-Pékin : aux pros-gouvernement s’opposent les antis-gouvernement. La réaction de l’exécutif hongkongais ne s’est pas faite attendre, Carrie Lam a appelé à l’apaisement du conflit en condamnant les deux camps.
Un amendement condamné par les puissances étrangères
La Chine réaffirme son soutien au gouvernement hongkongais et dénonce une “ingérence étrangère” ainsi que la collusion des manifestants avec les puissances de l’Ouest. De l’autre côté de l’échiquier politique, bon nombre de grandes puissances, elles, condamnent l’absence de communication du gouvernement avec le peuple hongkongais. C’est le cas du Royaume-Uni, dont Hong Kong est l’ancienne colonie. Dès le 1er juillet Jeremy Hunt, Secrétaire d’état des affaires étrangères et du Commonwealth (qui concourait également pour le poste de Premier Ministre), s’était exprimé sur Twitter.
Le soir même il avait renouvelé son soutien au peuple hongkongais dans une interview accordée à SkyNews en affirmant “My heart goes out to people who do have to fight for their freedoms and who are worried they could loose very very precious way of life.” (“Mon soutien va à ces gens qui sont obligés de se battre pour leurs libertés et qui sont inquiets de perdre un mode de vie très précieux.”). Les puissances régionales d’Asie et les puissances occidentales accordent, pour la majorité, leur soutien au peuple hongkongais et appellent à un plus grand dialogue entre le gouvernement et son peuple. La RPC semble alors faire cavalier seul.
Une menace chinoise de taille
Face à l’ampleur des manifestations et du mécontentement social qui gronde, le gouvernement chinois n’a pas manqué de faire planer sur le peuple hongkongais la menace d’une intervention militaire. Suite à la mise en place de barricades autour du bureau de liaison chinois pro-Pékin, Wu Qian, porte-parole du ministère de la Défense chinoise, a jugé la situation actuelle “d’intolérable”. L’indignation de Wu Qian s’est accompagnée d’un appel à l’ordre qui avait tout d’une menace puisqu’il a clôturé son discours en rappelant que “Les dispositions de l’article 14 de la Loi sur le cantonnement sont claires”. Une menace subtile qui rappelle aux hongkongais la présence sur leur territoire de garnisons chinoises de l’Armée Populaire de Libération (APL) autorisée à intervenir en cas de nécessité et ce depuis 1997. Leur intervention doit cependant faire suite à une demande de la part du gouvernement hongkongais.
“Le gouvernement de Hong Kong n’a pas l’intention de demander l’assistance de la garnison”
Eric Chan Kwok-ki, directeur du cabinet de l’exécutif, lors d’une interview accordée au Courrier International.
Lors d’une interview accordée à nos confrères du Courrier International, le directeur du cabinet de l’exécutif, Eric Chan Kwok-ki aurait affirmé que “le gouvernement de Hong Kong n’a pas l’intention de demander l’assistance de la garnison”.
Ces propos ne semblent pas avoir calmé la colère qui gronde actuellement au cœur de la Perle de l’Orient et cinq nouvelles manifestations sont déjà planifiées par les opposants à la loi d’extradition et au gouvernement pro-pékin dans les semaines à venir.