Photo : © Thibault Biju-Duval
En 1999, le premier festival Solidays est inauguré pour pouvoir financer des actions contre le sida dans le monde. 21 ans plus tard, la lutte est toujours présente et le festival ne perd pas de son engagement.
Beaucoup de personnes viennent aux Solidays, depuis plusieurs années, pour bénéficier d’une programmation musicale de qualité, comme lors de l’édition 2019 qui s’est déroulée du 21 au 23 juin. Mais comment échapper à l’engagement voulu par l’organisateur Solidarité Sida ? Plusieurs bénévoles et militants du festival ont décidé de nous parler de leurs combats pour le Maze.
Un engagement de 21 ans
L’événement est rythmé par différents temps forts sur la lutte contre le sida depuis sa création. Entre deux concerts, des bénévoles de diverses associations profitent du retour au calme sur l’hippodrome de Longchamp pour donner sur scène des chiffres sur le sida. L’objectif est de capter un public majoritairement jeune présent sur place pour sensibiliser sur ces questions toujours prégnantes : environ 37 millions de personnes dans le monde vivent avec le VIH en 2017, selon Sida Info Services, dont 15 millions ne bénéficient pas d’un traitement. Les Solidays, avec Solidarité Sida, souhaite se battre pour donner l’accès à un traitement à ces personnes.
Si 60 % des séropositifs ont accès un traitement, « il faut penser au 40 % restants » nous partage Benjamin, membre du Bureau de Solidarité Sida. L’engagement de l’association est que la France puisse davantage s’engager sur le Fonds mondial pour donner un plus large accès aux soins de ces malades. En attirant des festivaliers, il espère pouvoir sensibiliser et engager les jeunes sur cette question. Mais une autre thématique tient à cœur Solidarité Sida, qui est selon Benjamin « la principale thématique » : celle de l’identification des personnes séropositives ne connaissant pas encore leur statut sérologique. Il milite alors pour une « politique de dépistage plus adaptée ». Il estime que « les chiffres ne vont pas évoluer si nous n’atteignons pas certaines populations ».
Sensibiliser de différentes manières
Derrière ces objectifs, le festival a pour dessein de partager une vision positive de la sexualité tout en sensibilisant. Pour cela, l’association a monté, au sein du village associatif, une exposition sur les chiffres du VIH ou sur les moyens de protection. Pour Caroline, on y souhaite parler « du plaisir, du désir, de prises de risque et prévention ». Elle est bénévole de l’exposition lors du festival et est chargée de prévention le reste de l’année pour Solidarité Sida. Elle réalise une trentaine de formations par an avec des jeunes et des lycéens sur ces thématiques. Ce qui l’attire dans ce militantisme c’est de voir « des jeunes qui parlent aux jeunes ». Selon elle, cette exposition et ces préventions sont nécessaires car « il faut être proche des préoccupations des jeunes. On doit parler de sexualité de manière positive. Il ne faut pas oublier que le sexe est source d’épanouissement et de plaisir ». Elle dit regretter et s’opposer alors à la manière « négative » dont on évoque la sexualité dans les établissements scolaires.
Au village associatif, nous avons pu rencontrer aussi certains militants qui veulent sensibiliser d’une manière plus originale comme Jérémy Chalon, salarié pour le Crips et bénévole pour le festival. Il souhaite que la France s’engage dans la lutte contre le sida en finançant davantage l’accès au traitement. Pour médiatiser sa position, il a décidé de réaliser un « tour de France » en faisant une « boucle » afin de reproduire le ruban rouge, symbole du sida, du 3 septembre au 8 octobre de Bordeaux à Lyon où se tiendra la réunion du Fonds mondial de lutte contre le sida. Une équipe le suivra alors lors de son périple pour pouvoir organiser des événements et ateliers afin de les sensibiliser et de les engager sur la position de la France vis-à-vis du fond mondial mais aussi pour « je puisse remettre en ruban rouge à Macron à l’issue de mon voyage ». Il pense que « si on fait une pause dans l’engagement, le nombre de nouveaux contaminés par le VIH va augmenter ».
Susciter l’engagement des festivaliers
Sensibiliser pour engager les festivaliers, ceci est devenu le credo de Solidarité Sida depuis 21 ans. L’association organisatrice du festival veut montrer aussi que ne plus sensibiliser et oublier la lutte contre le sida peut être synonyme de mort pour de nombreuses personnes dans le monde. La France n’a pas été épargnée elle aussi par le sida : lors des années sida, 30 000 Français sont mort de ce virus. Le samedi 22 juin à 17h, les stands ont dû alors éteindre leurs musiques pour pouvoir se concentrer sur un hommage émouvant en l’honneur des victimes du sida. Lors de ce moment, l’association le Patchwork des Noms a exposé de nombreux patchworks dont chaque carré représente des victimes du sida. Leur objectif est de ne pas oublier ces morts. Melody milite dans cette association pour « rappeler qu’on meurt encore du sida. Et même si on a la chance d’avoir un traitement, on n’a pas la vie facile ».
Nous avons aussi rencontré Sébastien, militant depuis 17 ans aux Solidays et à Solidarité Sida. Il nous dit que « c’est lors d’une intervention de l’association dans son lycée que je me suis dit : je veux faire ça ! ». C’est aussi la rencontre avec Bruno Pascal Chevalier, l’ancien président des Patchworks des noms qui lui a donné le goût de l’engagement. « Mais c’est finalement en allant aux Solidays que j’ai franchi le pas ». Il nous dit, ému : « ce que je trouve magique ici, c’est que tu es pollué toute l’année par des messages négatifs et des insultes et aux Solidays on rencontre des militants qui parlent de leur combat avec le sourire ».
Les Solidays ont alors su rendre les festivaliers militants depuis sa création, et ce, de manière constante. C’est grâce aux Solidays que Sebastien, Melody et Caroline se sont engagés il y a respectivement 17 ans, 4 ou 2 ans. Pourtant, ce même engagement depuis 21 ans met en exergue les faibles progrès en ce qui concerne la lutte contre le sida.